Innovation légumière

LegumesGrâce à l'Ecole de Paris, dont j'avais déjà parlé à propos de parfum, j'ai rencontré cette semaine Alain Passart, le chef étoilé de l'Arpège.

Aprés une carrière de cuisinier et de rotisseur, spécialiste de volailles, avec trois étoiles au Michelin, Alain Passart nous a raconté comment, presque soudainement, il a ressenti une grande panne, comme une perte d'envie de continuer, et une envie de rupture, de passer à autre chose.

C'est de cette rupture qu'est née sa nouvelle aventure, celle de la passion pour les légumes, le tissu végétal.

Derrière cette rupture, une vision : celle de faire les "grands crûs" des légumes. De concevoir toute la chaîne, depuis le jardin jusqu'à l'assiette du client.

Cette vision, c'est d'abord celle d'un artiste, plus que celle d'un entrepreneur. Il n'imagine pas ouvrir des restaurants dans le monde entier, ni même ailleurs en France. Il est complètement concentré sur sa petite entreprise, 40 collaborateurs, des jardiniers, des cusiniers (une quinzaine autour de lui), le personnel de salle.

Et cette rupture, ce n'est pas de repartir de zéro; non, il nous l'a rappelé, son passé de rôtisseur, de cusinier ( celui qui maîtrise la flamme, qui sait cuire), est au coeur de ce qu'il fait avec les légumes.

Par contre, il a redécouvert les saisons; chaque légume arrive au bon moment, à la saison, directement du jardin; et on ne mélange pas une saison avec une autre. C'est la nature qui décide; c'est elle qui permet, comme dans le jazz, d'improviser.

Dans son entreprise, le personnel est trés jeune, souvent moins de 30 ans. Et le rôle d'Alain Passart, dans cette cuisine, tel qu'il le conçoit, c'est de :

" faire sortir la créativité qui est dans mes collaborateurs, et non de faire la cuisine - ils savent que je sais faire la cuisine. Je m'efface totalement".

Diriger une équipe en s'effaçant; combien de dirigeants et managers devraient s'inspirer de cet exemple.

Cet effacement, c'est aussi celui du geste. Apprendre à faire le plat en économisant ses gestes, en étant léger ( et non avoir "la main lourde").

Autre élément que l'on sent qu'il a à coeur, le dialogue : les jardiniers et les cuisiniers doivent se parler; certains jours les cuisiniers vont au jardin; d'autres jours les jardiniers viennent voir les cuisiniers.

La créativité, ça consiste en quoi ?

Pour Alain Passart , il ne faut pas solliciter la créativité, comme si l'on se disait "tiens aujourd'hui je vais créer quelque chose"; non, la créativité ellevient toute seule, il faut savoir la laisser venir; peut-être prendre des notes de temps en temps sur ce qui me traverse la tête; et travailler sur un petit nombre d'idées. Là encore, petite leçon pour les équipes d' "innovation".

Cela reseemble à de l'improvisation, car Alain Passart est persuadé que c'est la nature qui a fait l'essentiel du travail; il n'y a plus qu'à regarder le cadeau qu'apporte le jardin pour continuer; en écoutant ce que nous dit la nature.

Ce qu'il préfère retenir, ce n'est pas tel ou tel plat qui serait son "préféré", ou un légume qui serait son préféré; non, ce qu'il aime, c'est la façon de faire un plat, les gestes, la main. C'est la main qui fait le cuisinier avant tout. Et cette main, comme les légumes, n'est pas la même selon les saisons. Elle est chaude en hiver, plus légère en été. Elle ne travaille pas pareil.

Et puis cette créativité, c'est celle qui assemble les couleurs, qui ose se faire plaisir; qui prépare le mélange des légumes crus dans l'assiette avant de se lancer dans la composition.

Belle leçon d'innovation, de passion d'artiste, de management aussi.


Cela donnait envie de la communiquer dans nos entreprises, et dans notre management.


Deux pizzas, sinon rien !

2-pizzasJ'avais déjà parlé de cet obsédé. Il était obsédé par le client, et c'était, selon lui, le secret de sa réussite.

Je retrouve ce personnage ici, à propos d'une autre de ses obsessions : les deux pizzas.

Lui, c'est Jeff Bezos, le dirigeant d'Amazon.

Et c'est quoi cette histoire des deux pizzas ?

Cela concerne les équipes de projets qui travaillent sur les innovations chez amazon. La règle, c'est qu'une équipe, quel que soit le projet, doit être suffisamment petite pour pouvoir être nourrie par deux pizzas. Vue la taille des pizzas américaines, un peu différentes des nôtres, cela doit correspondre à six à dix personnes.

Cette image pour bien marquer les esprits sur les petites équipes, on en retrouve une version similaire chez Google, qui limite les équipes à trois à six personnes, et la durée des projets à six semaines maximum en général.

C'est sûr que les petites équipes ont plein d'avantages : obligation d'aller à l'essentiel, partager ce que l'on fait, se relire mutuellement, vivre ensemble les bons moments et les diffcultés. Dans des petites équipes, la polyvalence est plus importants, une nécessité, cela favorise la coopération, réduit le risque de conflits.

Il ne suffit pas de constituer de petites équipes pour garantir l'efficacité. Plus l'équipe est petite, plus on a besoin qu'elle soit constituée de membres qualifiés, avec des profil trés diversifiés.

Et puis, plus les équipes sont petites, plus on peut faire de projets.Et manger plein de pizzas...

Mais il n'est peut-être pas absolument obligatoire de ne les nourrir qu'avec des pizzas, si ?


Histoire de religieuse

Religieuse  Sur "Envie d'entreprendre" aujourd'hui, ma chronique consacrée au monde du conseil et de l'entreprenariat.

Dans une pâtisserie, on trouve toujours des religieuses en vitrine.

Et pour un consultant, c'est quoi sa religieuse ?

Mais, c'est comme les pâtissiers, ce n'est pas parce que tous les pâtissiers en proposent qu'elles sont toutes les mêmes.

Il y a les bonnes et les autres...

Bonne dégustation.


Interview gastronomique

Grandvefour Sovanny Chhun, journaliste au Nouvel Economiste, m'a appelé à plusieurs reprises cette semaine, car elle avait lu ça.

Et d'un coup je suis devenu expert sur les habitudes des cadres et dirigeants pour le déjeûner.

Elle en a fait un intéressant article dans le numéro paru hier, et consultable sur le Net ici.

C'est vrai que c'est un sujet amusant. La notion de "repas d'affaire", paraît-il, est en train de disparaître, ça fait ringard. Maintenant, pour un cadre dynamique, il est de bon ton de ne pas perdre de temps, et ce qui marche bien, ce sont les plateaux repas; il s'en sert de plus en plus..

On connaît tous ces personnes qui considèrent que passer du temps à table, c'est perdre du temps, et se font un style de se promener tous les midis avec des sandwiches à la main, ou qui mangent à toute allure, plateau repas ou salade.

Pour les rendez-vous avec clients, bien sûr, on fera des exceptions, mais là encore, pour aller vite, on va direct au plat, ou bien on ne prend pas de dessert..Un café, et hop, au boulot...

Finalement, pour un vrai gourmet, cela est un peu dommage, non ?

Et puis, avaler à toute allure le repas, sans s'accorder une vraie pause repas, ça n'est pas trés bon pour la santé.

Mais il ne faut pas non plus dramatiser. Il y a encore du monde dans les restaurants gastronomiques pour déjeûner.

Observer les dirigeants à table, c'est apprendre de nombreuses choses sur leur style de management, leurs valeurs. Cela vaut tout autant qu'un diagnostique des process et de le l'organisation. Et en plus, on joint l'utile à l'agréable.

Bon, maintenant que cet article est paru, j'attend qu'on m'appelle pour m'inviter à déjeûner.

Pour ceux qui sont intéressés, j'avoue préférer Le Grand Véfour aux plateaux repas.