Quand un vicomte ne rencontre pas un autre vicomte...

Chevalier«  Quand un vicomte rencontre un autre vicomte… » ; On connaît la chanson de Maurice Chevalier : « Qu’est-ce qu’ils s’racontent ? Des histoires de vicomtes ».

Alors si on ne veut pas s’enfermer dans nos histoires de vicomtes, toujours les mêmes, il est bon de mélanger et de diversifier un peu plus nos cercles de discussions et nos rencontres.

C’est exactement l’idée d’une grande entreprise qui m’a invité à participer à un « groupe de réflexion » autour du thème de l’expérience et de la relation client. Nous étions une dizaine, une coach, un chercheur, des experts Innovation de grands groupes, un start-uper de la blockchain, un expert en I.A, un « Chief Scientific Officer », un analyste d’un institut de recherche Marketing, une « Head of B2C&CX », tous d’entreprises différentes, des femmes et des hommes, peut-être pas assez de jeunes.

Le succès est aussi dû aux qualités de l’animateur, bienveillant, ne donnant pas trop de règles, pour laisser les échanges s’improviser et les idées circuler entre les participants, assis sur des fauteuils confortables, en cercle, sans table ni bureaux.

Ce fut un bon moment.

Et de quoi avons-nous parlé, alors ?

L’analyste Marketing ouvre le bal avec le résultat d’une enquête qui montre que, quand on interroge les Directeurs Marketing sur leurs « top priorités » pour 2022 pour leur Département Marketing, ils répondent, en premier ( 34% des réponses) que c’est le focus sur la marque Employeur et l’expérience collaborateur. C’est l’expérience collaborateur qui fait l’expérience client ; on l’a déjà entendu avec ce que l’on a appelé la « symétrie des attentions », ce n’est pas nouveau, mais que les Départements Marketing client en fassent une priorité, voilà du grain à moudre.

Ça part un peu dans tous les sens, avec cette histoire d’expérience collaborateurs ; on parle de l’importance de l’attitude des collaborateurs dans un Groupe hôtelier, et de la difficulté d’avoir prise quand ce sont des collaborateurs des franchisés ; il faut trouver les bons leviers pour être influents sans diriger. On va évoquer le « besoin de sens » des jeunes ; Mais « le sens, ça ne veut rien dire ! » nous dit la coach. Ouch ! Et ça repart. La balle circule.

Heureusement, l’animateur est là pour réorienter et relancer les questions.

Forcément, on parle de technologies.

Le metaverse, on y est ou on n’y est pas encore. Les avis sont partagés (dans l’enquête Marketing déjà citée, « créer une stratégie pour le metaverse » vient en avant-dernier pour les Top 10 priorités).

La Blockchain, c’est une vraie révolution, cette capacité à rendre unique un actif numérique, c’est permettre d’apporter plus de confiance aux utilisateurs, en créant des infrastructures de confiance, pour stocker son identité numérique, et le reste, dans son smartphone. Fini les porte-monnaie en cuir dans nos poches (on fait le test : qui a encore un porte-monnaie en cuir dans sa poche ?).

Oui, mais la blockchain c’est aussi la consommation d’énergie pour une transaction de bitcoin qui équivaut à 1 million de transactions VISA. Ouch ! On est reparti dans la discussion.

De la technologie, on passe aux données. C’est le cœur de l’innovation client ? La loi RGPD a eu une vertu éducative pour nous rendre compte de la valeur de la donnée, et de l’enjeu de s’approprier la manière dont elle est utilisée. Pour le moment, les données sont exploitées par les opérateurs sans qu’on sache toujours très bien comment. L’un des participants nous l’a dit « Je hais Facebook, et n’y suis pas ! ».

Aujourd’hui, en termes de consommation d’énergie et d’usage des données, on n’est pas confortable (un participant nous dit « on est dans la m… »). Y-a-t-il de quoi s’inquiéter ? Oh, que non ! ; c’est dans ces moments où ça ne va pas que les innovations de rupture surgissent et relancent le jeu. A nous d’innover et d’être dans le jeu (ça me rappelle le livre de Simon Sinek, «  the infinite game »).

Mais pour innover, comment faut-il faire ? Sûrement pas en restant enfermés dans les bureaucraties des grands groupes ; mais en créant des structures libres, comme des start-up à l’intérieur des grandes entreprises, avec une structure « hyper flat », qui apprennent à échouer et à changer de projet quand ce n’est pas le bon (dans la Silicon Valley, 95% des projets échouent, donc ce chiffre de 5% de réussites est à garder en tête).

Et puis, pour garder les bons collaborateurs, on en revient au management, surtout le « management de proximité », qui fait la différence et nourrit le collaborateur qui se pose aussi des questions : Est-ce que cette entreprise, ce travail, contribue à quelque chose qui me motive dans la société ? Et est-ce que l’on m’écoute, est-ce que je compte dans cette entreprise ?

Au bout de trois heures de discussions, on arrête.

Une belle expérience, on a appris plein de choses, on a découvert de nouvelles idées et de nouvelles personnes. On repart avec une envie d’innover et de faire partie du jeu, chacun selon sa place.

Pourquoi les entreprises ne font-elles pas ça plus souvent ?

On se retrouve dans un mois ; Hâte d’y être.

Sans vicomtes, ni marquises...

 


Les histoires d’amour qui finissent...en algorithmes, en général

ReligieuseMieux connaître les clients, mieux les gérer, mieux les convaincre, c’est une vieille histoire. On appelle ça le Marketing, ou la Relation Client.

Celui qui s’y connaissait, qui excellait dans cet art, c’était historiquement le vendeur, le bon vendeur qui connait les besoins du client avant que celui-ci les exprime, grâce à son sens psychologique, son sens du commerce, et à son baratin convaincant. Et ce bon vendeur gardait bien secret tous les petits trucs du client, les petits détails personnels qui montrent qu’on le connait bien et qu’on se rappelle de lui. Cela marche encore avec la pâtissière et le boucher du quartier. Cela ressemble à une histoire d’amour. Pour les autres on est passé à autre chose : c’est l’ordinateur qui fait le boulot. Et là, ça change.

Dans les années 80, une éternité, ce fut la grande époque des bases clients, des statistiques, de la segmentation des clients. Et les années 90, tous les consultants un peu anciens s’en souviennent, furent les années des systèmes CRM. Les Rolls Royce de la relation clients s’appelaient Vantive, ou Siebel, deux entreprises qui ont totalement disparues aujourd’hui. Avec ces systèmes, la masse des clients devenaient un sujet d’analyses inépuisable et créait de nouveaux métiers comme celui de gestionnaire de la base clients, ou de data miner. Et pour mieux gérer tout ça, les cabinets de consultants multipliaient les missions de « Relation clients », devenu « capital client » pour faire encore plus riche, et installer tous ces outils merveilleux.

Et tout a de nouveau changé dans les années 2000 avec un nouvel ami, internet, et ses cousins favoris, les réseaux sociaux. Là, on n’est carrément plus dans la gentille pâtissière qui connait les péchés mignons des clients, et leurs penchants pour les religieuses au chocolat. On passe à une forme plus agressive, le mot est faible. Les analystes, se sentant des âmes de prévisionnistes, vont alors se ruer sur des données inédites : le nombre de clics, le surf d’un site à l’autre, le nombre de pages consultées, l’achat en ligne, les cookies, l’adresse email, et les images, vidéos, et textes postés sur les réseaux sociaux. Et voilà de nouveaux métiers, outils  et expertises qui apparaissent alors : l’emailing dans nos boîtes mail, le « retargeting » pour suivre et solliciter un prospect que l’on va traquer sur tous les sites qu’il va consulter (à force de voir l’aspirateur sans sac partout, il va peut-être finir par l’acheter, le bougre), mais aussi le « Web Analytics », pour suivre la performance d’une opération digitale, le « Real Time Bidding », pour proposer en temps réel les publicités adaptées à chaque internaute par un système de vente aux enchères. Avec les smartphones et l’internet mobile, la coupe est pleine, avec plein de données supplémentaires pour les experts du e-marketing (bienvenu au club !).

Doucement, mais sûrement, nous voilà entrés dans une nouvelle phase, on est en plein dedans : les mégadonnées (le Big Data pour les fanas des mots en anglais). Car il faut maintenant réfléchir à la meilleure manière de recueillir, stocker et analyser ces masses de données hétérogènes et non structurées, avec des images, des vidéos et des textes. D’où les nouveaux dispositifs de Big Data qui se sont développés, les orfèvres étant bien sûr Google et Facebook. L’excellence, c’est d’être capable de traiter les plus gros volumes possibles, mais aussi très vite. D’où les architectures complexes pour stocker les données sur le Cloud. Et le fin du fin est alors l’introduction d’algorithmes et d’Intelligence Artificielle, pour faire faire à la machine toutes les prévisions et traquer encore mieux, sans intervention humaine (ce n’est plus de l’amour, c’est de la rage). On appelle ça le marketing de l’attractivité. C’est le cas des services de vidéos par abonnement, où l’algorithme détermine les titres à proposer pour lesquels l’abonné sera le plus appétant. Et ce marketing de l’attractivité va aussi permettre de proposer des offres personnalisées à chacun. De quoi donner un gros coup de vieux aux CRM d’hier. Tout est à revoir. Les propositions vont se faire en push (tu as aimé le film A, tu devrais aimer le film B), mais aussi en pull, en réagissant à une action du client sur le site internet. Caractéristique de la tendance : la baisse du prix, et la disparition de pas mal de métiers et experts du marketing d’hier. L’Intelligence Artificielle a fait naître l’ultra-personnalisation de la relation client.

Les rois de la publicité s’en sont déjà aperçus et bougent à toute vitesse dans ce que Le Monde appelait hier « le troisième âge de la publicité » : Publicis a annoncé cette semaine l’acquisition du spécialiste américain de l’analyse des données de comportement des consommateurs, Epsilon, pour 4 milliards de dollars. Le XXème siècle était celui des réclames, des affiches, des spots radios et télés, avec des agences de plus en plus grosses et puissantes, concevant des campagnes mondiales ; Publicis en était un des rois. Cela a failli continuer pour lui avec l’acquisition envisagée de son principal concurrent américain, Omnicom, en 2013. Heureusement que ça a raté, car tout s’est retourné depuis, et c’est avec Epsilon que le meilleur mariage se fait (encore une histoire d’amour). Il ne s’agit plus de faire de la publicité sur le web, mais de changer complètement de modèle. On ne vend plus la même voiture à la masse, mais chaque voiture à un individu. Les Google et Facebook parlent directement aux clients en fonction de leurs comportements, et les champions de l’algorithme, comme Accenture, fournissent les traitements en amont. Publicis va avoir à trouver sa place dans ce nouveau jeu.

Et pour remplacer le petit sourire de ma pâtissière qui connaît mes péchés mignons, maintenant on a « Bibi ».

Vous ne connaissez pas « Bibi » ?

C’est le nouveau programme de fidélité de Franprix, dont parlait Les Echos lundi. On y accède par l’application smartphone de l’enseigne. « Bibi » connaît tout de nos goûts et de nos envies grâce à l’historique de nos achats mais aussi des données que nous laissons sur le web avec les cookies. Avec tout ça, Franprix envoie à chacun des offres personnalisées et des « pop up » qui s’affichent dans l’application. Si vous regardez des poussettes, Bibi vous envoie des produits pour bébé. Et si  vous n’êtes pas intéressé, l’Intelligence Artificielle va vite corriger, et Bibi ne recommencera plus. Avec Bibi, la fidélisation va loin : le simple fait d’aller dans un magasin ou un site donne droit à des points de fidélité, même si vous n’achetez rien. Il nous propose aussi des réductions et des offres ailleurs que dans les magasins Franprix, comme des places de cinéma par exemple. Franprix a même prévu d’utiliser bientôt Bibi comme moyen de paiement.

Oui, même la fidélité n’est plus ce qu’elle était. Les Echos citaient, dans le même numéro de Lundi, la création par Casino de RelevanC : cette filiale agglomère les données des 4,5 millions de porteurs de cartes de toutes les entités du Groupe ( Casino, Monoprix, Franprix, Cdiscount, Sarenza, etc.), et vend les analyses aux industriels. Elle propose ainsi un dispositif promotionnel clé en mains aux marques. La start up UntieNots, créée en 2016 par deux analystes, organise, elle, des « challenges fidélité » : ses algorithmes analysent les achats du porteur de carte, et, selon ses habitudes et goûts, va lui proposer des « deals » liés à une marque ou une gamme de produits. Le client choisit parmi ces « deals » ce qui l’intéresse. Si en un mois ou deux il achète des produits de série proposée, son compte est crédité d’un nombre d’euros en proportion. Les enseignes déterminent elles-mêmes la taille de l’enveloppe de remises, et mettent les marques à contribution. C’est le « troisième âge des politiques de fidélité », comme le titre Philippe Bertrand dans Les Echos.

Avec le troisième âge des Data, de la publicité, et de la fidélité, les histoires d’amour de ma pâtissière ont fini en algorithmes.

A moins de retourner rue du Croissant ...

 


B to Me

EmbrasserLes transformations et la nécessité de se réinventer, c’est aussi le sujet pour les entreprises dites « B to B », c’est-à-dire les entreprises qui vendent leurs produits et services à d’autres entreprises. Car derrière les B, il y aussi les « C », les clients finaux. Et avec le développement des plateformes, des communautés et des réseaux sociaux, ce client sait de mieux en mieux ce qu’il achète et ce qu’il attend.

Un exemple, celui de Sodexo, dont le Directeur Général, Denis Machuel, était interrogé dans Les Echos le 5 octobre. Pour lui il s’agit d’expliquer aux équipes que Sodexo évolue du B to B vers le B to Me.

C’est quoi ça ?

Le B to Me, c’est la tendance de fond qui fait s’organiser les consommateurs en communautés qui se fragmentent de plus en plus par la technologie et les styles de vie. Sodexo vend ses services à une cantine d’entreprise, à un hôpital, mais les clients de ces cantines et hôpitaux expriment leurs préférences variées, et donc les cantines et les hôpitaux doivent s’y adapter. Et les besoins évoluent, ce qui conduit Sodexo à se réinventer, passant d’un acteur du catering à un intégrateur de « facilities management », en proposant des services de conciergerie, de la maintenance technique, des avantages et récompenses comme les cartes cadeaux, les cartes sport, les cartes restaurant. Comme ça le client peut aller déjeuner à la cantine, mais aussi se faire livrer un repas, aller dans un restaurant affilié. Mais Sodexo propose aussi des services auxiliaires, des crèches par exemple.

Dans cette fragmentation des consommateurs, Denis Machuel anticipe aussi une évolution dans l'équilibre entre le "client pay" et le "consumer pay" : le prix payé par le consommateur final, en plus de la subvention de la cantine ou de l'hôpital, va augmenter, ce qui permettra par exemple de s'offrir un meilleur repas (avec autorisation du médecin) pour un patient à l'hôpital, à condition de payer un supplément. Même chose pour le bio dans les cantines. Cette tendance en est au début; elle va faire émerger de nouvelles idées de services innovantes. 

Un autre qui va se mettre au B to Me, c’est Saint-Gobain. Pierre-André de Chalendar, le PDG, confie au Figaro ce 20 octobre qu’il veut « transformer le Groupe en profondeur «  en mettant en place « une organisation plus tournée vers les clients », alors que le Groupe était historiquement structuré par produits. Voilà pour le B to B.

Et pour le C, c’est la Branche Distribution qui permet de développer « une connaissance très fine des besoins du client final ». Et pour bien y répondre il développe une stratégie de proximité locale, avec une clientèle de professionnels et de particuliers qui a besoin de conseils.

Cette proximité client va de pair avec un changement profond du management : Pour gagner en agilité, Pierre-André de Chalendar veut adopter un management "plus collaboratif". Cela va consister à avoir des "circuits courts" et donc "abandonner le management vertical". Cela lui semble une "nécessité si nous voulons continuer à attirer des jeunes". Reste à trouver le "comment"; Pour le moment, il évoque qu'à l'occasion du déménagement dans le nouveau Siège, que tous les bureaux seront en "open space", et il ajoute "y compris les membres du comité exécutif et moi-même". Oui, bon, on a déjà entendu ça. IL va peut-être falloir rajouter des idées et des changements d'attitudes et de responsabilités, car on n'est plus très sûrs d'attirer les jeunes avec des "open spaces"

On parle aussi , bien sûr, du digital, lorsque l'on regarde les  concurrents, tant chez Sodexo que chez Saint-Gobain. Et ces Groupes déploient aussi leur présence sur ce créneau.

Mais le B to Me, c’est plus que ça. C'est le développement, aussi, d’une stratégie de services, de contact avec des communautés de clients de plus en plus diversifiés, et de nouveaux modes de management des collaborateurs, eux aussi plus diversifiés.

Il ne s’agit donc plus de parler uniquement de « stratégie digitale », qui masque parfois un simple replâtrage de façade, mais de repenser dans tous les circuits la relation avec le client final, et de transformer le management. Les grands Groupes sont en train de s'y mettre , et cherchent à inventer et  à mettre en place des innovations dans ces domaines. Ils savent souvent "Pourquoi" (mais pas toujours), mais cherchent encore parfois le "Comment" et le "Quoi".

Il va falloir solliciter de nouvelles idées pour maintenir la compétitivité au niveau mondial. Cela va demander des approches un peu plus originales que de se contenter de parler de « transformation digitale », au risque de rester peut-être, un peu trop creux, et de rater la 4ème révolution en cours. Dans cette recherche, il ne suffira pas de faire brainstormer les membres du comité exécutif, même dans leurs "open spaces", mais de trouver les moyens de faire participer vraiment les intelligences collectives à l'intérieur et aussi à l'extérieur des murs de l'entreprise.

Les approches de transformation vont devoir se mettre aussi au B to Me, non ?


Vous y croyez encore au CRM ?

WayneLe CRM, c'est un truc formidable, surtout avec Internet : grâce à toutes les traces que laisse l'internaute  sur le web on peut tout connaître de ses désirs, de toute sa vie; on en sait plus que l'on n'en a jamais connu. Alors avec le système CRM (Customer Relationship Management) on va pouvoir lui pousser les bonnes offres, celles qui vont retenir son attention. Nous allons pouvoir utiliser les "data", forcément "Big", et les algorithmes de l' "Intelligence Artificielle" vont nous permettre d'envoyer de manière ciblée toutes les offres de produits et de services qui vont en faire succomber un maximum.

Le CRM c'est comme la Winchester de John Wayne : elle vise juste à tous les coups ! Et pour vous entraîner, les consultants et les experts en tous genres de manquent pas pour inventer tout ce qui va bien pour bien pour capturer le client...

Oui, mais ça va durer combien de temps cette histoire? Le client va-t-il rester cette proie à qui on va piquer un max d'informations à son insu, sans qu'il ne dise rien ? Pas sûr..Et l'on commence à s'en apercevoir. De plus en plus, le consommateur veut pouvoir contrôler ses choix et prendre la main. D'ailleurs tous ces outils CRM qui excitent tant les experts, ils peuvent aussi servir aux consommateurs. Et la société de l'attention (celle des entreprises qui poussent les offres à coups de CRM) cède la place à la société de l'attention, celle où s'exprime les envies des consommateurs, et où le consommateur reprend la main sur ses choix de fournisseurs et de produits, ce que l'on appelle le VRM (Vendor Relationship Management). 

C'est un professeur de Harvard, en 2012, Doc Searls, qui a popularisé ce concept, dans son livre " The intention economy" (toujours pas traduit en français).

Cette société de l'intention, c'est en fait un rééquilibrage de la relation entre le commerçant et le consommateur. Cela implique que le consommateur redevienne actif dans la relation d'achat et prenne le contrôle des données. il devient acteur libre et indépendant qui indique à ses fournisseurs potentiels ce qu'il veut et comment il le veut.

Les plateformes pour développer ces VRM existent déjà, telle Privowny, qui permet de reprendre la main sur la gestion de ses données personnelles.   

Il y a aussi OneCub, start Up française qui reprend ce modèle. Et les applications pour mieux gérer ses données personnelles de toutes sources comme CosyCloud. 

Grâce à de nouveaux intermédiaires, véritables tiers de confiance, les consommateurs posséderont leur propre centre de données personnelles qu’ils partageront ou pas et de manière sélective avec les entreprises. Ils pourront donc faire le tri entre les marques qu’ils aiment et les autres dont ils pourront mieux se protéger. Ils pourront communiquer leurs besoins aux entreprises, un peu comme un appel d'offres (RFQ Request For Proposal), et ainsi sélectionner les meilleurs.

Alors les John Wayne "experts du CRM" vous vous réveillez ou vous continuez vos trucs pourris ? 

Heureusement certaines entreprises ont déjà compris l'enjeu. Voir cet article de Sylvain Rabuel , directeur général France Europe Afrique du Club Med, à l'origine d'une reconception de la manière de penser la relation avec ses clients, dans Les Echos du 1er août. 

Il donne même des conseils pour permettre aux entreprises de s'adapter à cette nouvelle tendance.

D'abord renforcer la capacité de vraie écoute des intentions des clients potentiels. On pense aussi aux "non-clients". Et aux démarches de Design Thinking, qui sont exactement dans cette approche. Pour cela il faut sortir de la pensée par les produits et s'immerger au plus profond dans les parcours des clients et leurs modes de vie. 

Pour cela c'est l'organisation elle-même de l'entreprise qu'il faut ré-imaginer : " Cela suppose de bâtir des organisations ultra-plates pour gagner en réactivité et de plus en plus hybrides entre métiers pour accroître la pertinence des parcours créés". De quoi s'intéresser de plus près aux entreprises libérées et à la délégation des responsabilités au plus près du terrain.

Sylvain Rabuel n'utilise pas le terme de Doc Searls sur "l"économie de l'intention", mais parle de "l'économie de la considération". Le client est ainsi "un partenaire co-créateur de solutions". Il est même associé à la gouvernance de l'entreprise, en mettant en place des comités de Direction ouverts aux clients (les "Open Codir"). 

Voila un projet d'ambition, qui fait appel au respect du client et à l'engagement dans cette économie de l'intention, ou de la "considération". C'est aussi un projet de liberté. 

C'est autre chose que les trucs et astuces pour tirer sur le client à la Winchester, avec les "experts". 

Tous les John Wayne du CRM feraient bien de s'y préparer. 


Mais que font les animaux en peluches au Starbucks ?

PeluchesVous en avez entendu parlé : Tout le monde veut être "Customer Centrix"...

Mais ça n'a pas l'air si simple.

C'est pour ça que j'en parle ce mois-ci dans ma chronique sur "Envie d'Entreprendre".

J'y ai mis un coiffeur, un marchand de glaces, et des animaux en peluches.

Mais il y a aussi une tondeuse à gazon,

Et même Jules César.

Un vrai film...

Envie d'y comprendre quelque chose? Avec du customer centrix dedans...

C'est ICI que ça se passe !!!

Et restez connectés avec l'entreprise connectée (ça parle de ça aussi).


Mais où sont les idées ?

LightTrouver les bonnes idées, les trucs super génial : On fait comment? 

Et où sont-elles ces idées?

Sûrement pas dans les services de R&D ou les "Direction de l'innovation"; non, ça ne suffit pas...

Mais alors il faut aller où ?

Et il faut faire quoi ?

C'est le sujet de ma chronique du mois su "Envie d'entreprendre", ICI...

Vous y trouverez toutes les réponses, ou presque.

Il suffit d'en avoir le désir...


Le magasin est encore en vie

MagasinEn ce temps où tout le monde s'extasie devant le "Digitââââllll", où parler de révolution, c'est parler de révolution numérique, on pourrait se demander si il y a encore de l'avenir pour le commerce physique et notre bon vieux magasin. Il suffit de se promener dans Paris en ce moment pour se convaincre que le magasin n'est pas encore mort. 

Même si certains reviennent de loin; comme la FNAC par exemple. Un an aprés son introduction en Bourse, c'est plutôt un succès. Et son PDG Alexandre Bompard, énarque et inspecteur des finances, aux commandes depuis 2011, peut se féliciter, pour la première fois depuis longtemps, d'une augmentation du chiffre d'affaires en France au troisième trimestre 2014. Il joue gros pour les fêtes de fin d'année, cette pèriode correspondant à 20% des ventes de l'année. 

Alors, comment s'y prend-t-il ? 

Il se confiait le mois dernier aux journalistes des Echos, et ses propos nous révèlent quelques secrets et initiatives dont on peut tirer leçon.

Pour lui, " l'avenir n'est ni dans le déclin inéluctable du commerce physique, ni dans le triomphe exclusif de l'e-commerce". Le commerce de demain sera quelque chose d'hybride quicombine du physique et du virtuel; c'est ce que l'on appelle du nouveau mot d' "omnicanal". Tout le monde en parle, y compris les banques. Ce sera le sujet d'investissement de l'année à venir, car cela nécéssite de modifier les systèmes d'information, la logistique. On commence sur internet, et on vient chercher en magasin. Où bien l'inverse : à la FNAC, on vous propose de chercher sur internet avec le vendeur le produit que l'on ne trouve pas en magasin, et de se le faire livrer chez soi. Voilà les nouvelles façons de consommer. 

Pour cela la FNAC a lancé un programme de formation des vendeurs, pour les transformer : ils doivent devenir, dixit Alexandre Bompard,  " le trait d'union entre entre nos commerces physiques et le digital". Cela passe aussi par le changement des systèmes de rémunérations variables : les vendeurs sont maintenant intéréssés aussi sur les ventes via internet, alors qu'il avaient tendance à les considérer comme des concurrents auparavant. Selon Alexandre Bompard, " aujourd'hui, 35% des ventes sur Fnac.com sont reliés d'une façon ou d'une autre au magasin". 

Forcément il est positif sur l'ouverture des magasins le dimanche (débat du moment avec la loi Macron), rappelant que " 25% des ventes d'Amazon se font le dimanche". Et il argumente avec les chiffres :

" Le bricolage et l'ameublement, qui ne subissent qu'à la marge la concurrence de l'e-commerce - 3% à peine pour le bricolage - sont autorisés à ouvrir le dimanche et pas le secteur de vente de biens culturels."

Enfin, il porte une appréciation sur la musique, qui tranche avec les idées reçues :Oui, le CD a reculé dans les ventes, mais il représente encore 75% des revenus d'achats de musique ! Et à ce jour aucune offre digitale n'a démontré qu'elle était un relais de croissance solide. Le téléchargement payant est en baisse, et la croissance du streaming est portée par des modèles financés par la publicité, ou des opérateurs de téléphonie, et ne permet pas une rémunération suffisante des acteurs de la filière.

Et puis, constat pour les fêtes: le livre est encore cette année le premier cadeau des français.

Alors, avec ces considérations, on se dit que le magasin n'est vraiment pas mort, à la fnac ou ailleurs.

Une bonne nouvelle, non?

Et c'est vrai que j'aime bien offrir des livres, pas vous?


Arrêtez de squatter mes dîners entre copains !

DinerImaginez-vous à un dîner avec des amis; on échange des blagues et des opinions; on s'amuse; et tout d'un coup, un étranger ouvre la porte, prend place à table avec vous, ouvre une malette, et s'adresse à chacun " Hey; est-ce que je peux vous vendre quelque chose ?"...

On imagine comment on va le recevoir...

C'est pourtant ce qui se passe quand les entreprises aujourd'hui essayent de se lancer dans des " stratégies digitales" sur le web et les réseaux sociaux; elles ont leur page Facebook, elles sont sur Twitter et accumulent les followers et les amis...elles payent des Marjolaine et des Kevin, jeunes filles et jeunes garçons avec de petits cerveaux, qui se prennent pour des " community managers", qui nous bassinent avec leurs betises...et finalement ne nous font rien acheter.  Toutes ces stratégies " digitales" servent-elles à quelque chose ?

En fait, pour que ça marche, il faut complètement inverser la démarche; c'est ce que nous raconte Mikolaj Jan Piskorski, professeur à Harvard,  dans un article de HBR de Novembre ( il va aussi sortir bientôt un livre sur le sujet). Les stratégies ne doivent pas être " digitales", mais " sociales", c'est à dire apporter une réelle valeur aux membres des communautés, tout en procurant un avantage concret à l'entreprise ( qui est, soit une réduction de ses coûts, soit un accroissement de la volonté de payer du consommateur). Ce que doit faire l'entreprise, c'est, non pas s'installer avec ses trucs à vendre dans les communautés, mais être l'instigateur, l'influenceur, de surcroît de valeur pour les membres de ces communautés.

Dans ces communautés des réseaux sociaux, de Facebook à LinkedIn, ce que recherchent les membres, c'est soit rencontrer des nouvelles personnes, soit appronfondir la relation et les échanges avec des amis, ou connaissances.

D'où les quatre stratégies que Mikolaj Jan Piskorski identifie ( que l'on peut représenter dans une belle matrice carrée), avec un axe pour " l'impact social" et un axe pour le " bénéfice stratégique" :

- Réduire les coûts en permettant aux personnes de se rencontrer,

- Réduire les coûts en aidant les personnes à appronfondir leurs relations,

- Accroître la volonté de payer ( et donc les revenus) en permettant aux personnes de se rencontrer,

- Accroître la volonté de payer ( et donc augmenter les revenus) en aidant les personnes à approfondir leurs relations.

Exemple de la première stratégie ( réduire les coûts en permettant aux personnes de se rencontrer) : Yelp, un site où l'on peut donner des avis sur des lieux, comme des restaurants; c'est ce contenu qui donne de la valeur au site, et attire ainsi les visiteurs, et les annonceurs pour la publicité, qui finance le site. Les contributeurs sont appelés les " Yelpers", et les plus passionnées d'entre eux, ceux qui donnent le plus d'avis, sont invités à rejoindre une sorte de club d'élite, avec des invitations à des évènements particuliers; tout ça à condition qu'ils continuent à produire des avis en grand nombre, car l'adhésion au club est renouvelée chaque année; donc il ne faut pas s'arrêter. Résultat : Yelp estime obtenir ainsi, gratuitement, environ 25% d'avis en plus; tout en permettant aux personnes " élites" de rencontrer de nouvelles personnes.

Exemple de la deuxième stratégie ( réduire les coûts en permettant aux personnes de renforcer leurs relations) : Zynga, cette entreprise de de trois ans d'existence est celle qui commercialise des jeux sur Facebook comme CityVille ou FarmVille; ça a déjà attiré plus de 250 millions de joueurs ! Pour jouer dans les versions les plus avancées, il faut acheter des ressources en ligne à Zynga; ces achats constituent la source principale de revenus de l'entreprise. Il est possible de publier son statut de joueur sur son profil Facebook, et d'inviter des amis à participer. Ceci permet aussi de reprendre contact avec des anciens amis, à qui on n'a pas donné de nouvelles depuis longtemps, grâce à ces échanges provoqués par le jeu. Selon Piskorski, ces mécanismes sociaux ont réduit le coût d'acquisition des clients et augmenté le taux de rétention d'au moins 50% ! Ainsi cette stratégie a augmenté l'acqusition et la rétention des clients ( et donc réduit les coûts) en permettant aux personnes de se reconnecter avec des amis.

Lire la suite "Arrêtez de squatter mes dîners entre copains !" »


Prendre le métro pour écouter

MetroCette semaine j'ai rencontré un dirigeant d'une entreprise de plus de 4 milliards d'euros de chiffre d'affaires qui prend le métro pour venir à son bureau tous les jours.

N'en déduisez pas qu'il suffit de prendre de le métro pour amener votre entreprise à 4 milliards d'euros de chiffre d'affaires....

Mais, nous avons parlé d'écoute, de proximité clients, de performance et de développement.

Tout - ou presque - est dans ma chronique du mois sur " Envie d'entreprendre".

Allez-y voir directement ( pas besoin de prendre le métro).


Marketing et service client : marions les !

Smile

Les médias sociaux sont en explosion, on commence à le savoir. Selon une étude eMarketer, citée par Le Monde hier, plus de la moitié des internautes américains se connectent régulièrement sur Facebook, soit quand même quelque 132,5 millions de personnes.

Et cela ne concerne plus seulement les jeunes (la génération Y), non. Selon Médiamétrie, 6,5% des plus de 65 ans en France (soit 700 000 personnes) avaient un compte Facebook en décembre 2010; cette proportion a doublé en un an. Aux Etats-Unis, ce sont 4% des plus de 74 ans qui étaient membres d'un réseau social en 2008; cette proportion a quadruplé en 2010 (Le Monde d'aujourd'hui).

Alors, forcément, ça intéresse les entreprises qui cherchent à mieux s'en servir pour conquérir et fidéliser les clients.

Surtout que, dans ces réseaux sociaux, une petite quantité de personnes suffit pour faire le maximum de bruit. L'institut Forrester vient de publier une étude intéressante sur le sujet, par Josh Bernoff et Ted Schadler, "Empowered".

Cette étude, au travers de sondages, a repéré que, parmi les usagers des réseaux sociaux (aux Etats Unis), 80% des "impressions" (c'est à dire les commentaires, post sur facebook, twitt) ne proviennent que de 6,3% des personnes connectées.Ce sont les mass connectors, ceux qui ont plein d'amis sur facebook, plein de followers sur twitter, etc...Dès qu'ils parlent, tout le monde les entend, et les suit.

Autre catégorie, les mass mavens; ce sont ceux qui sont experts, référents, sur un domaine (le vin chilien, les voitures, le management,..), ils postent sur les blogs, ils ont des blogs spécialisés...80% des posts à propos de produits ou services proviennent de 13,8% des connectés. Ces mass mavens, 176 millions de personnes, génèrent chaque année près de 1,31 milliards de posts, commentaires de post, sur les blogs, les forums...rien qu'aux Etats Unis.

Alors, forcément ça donne des idées : si mon entreprise, mes produits, mes services, étaient connus et encensés par ces mass connectors et ces mass mavens, c'est clair que je ferais un carton, mieux que de faire de la pub, non ?

Reste à savoir comment toucher et combler ces oiseaux rares, mais influents.

C'est tou le sujet de cette étude Forrester, passionnante, qu'il est urgent de connaître avant que nos concurrents ne s'y mettent.

Une des recommandations concerne notamment le service client.

Le service client, dans les entreprises, c'était, il n'y a encore pas si longtemps, l'endroit où l'on recevait les plaintes et réclamations. Pour l'optimiser, on a cherché à en réduire le coût au maximum : on outsource, on fait des scripts, de la productivité; le but est de régler le problème du client le plus vite possible, avec le moins d'énergie possible.Les sites internet, les automatismes ("pour vous plaindre, faites le 1, pour pleurer faites le 2,...); on a tout fait. Le service client, c'est le comptoir des emmerdeurs.

Par contre, pour les gentillesses, on avait nos services "marketing"; le marketing, ça consiste à propager des idées et informations sur nos produits et services auprès de tellement de monde que cela finit par en transformer une partie en clients. Là encore, on a fait de la productivité dans nos services marketing : si on pouvait inventer le produit et le message qui convient à tout le monde, on était content. Une bonne pub avant le 20 heures, et vlan, les clients affluent.

Tout ça, c'est en train de se terminer. Car les mass connectors et mass mavens viennent mettre la pagaille : quand ils râlent sur le produit, ils font plus de bruit que les services marketing gentils; ils en parlent à leurs amis; et à peine 6% des connectés vont ruiner les campagnes du 20 heures.

Et ce bruit, il se fait surtout aprés l'achat et la consommation : Dès qu'un client a consommé le service et l'a beaucoup apprécié, surtout si il est mass connector, il va en parler, encore et encore.

C'est donc celui-ci qu'il faut toucher et influencer.

Le service client se transforme donc en service marketing : il ne s'agit plus de faire le comptoir des râleurs, mais d'aller chercher les clients heureux et fans, pour les aider et les inciter à rejoindre les mass connectors, à propager les bonnes ondes sur notre entreprise.

Et, pour les mécontents, il faut aller les chercher sur les forums, sur les blogs, sur facebook, pour écouter, répondre, corriger. Car si le service n'a pas donné satisfaction, et qu'on ne fait rien, cela va  propager à toute allure des impressions qu'il sera de plus en plus difficile de faire changer.

Car, à la base d'une bonne utilisation des réseaux sociaux par l'entreprise, il y a la remise en cause permanente, et la recherche de l'exellence dans le produit et le service.

Des ponts sont à créer entre le service clients et le marketing pour s'adapter à cette nouvelle donne. De nouveaux métiers apparaissent; animer les forums, identifier les communautés, les influenceurs, ça ne se fait pas tout seul.

Cela concerne les clients, mais aussi les collaborateurs, qui sont en contact, directement ou indirectement, avec ces clients.

Car dans ce monde en développement des réseaux sociaux, les clients ont, plus que jamais, le pouvoir; ils savent mieux et plus vite que les collaborateurs ce qui marche et ce qui ne marche pas; ils connaissent les failles des produits; on ne leur raconte pas d'histoires (même les vendeurs doivent se méfier).

Pas obligé de marier le marketing et le service client pour réussir ces changements; l'étude Forrester cite de nombreux exemples de modèles d'organisation trés divers dans plusieurs entreprises.

Mais on retiendra qu'un flirt trés poussé est quand même recommandé.