Pourquoi je n'arrive pas à vendre plus ?

FruitsC’est une histoire, un témoignage, que l’on entend souvent.

Vous avez créé un produit, vous pensez qu’il est formidable, il y a déjà quelques clients. C’est le début de l’aventure de start-up.

Mais voilà, pour trouver les clients suivants, on se heurte à « Mais vous êtes trop fragiles, revenez quand vous aurez trois ans d’ancienneté, et plusieurs clients », « je ne peux pas vous acheter votre produit, car je ne veux pas que mon entreprise représente 80% de votre chiffre d’affaires », « j’ai déjà un produit qui fait un peu la même chose, et ça me suffit, le vôtre n’est pas nécessaire pour moi, il est trop bien en fait », « Montrez-moi comment les autres qui me ressemblent l’utilisent, et je vous dirai ; Ah, vous n’avez pas d’exemples dans mon domaine, j’hésite alors, revenez plus tard quand vous l’aurez »…

 Pourtant vous avez fait un business plan du tonnerre ; vous avez estimé le marché mondial à plusieurs milliards d’euros, et en imaginant que vous alliez en prendre 0,5%, vous avez déjà imaginé un chiffre d’affaires de vainqueur. Malheureusement, avec vos trois petits clients, pour le moment, vous n’y êtes pas. Ça bloque.

Ce que vous connaissez à ce moment, c’est ce fameux « chasm » théorisé par Geoffrey A ; Moore dans son ouvrage de référence, «Crossing the chasm », dont j’ai du conseillé la lecture de nombreuses fois à des entrepreneurs comme vous. Il a beau dater de plus de vingt ans, il reste très valable, et utile, aujourd’hui.

J’avais déjà évoqué ICI cette thèse. Car, à partir du moment où la start-up a acquis quelques clients, il lui faut changer complètement de stratégie pour conquérir le gros du marché, ceux qui veulent des références, de l’ancienneté, de l’assurance, et c’est là qu’est le « chasm » ; il y a un saut à faire.

Le principe pour traverser ce chasm, selon Geoffrey A. Moore, c’est d’attaquer une cible la plus précise et nichée possible, ce qu’il appelle le « D-Day », en référence à l’attaque des alliés sur les côtes de Normandie le 6 juin 1944. Le pire serait de courir partout, pour vendre à n'importe qui, en tapant au hasard un maximum de clients ( faire des messages toute la journée sur Linkedin par exemple). Echec assuré, selon Geoffrey A. Moore. 

Et pour réussir ce D-Day, il faut bien choisir le point d’attaque.

Déjà, première recommandation de Geoffrey A. Moore : Oubliez ce calcul de 0,5% du marché qui vous excite. Vous parlez d’un marché qui n’existe pas ou qui est en mouvement, et vous parlez de clients très génériques, que vous ne connaissez pas. Vous n’irez nulle part.

Au contraire, pour définir le point d’attaque et donc votre stratégie de conquête, il ne s’agit pas d’analyser des segments de marché un peu vagues, mais de cibler un profil réel de client potentiel à explorer et démarcher.

Il n’y a pas de démarche complètement standard, et il est conseillé de faire appel à ce que Geoffrey A. Moore appelle « l’intuition informée ».

Et il nous donne les quatre facteurs les plus importants pour traverser le chasm avec le plus de chances.

Facteur 1 : le client cible

Y-a-t-il un acheteur économique unique, identifiable, pour votre offre, que vous pouvez atteindre par le canal de vente que vous prévoyez de mettre en place, et suffisamment solvable pour payer le prix de votre offre, et de tout ce qui va avec ? (ce que Geoffrey A. Moore appelle « the whole product « , c’est-à-dire votre offre et les équipements ou services complémentaires qui vont avec).

Facteur 2 : Une vraie raison d’acheter, et maintenant

Votre offre a été conçue pour répondre à un problème identifié. Est-ce que le problème que va résoudre votre offre a un sens économique suffisant, et urgent, pour ce client-cible ?

Si c’est un client pragmatique qui considère qu’il peut encore vivre un an ou deux, voire plus, avec ce problème, il le fera. Il restera peut-être intéressé par votre offre, en souhaitant même mieux la connaître. Vos vendeurs (ou vous-même si c’est vous le vendeur) vont alors le rencontrer de nombreuses fois, mais ils ne reviendront jamais avec un bon de commande. Ce client-cible vous dira sûrement que votre présentation est formidable et intéressante, il apprendra plein de choses, mais il n'achètera rien.

Facteur 3 : Le produit complet (« The whole product »)

Pouvez-vous apporter, avec l’aide de partenaires et d’alliés, une solution complète pour répondre à la raison profonde du client-cible pour acheter votre offre dans les trois prochains mois, vous permettant d’être complètement dans le marché d’ici la fin du prochain trimestre, et d’occuper une place dominante d’ici douze mois ?

« Crossing the chasm », c’est une course. On a besoin de problèmes de clients que nous pouvons résoudre maintenant, et vite. Si ça traîne trop, il faut changer de cible, et tout revoir.

Facteur 4 : La concurrence

Est-ce que le problème que vous adressez a déjà été traité par une autre entreprise, peut-être même une entreprise qui a, elle, déjà traversé le chasm, et qui occupe donc déjà tout ou partie de la place que vous souhaitez occuper aussi ?

Si c’est vraiment le cas, ce n’est pas un bon signe pour vous ; et si on ne peut pas lutter, il faut mieux sortir et fuir. C'est aussi le 36ème des 36 stratagèmes.

C’est pourquoi, encore une fois, il faut aller vite pour traverser le chasm. Sinon on risque de perdre à tous les coups.

Ou alors il faut faire pivoter l’offre pour reprendre l’avantage avec peut-être même, une nouvelle cible.

Geoffrey A. Moore considère que si la cible choisie obtient une mauvaise note dans un seul de ces facteurs, ce n’est pas la bonne cible. Il conseille de choisir les cibles qui obtiennent un bon score dans tous les quatre facteurs.

Ces quatre facteurs sont indispensables, mais, bien sûr, pas suffisants, pour réussir. Le livre de Geoffrey A. Moore en contient encore plein.

Vous avez une offre, un produit, une idée de start-up, un début de business, quelques clients, mais pas assez, et vous voulez aller plus vite et atteindre les clients mainstream, pour traverser le chasm ?

Relisons les quatre facteurs, encore et encore.

Avec aussi un peu d'intuition. Si c'était les livres de management qui faisaient réussir les entreprises, ça se saurait.


Quand un vicomte ne rencontre pas un autre vicomte...

Chevalier«  Quand un vicomte rencontre un autre vicomte… » ; On connaît la chanson de Maurice Chevalier : « Qu’est-ce qu’ils s’racontent ? Des histoires de vicomtes ».

Alors si on ne veut pas s’enfermer dans nos histoires de vicomtes, toujours les mêmes, il est bon de mélanger et de diversifier un peu plus nos cercles de discussions et nos rencontres.

C’est exactement l’idée d’une grande entreprise qui m’a invité à participer à un « groupe de réflexion » autour du thème de l’expérience et de la relation client. Nous étions une dizaine, une coach, un chercheur, des experts Innovation de grands groupes, un start-uper de la blockchain, un expert en I.A, un « Chief Scientific Officer », un analyste d’un institut de recherche Marketing, une « Head of B2C&CX », tous d’entreprises différentes, des femmes et des hommes, peut-être pas assez de jeunes.

Le succès est aussi dû aux qualités de l’animateur, bienveillant, ne donnant pas trop de règles, pour laisser les échanges s’improviser et les idées circuler entre les participants, assis sur des fauteuils confortables, en cercle, sans table ni bureaux.

Ce fut un bon moment.

Et de quoi avons-nous parlé, alors ?

L’analyste Marketing ouvre le bal avec le résultat d’une enquête qui montre que, quand on interroge les Directeurs Marketing sur leurs « top priorités » pour 2022 pour leur Département Marketing, ils répondent, en premier ( 34% des réponses) que c’est le focus sur la marque Employeur et l’expérience collaborateur. C’est l’expérience collaborateur qui fait l’expérience client ; on l’a déjà entendu avec ce que l’on a appelé la « symétrie des attentions », ce n’est pas nouveau, mais que les Départements Marketing client en fassent une priorité, voilà du grain à moudre.

Ça part un peu dans tous les sens, avec cette histoire d’expérience collaborateurs ; on parle de l’importance de l’attitude des collaborateurs dans un Groupe hôtelier, et de la difficulté d’avoir prise quand ce sont des collaborateurs des franchisés ; il faut trouver les bons leviers pour être influents sans diriger. On va évoquer le « besoin de sens » des jeunes ; Mais « le sens, ça ne veut rien dire ! » nous dit la coach. Ouch ! Et ça repart. La balle circule.

Heureusement, l’animateur est là pour réorienter et relancer les questions.

Forcément, on parle de technologies.

Le metaverse, on y est ou on n’y est pas encore. Les avis sont partagés (dans l’enquête Marketing déjà citée, « créer une stratégie pour le metaverse » vient en avant-dernier pour les Top 10 priorités).

La Blockchain, c’est une vraie révolution, cette capacité à rendre unique un actif numérique, c’est permettre d’apporter plus de confiance aux utilisateurs, en créant des infrastructures de confiance, pour stocker son identité numérique, et le reste, dans son smartphone. Fini les porte-monnaie en cuir dans nos poches (on fait le test : qui a encore un porte-monnaie en cuir dans sa poche ?).

Oui, mais la blockchain c’est aussi la consommation d’énergie pour une transaction de bitcoin qui équivaut à 1 million de transactions VISA. Ouch ! On est reparti dans la discussion.

De la technologie, on passe aux données. C’est le cœur de l’innovation client ? La loi RGPD a eu une vertu éducative pour nous rendre compte de la valeur de la donnée, et de l’enjeu de s’approprier la manière dont elle est utilisée. Pour le moment, les données sont exploitées par les opérateurs sans qu’on sache toujours très bien comment. L’un des participants nous l’a dit « Je hais Facebook, et n’y suis pas ! ».

Aujourd’hui, en termes de consommation d’énergie et d’usage des données, on n’est pas confortable (un participant nous dit « on est dans la m… »). Y-a-t-il de quoi s’inquiéter ? Oh, que non ! ; c’est dans ces moments où ça ne va pas que les innovations de rupture surgissent et relancent le jeu. A nous d’innover et d’être dans le jeu (ça me rappelle le livre de Simon Sinek, «  the infinite game »).

Mais pour innover, comment faut-il faire ? Sûrement pas en restant enfermés dans les bureaucraties des grands groupes ; mais en créant des structures libres, comme des start-up à l’intérieur des grandes entreprises, avec une structure « hyper flat », qui apprennent à échouer et à changer de projet quand ce n’est pas le bon (dans la Silicon Valley, 95% des projets échouent, donc ce chiffre de 5% de réussites est à garder en tête).

Et puis, pour garder les bons collaborateurs, on en revient au management, surtout le « management de proximité », qui fait la différence et nourrit le collaborateur qui se pose aussi des questions : Est-ce que cette entreprise, ce travail, contribue à quelque chose qui me motive dans la société ? Et est-ce que l’on m’écoute, est-ce que je compte dans cette entreprise ?

Au bout de trois heures de discussions, on arrête.

Une belle expérience, on a appris plein de choses, on a découvert de nouvelles idées et de nouvelles personnes. On repart avec une envie d’innover et de faire partie du jeu, chacun selon sa place.

Pourquoi les entreprises ne font-elles pas ça plus souvent ?

On se retrouve dans un mois ; Hâte d’y être.

Sans vicomtes, ni marquises...

 


Huit milliards de vendeurs qui nous aiment

VendeursDans le roman « Control », de PW. Singer et August Cole, l’un des protagonistes commercialise des données très chères qu’il a obtenu gratuitement, comme il le dit :

« Nous en savons plus sur les Américains que leur propre gouvernement. Des capteurs dans Ieurs Viz Glass (des lunettes connectées). Des capteurs dans leurs médicaments contre les brûlures d’estomac. Des implants dans leurs maisons. Des implants dans leurs reins. Des puces dans leurs chats. Des puces dans leurs puces. Le tout analysant ces données au sein d’un réseau en expansion constante et rendant compte de tout et n’importe quoi sur le cloud. Nous pouvons alors recouper et exploiter ces informations quasi infinies jusqu’à acquérir une connaissance que les gens n’imaginent pas dans leurs rêves les plus fous. Dans leurs rêves les plus dérangeants, même, des révélations sur leur profil psychologique, leur personnalité, à tel point que l’algorithme en sait davantage sur eux qu’ils n’en savent eux-mêmes. Et si nous facturons aux entreprises les fruits de cette récolte, les gens nous donnent tout cela gratuitement. Non seulement ce qu’ils font et pensent, mais les moyens de changer ce qu’ils font et pensent. Ils nous donnent le contrôle de leur vie, sans réserve, en échange d’un libre accès à des services et à des biens que nous leur faisons payer au prix fort… ».

Roman de science-fiction ?  

Oui, et non, car ces technologies et ce qu’elles permettent, ainsi que les comportements des consommateurs, cela existe déjà aujourd’hui ; le meilleur exemple est la prolifération de ces « assistants personnels » tels Alexa (Amazon) ou Google Assistant. Les analystes prévisionnistes de Juniper Research prévoient que ces assistants seront 8 milliards d’ici 2023, soit plus nombreux que la population sur Terre !

Cette prévision n'est peut-être pas totalement réaliste. Un expert que j'ai consulté m'a indiqué que l'équipement est de 35 millions aux Etats-Unis aujourd'hui, et devrait être à 200 millions en 2023.

Indépendamment du chiffre, l’étude prévoit que le développement de ces assistants personnels affectera négativement le marché des applications mobiles, car les interactions que nous avons avec les applications mobiles seront remplacées par des conversations avec les assistants vocaux, et feront donc diminuer notre temps d’écran.

Et certains y voient déjà, et le roman de PW Singer et August Cole met bien le doigt dessus, une forme de conflit d’intérêt.

En effet, est-ce que cet assistant vocal est là pour nous assister dans notre vie quotidienne, ou bien pour nous pousser à acheter, avec des méthodes très persuasives, grâce aux données collectées et achetées par les vendeurs. Hello, il fait froid aujourd’hui, que dirais-tu de t’acheter un joli pull à col roulé ; veux tu que je t’en propose quelques-uns ? Le même que tu as regardé hier sur le site de cette marque. Ou le même que Bruno le Maire dans ce tweet que tu as « liké ».

Pour l’instant, les assistants personnels sont encore utilisés pour des tâches très simples (une étude a révélé que 20% des utilisateurs faisaient usage de leur assistant vocal pour faire bouillir un œuf); mais on les utilise aussi pour consulter la météo ou écouter de la musique.

Les usages vont se multiplier avec leur développement, pour se distraire et pour acheter, un voyage, un service, une voiture. 8 milliards d’assistants personnels, ce seraient en fait 8 milliards (ou peut-être moins) de vendeurs qui vous harcèlent sans que vous vous en rendiez compte.

Alors, pour répondre à ces conflits d’intérêts, les prévisionnistes imaginent plusieurs scénarios.

On peut imaginer une auto-régulation par les entreprises comme Amazon ou Google qui décident de séparer les activités d’assistant vocal de e-commerce, en créant des filiales séparées pour ces deux activités. Ou bien au contraire la prolifération des vendeurs( ayant acheté les données des assistants vocaux) pour pousser de plus en plus d’offres de produits et services dans ces 8 milliards d’appareils à des consommateurs sous influence, sans qu’ils s’en aperçoivent.

On peut aussi croire que les régulateurs et les gouvernements vont agir. Mais la question demeure : Quand et comment ? Les premières régulations concernent la protection des enfants, avec les systèmes de contrôle parental sur certains services et streaming. Mais pour le reste, il va falloir encore inventer, et peut-être même que les consommateurs ne voudront pas être ainsi contrôlés, trop contents de pouvoir se voir proposer des tas de trucs utiles ou inutiles dont ils seront convaincus d’avoir vraiment besoin, grâce à la gentille Alexia.

Les auteurs du roman disent avoir écrit cette fiction pour nous aider à réfléchir et à affronter les enjeux de ces nouvelles technologies dans ce qu’ils appellent « la vraie vie ».

Mais peut-être demanderons-nous aussi à Alexa ou Google Assistant ce que nous devons en penser et quoi faire.


D Day

DDAYLes idées ne manquent pas, ni les apprentis entrepreneurs, pour inventer les services et produits Techs qui devraient résoudre des problèmes et même changer le monde, le monde des plateformes. Mais, on le sait, les investisseurs aussi, certains vont marcher, et d’autres vont disparaître à peine nés, faute de clients en nombre suffisant, alors même que techniquement le produit ou le service était peut-être top.

L’histoire commence souvent bien. Le produit est développé et amélioré. On décroche les premiers clients, ceux qu’on appelle les « early adopters ». Ils adorent le produit. Ce sont les mêmes qui achètent toujours ce qu’il y a de nouveau, ils aiment essayer et être en avance sur les autres.

Le problème avec ces clients, c’est qu’ils ne sont pas nombreux. La masse, ce sont plutôt les clients qui n’achètent que s’ils sont convaincus que le produit, le service, ou l’entreprise qui le propose, tient la route, et pour ça, ils regardent combien vous en avez déjà vendu. Si le nombre n’est pas suffisant, ils ne veulent pas prendre le risque et préfèrent attendre. «  Revenez me voir quand vous serez bien implanté sur le marché ».

Oui, mais le problème, c’est qu’avec ma poignée de « early adopters » sur mon carnet de commandes, je n’intéresse pas cette majorité et ils ne veulent pas de moi. Et donc je n’arrive justement pas à m’implanter sur le marché. Je suis devant un « chasm ».

C’est ce dilemme que Goeffrey A.Moore a détecté et pour lequel il a développé un modèle pour s’en sortir dans son ouvrage célèbre « Crossing the chasm ». C’est dans cet ouvrage, qui date des années 90, qu’il donne les clés pour réussir à traverser ce « chasm » et passer des « early adopters » à la majorité des clients, il les appelle les « pragmatiques », qui feront notre succès. Il reste complètement d’actualité et j’en recommande la lecture à tous les entrepreneurs et consultants qui se trouvent confrontés à ce dilemme.

Et pour comprendre son modèle, il utilise une analogie qui résume toute la démarche. Cette analogie c’est celle du « D-Day », le jour du débarquement, le 6 juin 1944.

Quelle est cette analogie ?

On peut décrire la situation comme un but à long terme qui est de prendre le contrôle d’un marché de masse (L’Europe par les armées d’Eisenhower), qui est actuellement dominé par un autre compétiteur (les armées de l’Axe et de Hitler). L’objectif est de rassembler une armée d’invasion (les Alliés). Notre but immédiat, pour entrer sur ce marché, est de partir d’une base « early market » (l’Angleterre) et d’attaquer un segment stratégique (les plages de Normandie). Entre notre base et notre point d’attaque il y a un «chasm » (la Manche). Nous allons traverser ce « chasm » aussi vite que nous le pourrons, avec une force d’invasion concentrée directement et exclusivement sur le point d’attaque (D-Day). Une fois que nous avons conquis et forcé l’adversaire en dehors de ce point d’attaque (sécurisé la tête de pont), alors nous pourrons nous déplacer pour conquérir de nouveaux segments de marché (les régions de France), jusqu’à ce que nous dominions tout le marché (la libération de l’Europe).

Pour traverser le « chasm », Geoffrey A. Moore nous conseille de suivre exactement la même stratégie.

Tout le secret de la réussite c’est bien sûr de bien choisir le point d’attaque, le segment de clients qui sera notre tête de pont, nos plages de Normandie. Et non de tenter de vendre notre service ou produit à tout le monde et n’importe qui, c’est-à-dire à tous les pragmatiques qui vous rejetteront.

C’est donc en se concentrant sur une niche ciblée, et en mettant tous les moyens dont il dispose (c’est-à-dire une surabondance de moyens au regard de la taille de la niche) que l’entrepreneur va pouvoir faire la traversée. Et il sera ainsi armé, une fois la traversée faite, pour se déployer sur les autres marchés.

Car, avec des moyens réduits, pour gagner un marché, il faut viser et se concentrer sur un segment le plus réduit possible (tout en étant quand même une base solide suffisante pour la suite).

Alors, comment choisir le bon point d’attaque ?

En premier lieu, il ne s’agit pas de chercher un marché mais un client. Ça change tout. Les marchés sont toujours une notion impersonnelle ou abstraite. Alors qu’identifier un client, un vrai, rend l’exercice plus probant.

Les techniques à utiliser pour le trouver, ce client et ses semblables, tournent autour des mêmes questions :

  • Qui est-il ? Quel est le client utilisateur ? Quel est le client qui achète ? Quel est le client technicien qui conseille l’acheteur ?
  • Un jour dans la vie du client, avant d’acheter le produit…
  • Un jour dans la vie du client, une fois acheté le produit…

Et pour encore préciser ce point d’attaque, on se pose aussi quelques questions comme :

  • Quelle est la vraie raison qui le fera acheter ? 
  • De quels autres produits ou services a-t-il besoin, en plus du nôtre, pour avoir satisfaction complète ? C'est ce qui permet de créer le réseau de partenaires pour proposer le "produit complet".
  • Où pourrait-il trouver une autre solution pour résoudre son problème ? Et comment traiter cette compétition ? 

C'est en testant ainsi les clients, les groupes de clients, les segments, que peut être identifié le scénario le plus en ligne avec notre produit ou service, et donc le meilleur point d'attaque. Pour cela, interroger et observer nos amis, nos associés, des clients, des partenaires. Oui, c'est ce que l'on appelle aujourd'hui le "design thinking" , du moins en esprit(même si Geoffrey A. Moore n'employait pas ce mot).

Le secret, c'est d'être le plus "focus" possible.

Le point d’attaque est trouvé ?

Alors, prêt pour le débarquement, et lire et relire Geoffrey A. Moore.

C’est le jour le plus long.


Les histoires d’amour qui finissent...en algorithmes, en général

ReligieuseMieux connaître les clients, mieux les gérer, mieux les convaincre, c’est une vieille histoire. On appelle ça le Marketing, ou la Relation Client.

Celui qui s’y connaissait, qui excellait dans cet art, c’était historiquement le vendeur, le bon vendeur qui connait les besoins du client avant que celui-ci les exprime, grâce à son sens psychologique, son sens du commerce, et à son baratin convaincant. Et ce bon vendeur gardait bien secret tous les petits trucs du client, les petits détails personnels qui montrent qu’on le connait bien et qu’on se rappelle de lui. Cela marche encore avec la pâtissière et le boucher du quartier. Cela ressemble à une histoire d’amour. Pour les autres on est passé à autre chose : c’est l’ordinateur qui fait le boulot. Et là, ça change.

Dans les années 80, une éternité, ce fut la grande époque des bases clients, des statistiques, de la segmentation des clients. Et les années 90, tous les consultants un peu anciens s’en souviennent, furent les années des systèmes CRM. Les Rolls Royce de la relation clients s’appelaient Vantive, ou Siebel, deux entreprises qui ont totalement disparues aujourd’hui. Avec ces systèmes, la masse des clients devenaient un sujet d’analyses inépuisable et créait de nouveaux métiers comme celui de gestionnaire de la base clients, ou de data miner. Et pour mieux gérer tout ça, les cabinets de consultants multipliaient les missions de « Relation clients », devenu « capital client » pour faire encore plus riche, et installer tous ces outils merveilleux.

Et tout a de nouveau changé dans les années 2000 avec un nouvel ami, internet, et ses cousins favoris, les réseaux sociaux. Là, on n’est carrément plus dans la gentille pâtissière qui connait les péchés mignons des clients, et leurs penchants pour les religieuses au chocolat. On passe à une forme plus agressive, le mot est faible. Les analystes, se sentant des âmes de prévisionnistes, vont alors se ruer sur des données inédites : le nombre de clics, le surf d’un site à l’autre, le nombre de pages consultées, l’achat en ligne, les cookies, l’adresse email, et les images, vidéos, et textes postés sur les réseaux sociaux. Et voilà de nouveaux métiers, outils  et expertises qui apparaissent alors : l’emailing dans nos boîtes mail, le « retargeting » pour suivre et solliciter un prospect que l’on va traquer sur tous les sites qu’il va consulter (à force de voir l’aspirateur sans sac partout, il va peut-être finir par l’acheter, le bougre), mais aussi le « Web Analytics », pour suivre la performance d’une opération digitale, le « Real Time Bidding », pour proposer en temps réel les publicités adaptées à chaque internaute par un système de vente aux enchères. Avec les smartphones et l’internet mobile, la coupe est pleine, avec plein de données supplémentaires pour les experts du e-marketing (bienvenu au club !).

Doucement, mais sûrement, nous voilà entrés dans une nouvelle phase, on est en plein dedans : les mégadonnées (le Big Data pour les fanas des mots en anglais). Car il faut maintenant réfléchir à la meilleure manière de recueillir, stocker et analyser ces masses de données hétérogènes et non structurées, avec des images, des vidéos et des textes. D’où les nouveaux dispositifs de Big Data qui se sont développés, les orfèvres étant bien sûr Google et Facebook. L’excellence, c’est d’être capable de traiter les plus gros volumes possibles, mais aussi très vite. D’où les architectures complexes pour stocker les données sur le Cloud. Et le fin du fin est alors l’introduction d’algorithmes et d’Intelligence Artificielle, pour faire faire à la machine toutes les prévisions et traquer encore mieux, sans intervention humaine (ce n’est plus de l’amour, c’est de la rage). On appelle ça le marketing de l’attractivité. C’est le cas des services de vidéos par abonnement, où l’algorithme détermine les titres à proposer pour lesquels l’abonné sera le plus appétant. Et ce marketing de l’attractivité va aussi permettre de proposer des offres personnalisées à chacun. De quoi donner un gros coup de vieux aux CRM d’hier. Tout est à revoir. Les propositions vont se faire en push (tu as aimé le film A, tu devrais aimer le film B), mais aussi en pull, en réagissant à une action du client sur le site internet. Caractéristique de la tendance : la baisse du prix, et la disparition de pas mal de métiers et experts du marketing d’hier. L’Intelligence Artificielle a fait naître l’ultra-personnalisation de la relation client.

Les rois de la publicité s’en sont déjà aperçus et bougent à toute vitesse dans ce que Le Monde appelait hier « le troisième âge de la publicité » : Publicis a annoncé cette semaine l’acquisition du spécialiste américain de l’analyse des données de comportement des consommateurs, Epsilon, pour 4 milliards de dollars. Le XXème siècle était celui des réclames, des affiches, des spots radios et télés, avec des agences de plus en plus grosses et puissantes, concevant des campagnes mondiales ; Publicis en était un des rois. Cela a failli continuer pour lui avec l’acquisition envisagée de son principal concurrent américain, Omnicom, en 2013. Heureusement que ça a raté, car tout s’est retourné depuis, et c’est avec Epsilon que le meilleur mariage se fait (encore une histoire d’amour). Il ne s’agit plus de faire de la publicité sur le web, mais de changer complètement de modèle. On ne vend plus la même voiture à la masse, mais chaque voiture à un individu. Les Google et Facebook parlent directement aux clients en fonction de leurs comportements, et les champions de l’algorithme, comme Accenture, fournissent les traitements en amont. Publicis va avoir à trouver sa place dans ce nouveau jeu.

Et pour remplacer le petit sourire de ma pâtissière qui connaît mes péchés mignons, maintenant on a « Bibi ».

Vous ne connaissez pas « Bibi » ?

C’est le nouveau programme de fidélité de Franprix, dont parlait Les Echos lundi. On y accède par l’application smartphone de l’enseigne. « Bibi » connaît tout de nos goûts et de nos envies grâce à l’historique de nos achats mais aussi des données que nous laissons sur le web avec les cookies. Avec tout ça, Franprix envoie à chacun des offres personnalisées et des « pop up » qui s’affichent dans l’application. Si vous regardez des poussettes, Bibi vous envoie des produits pour bébé. Et si  vous n’êtes pas intéressé, l’Intelligence Artificielle va vite corriger, et Bibi ne recommencera plus. Avec Bibi, la fidélisation va loin : le simple fait d’aller dans un magasin ou un site donne droit à des points de fidélité, même si vous n’achetez rien. Il nous propose aussi des réductions et des offres ailleurs que dans les magasins Franprix, comme des places de cinéma par exemple. Franprix a même prévu d’utiliser bientôt Bibi comme moyen de paiement.

Oui, même la fidélité n’est plus ce qu’elle était. Les Echos citaient, dans le même numéro de Lundi, la création par Casino de RelevanC : cette filiale agglomère les données des 4,5 millions de porteurs de cartes de toutes les entités du Groupe ( Casino, Monoprix, Franprix, Cdiscount, Sarenza, etc.), et vend les analyses aux industriels. Elle propose ainsi un dispositif promotionnel clé en mains aux marques. La start up UntieNots, créée en 2016 par deux analystes, organise, elle, des « challenges fidélité » : ses algorithmes analysent les achats du porteur de carte, et, selon ses habitudes et goûts, va lui proposer des « deals » liés à une marque ou une gamme de produits. Le client choisit parmi ces « deals » ce qui l’intéresse. Si en un mois ou deux il achète des produits de série proposée, son compte est crédité d’un nombre d’euros en proportion. Les enseignes déterminent elles-mêmes la taille de l’enveloppe de remises, et mettent les marques à contribution. C’est le « troisième âge des politiques de fidélité », comme le titre Philippe Bertrand dans Les Echos.

Avec le troisième âge des Data, de la publicité, et de la fidélité, les histoires d’amour de ma pâtissière ont fini en algorithmes.

A moins de retourner rue du Croissant ...

 


Mais que font les animaux en peluches au Starbucks ?

PeluchesVous en avez entendu parlé : Tout le monde veut être "Customer Centrix"...

Mais ça n'a pas l'air si simple.

C'est pour ça que j'en parle ce mois-ci dans ma chronique sur "Envie d'Entreprendre".

J'y ai mis un coiffeur, un marchand de glaces, et des animaux en peluches.

Mais il y a aussi une tondeuse à gazon,

Et même Jules César.

Un vrai film...

Envie d'y comprendre quelque chose? Avec du customer centrix dedans...

C'est ICI que ça se passe !!!

Et restez connectés avec l'entreprise connectée (ça parle de ça aussi).


La vache !

Vache-pourpreCe mois-ci ma chronique dans "Envie d'entreprendre" parle de remarquable, mais aussi des contaminateurs et des idées virus.

Elle dit pourquoi le pire ennemi de l'excellence n'est pas le mauvais mais le très bon....

Elle parle de vache;

oui, de Seth Godin aussi...

Et en plus elle est pourpre !

Envie d'en savoir plus : c'est ICI.

Mais ce n'est pas une vacherie;

Au contraire....

Allez-y faire MEUHHHHH


Gender confusion

Innovation123Pour innover, l'observation des signaux faibles, des changements d'habitudes, de consommation, sont des sources d'inspirations inépuisables.

Par exemple cette information reprise par Les Echos, un sondage en ligne IPSOS de 2013 : plus de la moitié des 18-24 ans s'épilent ou se rasent une partie du corps. Voilà une bonne nouvelle pour Gillette, alors que l'on constate que de plus en plus d'hommes portent la barbe. Et c'est comme ça que Gillette invente le "Gillette Body", un rasoir spécial pour raser le corps, et il y a même un gel spécial pour se livrer à l'opération.

Passons au maquillage. Dans le "cahier de tendances de l'Obs", on apprend, dans un article signé Charlène Favry,  que le maquillage, les femmes n'en veulent plus : " elles revendiquent une nouvelle authenticité, une féminité plus singulière, plus audacieuse aussi" (selon Pierre Bisseuil, directeur de recherche de l'agence Peclers Paris). Ce qui marche de mieux en mieux c'est le maquillage pour hommes. Tom Ford et Marc Jacobs lancent du maquillage spécial pour "les mâles post-métrosexuels", ceux qui ont appris à prendre soin d'eux en se laissant pousser la barbe. 

Ce marché reste une niche mais se développe de plus en plus; Selon Tom Ford, " même les rappeurs deviennent ultra-coquets !".

Cette tendance qui inspire l'innovation et de nouveaux produits, c'est la "gender confusion", un moyen "d’affirmer son identité, sa singularité, sa force, en sortant des catégorisations binaires habituelles".

Innovation en épilation et maquillage : Rayon Hommes !


Le name dropping démasqué

NamedroppingRobert Cialdini a analysé ce qu'il appelle les "mécanismes et les techniques de persuasion" dans ce best-seller " Influence et manipulation" ( The psychology of persuasion) en 1984. J'en ai parlé ICI.

En fait, ce livre se présente comme une prévention contre ces mécanismes : je me suis fait avoir; j'ai compris; je vous apprend à ne pas vous faire avoir. On peut donc le lire au premier degré (je vais utiliser ces mécanismes pour influencer les autres), comme un antidote (comment éviter de me faire avoir, en démasquant les imposteurs), ou bien en cherchant à les appliquer avec éthique ( c'est ainsi que Robert Cialdini est devenu un guru de ces techniques, appliquées avec éthique).

C'est ainsi que l'auteur fait référence au "principe d'association" et aux personnes qui se spécialisent dans l'utilisation de ce principe. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ces personnes se sont multipliées, et, à mon avis, encore plus grâce aux nouvelles technologies.

De quoi s'agit-il ?

Ce principe est simple : nous avons tendance à attribuer à un élément A une valeur, positive ou négative, liée à celle d'un élément B qui lui est associé d'une manière ou d'une autre, même si ces deux éléments n'ont au fond, rien à voir entre eux. C'est ainsi que toutes sortes de choses aimables peuvent prêter leurs qualités sympathiques aux idées, produits, personnes, qu'on leur a artificiellement associés.

On connaît le truc : une belle femme assise sur le capot d'une voiture, et la voiture nous semble sexy, plus rapide, plus performante. La publicité a bien compris ce principe d'association.

Mais Robert Cialdini nous parle aussi d'un type de personnes qui sont quasi obsédées par le désir de faire rejaillir sur soi la gloire d'autrui. On l'est tous un peu : quand l'équipe de foot a gagné un match, les supporters crient " ON a gagné !" car ils s'associent à l'équipe (et quand l'équipe a perdu on dira plutôt " ILS ont perdu"...).

Mais pour certains c'est l'obsession. 

Ce sont ces personnes qui citent à tout propos des noms célèbres, des personnes qu'elles connaissent, même si ce n'est pas totalement vrai; qui chassent les situations où elles peuvent se faire photographier à côté d'une célébrité. Des personnes comme celles-là, on en trouve plein sur Facebook. Mais aussi sur les réseaux sociaux : elles collectionnent les "amis", surtout les connus qu'elles ne connaissent pas.

Alors, Robert Cialdini, tu en penses quoi de ces personnes qui cherchent à nous influencer positivement sur leur personnalité en se gavant du principe d'association ?

" A mon avis, ce sont des individus qui, à cause d'une faille de leur personnalité, ont besoin de se valoriser. Tout au fond d'eux-mêmes, ils se sentent diminués, ce qui les conduit à gagner l'estime de leurs semblables, non en réalisant quelque chose, non en mettant en valeur leurs qualités, mais en créant ou en affirmant des liens entre eux et les réalisations d'autrui.".

Et vlan !

Une autre forme peut être de tout faire pour mettre en valeur le succès d'autres individus avec lesquels elles ont un lien bien visible ( cette femme un peu sotte qui nous explique que son mari est un homme trés intelligent par exemple, ou cette maman obsédée qui veut faire de son fils une grande vedette).

Il suffit d'y réfléchir un peu pour s'apercevoir que ce principe d'association est partout autour de nous, pratiqué par de nombreux individus...Et en plus ça marche parfois !

Toute l'ambiguïté de l'ouvrage de Robert Cialdini, c'est : il nous conseille de le faire, ou non ? Il nous donne surtout des idées pour ne pas se laisser abusivement influencer par ces personnages "qui se sentent diminués" et ont "une faille dans leur personnalité", et donc savoir leur dire NON : la solution c'est de se rendre compte de l'association et de ne pas se laisser contaminer ( cen 'est pas parce que tu le parles de toutes ces célébrités que tu es célèbre; ce n'est pas parce que tu me racontes toutes ces belles rélaisations de ta boîte que tu es, TOI, quelqu'un de compétent, ce n'est pas parce que tu as dîné avec un homme d'affaires célèbre que tu sais faire de bonnes affaires, etc...).

Mais on peut aussi y voir un conseil : mieux vaut s'asocier avec des personnes qui gagnent,et en côtoyer, que de fréquenter trop de loosers. 

Tout est affaire de mesure, forcément.


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ShareAu moment de fermer 2013 pour ouvrir 2014, on peut essayer de choisir quelque chose qui aura marqué l'année écoulée.

Un des concepts qui monte, et dont on va sûrement continuer à parler, c'est "l'économie collaborative".

Ne me dîtes-pas que vous ne voyez pas à quoi ça correspond...

Car cette histoire de collaboratif, de partage, on voit ça partout. A Paris, on est gâtés, on a "Autolib", "Vélib", on partage les autos et les vélos. On nous promet pour bientôt le "Scootlib"..

Mais on a aussi vu le co-voiturage, avec "Bla-Bla Car". Le partage de logements (Airbnb") ou juste un canapé ("Couchsurfing"), d'outils pour faire des travaux, 

Et on a aussi les lieux de "co-working", des espaces de travail mis en commun.

Il y a même eu un festival à Paris, le "Ouishare Fest", et une nouvelle session est déjà programmée pour 2014.

On y trouve de tout : achats groupés de fruits et légumes,trocs de compétences (je t'aides en compta, tu m'aides en informatique), réseaux d'entr'aide. Il y a même des systèmes de monnaies spécifiques, comme l'Eusko au pays basque, ou la luciole en Ardèche.

On pourrait se contenter d'en sourire...Aprés tout, dans nos entreprises, dans le vrai monde du "Business", ces trucs d'illuminés et de marginaux, ça ne nous concerne pas...

Pas si sûr.

Car, au-delà des expériences et comportements parfois farfelus, c'est peut-être une tendance plus importante qui est en train de se développer : celle de l'ouverture, des systèmes de consommation où l'on ne veut plus posséder (une voiture, un ordinateur, une usine, ..) mais où l'on préfère acheter l'usage, le service, et uniquement pour le moment où l'on consomme. Michelin l'a compris en proposant des contrats aux transporteurs pour leur facturer des kilomètres plutôt que des pneus (on appelle ça "l'économie de fonctionnalité").

Cela atteint aussi les Directions de l'Innovation et de la Recherche et Développement : l'"Open Innovation", c'est ouvrir aux partenaires extérieurs, à ne pas s'enfermer dans les développements purements internes, protégés par les brevets, mais au contraire à aller chercher les start-up qui vont apporter les idées et les procédés aux équipes des grands groupes, les consultants qui vont mettre en place les liens, les interfaces, les équipes Projets ouvertes, qui se mettront en place en transversal, interentreprises. 

Aussi dans l'écosystème : les freelance, les associations, les coopératives (il y en a de plus en plus dans les les créations d'entreprises). Des plate-forme d'échanges, de mise en relation, de consultation d'experts, d'échanges de ressources, se créent tous les jours.

Des communautés se mettent en place, pour partager une même vision du monde, de l'économie, de la liberté. Et créer un système d'échanges de services et de ressources.

Même dans nos entreprises, en interne, ces systèmes de partage devraient nous inspirer de nouveaux modes d'organisation. Les systèmes avec les Directions et les "baronnies", les "silos", les chefs qui font un peu trop les chefs, on sent bien que ça risque de craquer : soit on n'en voudra plus, soit ça ne marchera plus, ou les deux. Les échanges et les expérimentations entre pairs, sans passer par tous les comités de "validation" ou de "pilotage", vont se développer de plus en plus.Et on ne fera plus la différence entre les collaborateurs internes et les participants externes.

Et puis, en échangeant, en partageant, on gaspille moins, on protège la planète; ça tombe bien. Jacques Attali a même fait un rapport pour François Hollande, sur ce concept d' "économie positive".L'idée de départ, c'est de "redonner la priorité au temps long" (tiens, comme lui). On ne sait pas encore trop ce qu'il en a fait, mais bon...les citoyens et les innovateurs de nos entreprises peuvent déjà s'en inspirer.

Cette économie du partage, de l'échange, de l'usage, des communautés, de l'entr'aide...Et si elle venait bousculer les modèles établis, les positions qui ont l'air tellement solides, les modèles économiques qui prennent tout d'un coup un "coup de vieux".

Et si c'était une chance et une opportunité pour de nouvelles initiatives, dans tous les secteurs et tous les métiers...

De quoi innover en 2014, non ? On y va ?