Capacités dynamiques

DynamiquejpgQu'est-ce qui fait qu'une entreprise est performante? Et comment faire pour la rendre encore plus performante?

Eternelle question qui a fait, fait, et fera sûrement encore longtemps vivre les consultants, et torturera les dirigeants.

Dans les années 80, le truc c'était les forces de la compétition, les fameuses "cinq forces" de Porter ( barrières à l'entrée, menaces de substitution, pouvoir des acheteurs, pouvoir des fournisseurs, compétition entre les acteurs). Ce qui compte, c'est l'environnement dans lequel la firme évolue; pour la rendre performante, il faut analyser les cinq forces, et trouver le bon positionnement gagnant. La stratégie est une affaire de choix : où veut-on jouer pour gagner? Les maestros de cette démarche sont les firmes bien connues de "conseil en stratégie".

Dans les années 90, une autre approche s'est développée, basée, elle, sur les ressources. Ce qui rend un entreprise performante, selon cette théorie, n'est pas seulement les choix de positionnement stratégique, mais les ressources qu'elle possède et qu'elle assemble. C'est en se dotant d'une compétence qui est vraiment distinctive que la firme va gagner et être performante. D'où tous les consultants en "performance" qui ont proliféré. Avec tous les trucs sur les "best practices", les schémas d'organisation, les "process reengeneering", et ces fameux "benchmark". tout un business inépuisable : dis-moi, consultant, que dois-je faire encore, qu'est ce que je dois changer pour être encore meilleur? C'est comme la reine de Blanche-Neige devant son miroir.

Cette théorie basée sur les ressources a aussi un nom chic, qui la rend ecore plus désirable (peut-être), c'est le terme de "capacités dynamiques". Je l'ai découvert récemment, en l'entendant de la bouche d'un dirigeant qui me disait s'en inspirer beaucoup. Alors j'ai cherché à en savoir un peu plus.

Je découvre ainsi que cette histoire de "capacités dynamiques" revient trés fort, notamment quand on parle d'innovation : l'entreprise est vue comme un lieu d'apprentissage par expérience, d'acquisitions de nouvelles compétences, de transformation des compétences actuelles, qui permettent justement l'innovation. Et celles qui ont du mal à innover sont alors celles qui ont laissé vieillir leurs "capacités dynamiques" qui, de fait, ne sont plus si dynamiques que ça.

Partant de l'hypothèse qu'il y a un lien entre capacités dynamiques et avantage concurrentiel, on peut créer de belles histoires.

Prenons l'idée, pour une entreprise, de pénéter un nouveau marché, de diversifier.

L'approche par les forces de la compétition va conseiller de s'y prendre ainsi : (1) choisir son marché en fonction de son degré d'attractivité; (2) choisir une stratégie d'entrée en fonction de ce que l'on va imaginer de la stratégie des autres compétiteurs; (3) si on n'a pas les actifs nécessaires pour exécuter cette stratégie d'entrée, les acquérir, d'une façon ou d'une autre. Dans cette vision, acquérir des compétences, des modes opératoires, des ressources n'apparaît pas comme particulièrement compliqué; tout peut s'acheter, non ?

 Pour celui qui s'inspire de la thèse des "capacités dynamiques", c'est tout le contraire : les capacités que possède l'entreprise, et celles qu'elles ne possèdent pas, constituent une caractéristique forte de son identité; on n'en change pas aussi facilement que ça. La plupart des entreprises ne savent pas trés bien comment acquérir trés vite des compétences qu'elles ne possèdent pas, ou qu'elles maîtrisent mal.

Sans parler des actifs qu'il est quasiment impossible d'acquérir, par exemple une bonne réputation, ou un savoir-faire reconnu.

C'est pourquoi celui qui s'appuie sur les "capacités dynamiques" va répondre au même problème de façon complètement différente : (1) Identifier d'abord les ressources uniques de l'entreprise; (2) décider dans quels marchés ces ressources peuvent être les plus utiles et le mieux rentabilisées; (3) décider si le profit obtenu de cette nouvelle utilisation des ressources uniques sera le meilleur si (a) l'entreprise intègre elle-même ce nouveau marché; (b) l'entreprise vend le produit intermédiaire de cette utilisation à d'autres entreprises; (c) l'entreprise cède ces ressources pas complètement utilisées à d'autres entreprises.

Cette approche apporte un éclairage complètement différent aux stratégies d'intégration et de diversification. Avant de rechercher dans de nouveaux marchés où on ne connaît rien la solution aux problèmes rencontrés dans les marchés couverts actuellement par l'entreprise, et en déclin, l'approche par les "capacités dynamiques" oblige à d'abord se poser la question de ce que l'on est capable de faire avec nos actifs actuels.

Et surtout, elle permet de prendre conscience que l'acquisition et l'entretien du bon portefeuille de compétences et de ressources est clé pour assurer ce futur : comment l'entreprise apprend-t-elle? Comment développe-t-elle les talents? Quels sont ses actifs immatériels et invisibles les plus précieux?

Autre capacité à développer : la capacité à coordonner et redéployer, à assembler différemment, des compétences internes et externes, dans un environnement qui change tout le temps ( c'est pour ça précisément que l'on dit que ces capacités sont dynamiques !).

Cela vaut pour les entreprises, mais aussi pour les individus : se poser la question de ses propres capacités dynamiques, c'est aussi une façon de mieux savoir où sont nos chances de réussite.

Bonne introspection, souvent négligée, pour ceux, que je rencontre parfois, qui cherchent à tout prix à "monter une boîte", le nez collé sur les business plans et les études de marché, sans être aller regarder quelle lumière intèrieure ils allaient mobiliser pour atteindre le succès. Résultat, pour les entreprises comme pour les apprentis entrepreneurs, une course mal engagée.

C'est pourquoi apprendre comment intégrer, construire et reconfigurer des compétences externes et internes pour s'adapter trés vite à un environnement changeant est clé pour être- soi-même ou l'entreprise - innovants.

 


Le trio infernal

Confiance" Vous connaissez le trio infernal qui conduit les entreprises dans le mur, et en font perdre le contrôle ?"..." Ce sont les process, les indicateurs de performance ( les fameux KPI's), et les reportings".

Qui parle ainsi ?

François Dupuy, sociologue et auteur de " Lost in management - La vie quotidienne des entreprises du XXIème siècle", avec qui j'ai déjeuné cette semaine.

Avrc un sens de l'humour un rien british, et des expressions paradoxales, voilà le genre de personne avec qui on passe un bon moment. Son livre est à l'image du personnage et je vous en conseille la consommation.

François Dupuy se présente comme un sociologue, spécialiste de la sociologie des organisations, dans la ligne de Michel Crozier, dont il a été l'élève et l'admirateur. Crozier et son fameux ouvrage " Le phénomène bureaucratique", paru....en 1954.

En sociologue des organisations, François Dupuy considère que les entreprises ont perdu le contrôle d'elles-mêmes, surtout celles qu'on appelle les grandes entreprises, les multinationales. Elles ont souvent détruit la confiance qui a assuré le succés initial de la plupart d'entre elles ( basée sur un entrepreneur créateur ou une grande figure du management),

" Dès lors qu'elles souhaitent substituer à l'initiative, à la bonne volonté ou au sérieux de leurs salariés des processus et des contrôles renforcés, elles font passer un message clair de défiance et tout le monde le comprend ainsi".

Pris dans ces systèmes de contrôles inéfficaces, les salariés, surtout ceux en contact avec le client ou le produit, ont appris à se créer des zones de confort et de liberté qui leur permettent de faire ce qu'ils veulent. Et la structure ou l'organisation de l'entreprise n'y peut rien, car ce qui compte, ce n'est pas pas la structure, mais la façon dont les gens travaillent, les modes de fonctionnement. Et plus il y a de ces contrôles et de ces KPI's, plus les cadres en profitent pour se créer des zones de liberté.

C'est ce que François Dupuy appelle des " bérézinas du management", dans lesquelles les entreprises se dirigent, poussées par le couple infernal des " bureaucrates qui en salivent à l'avance et des responsables qui veulent se couvrir, tant ils contrôlent de moins en moins ce qui se passe chez eux".

Prenez ces structures dites " matricielles", bonheur des consultants et de l'organisation des entreprises des années 90; et ces larmes de crocodiles de ceux qui disent " je n'y arrive pas, j'ai deux chefs" : François Dupuy leur répond souvent que ce qu'il leur faudrait, c'est trois chefs; car ce sont les mêmes qui ont précisément appris à vivre dans une formidable zone de liberté avec ses deux chefs, sur lesquels on peut renvoyer tous les problèmes, et dont on se protège.

Autre élément protecteur du travail, les fameuses formes tayloriennes du travail : ceux qui ont critiqué les formes tayloriennes du travail ne sont pas les travailleurs concernés, mais plutôt les des personnes extérieures, et intellectuelles. Car, pour les acteurs directement concernés, la forme taylorienne du travail est, là encore, trés protectrice du travail.

Ce manque de confiance, cette défiance, d'où viennent-ils ? Pour François Dupuy, le sujet, c'est " l'incertitude" :

" Nous ne nous fions pas aux autres , quand nous ne savons pas ce qu'ils feront si tel ou tel évènement se produit ou si nous leur communiquons une information importante. ils sont donc "incertains", pour nous et leurs comportements sont imprévisibles. Et cette imprévisibilité n'est pas le fait d'acteurs erratiques qui réagiraient au hasard et au gré des évènements. Elle est de nature "stratégique" car elle nous prive de la possibilité de savoir ce qui est important pour les autres, donc d'apprécier le pouvoir que l'on pourrait avoir sur eux".

En clair, plus l'acteur est incertain, plus il a de pouvoir, et moins on peut lui faire confiance.

Pour s'en sortir, il ne s'agit surtout pas de renforcer les procédures de contrôle, source de défiance, mais de rétablir la confiance, en réduisant l'incertitude des comportements. La solution, pour françois Dupuy, ce n'est pas le contrôle, mais l'éthique : être éthique c'est précisément accepter de réduire l'incertitude de son comportement, en acceptant et en respectant des " règles du jeu" acceptées par tous.Celles qui fixent ce qui est acceptable, et ce qui ne l'est pas, dans les relations et les comportements. Quand ils sont incarnés, ces comportements, ce sont les collaborateurs entre eux, selon une forme de "contrôle social", qui se chargent de les faire respecter dans les communautés qui interagissent pour faire fonctionner l'entreprise.

Car ce sont précisément cette éthique et ces règles du jeu qui vont garantir à celui qui se "découvre", qui accepte de rendre aux autres ses comportements plus prévisibles, qu'il existe des limites à l'usage que les autres peuvent faire de cette ouverture.

Devant ce diagnostic de sociologue, plutôt sévère, j'ai quand même demandé à François Dupuy si il était quand même optimiste pour les entreprises : il l'est, car il trouve que les entreprises ont en elles une formidable capacité d'adaptation, et que, quand il faudra détricoter les process et systèmes de contrôle qui ont amené l'entreprise dans le mur, ceux qui en seront le plus capables seront précisément ceux qui les ont mis en place, c'est à dire les managers et surtout les consultants. Il est convaincu qu'un nouveau marché s'ouvre, qui promet d'être passionnant, pour les consultants du XXIème siècle qui auront compris le virage.

Alors, soyons prêts à entrer dans le monde de l'éthique et de la confiance pour inventer et rendre réelles les entreprises du XXIème siècle qui auront envie, ou devront, se libérer du trio infernal.

Cela donnait de l'espoir.

Merci, François!


Ecouter Moscou

Moscou_9L'écoute : nécessaire pour bien comprendre, pour bien répondre.

L'écoute, c'est le premier commandement : " Ecoute, Israël...tu aimeras...".

Ce n'est pas si facile car, lorsque que l'on se tait pour écouter, ce que l'on entend d'abord, ce n'est pas le silence, c'est le bruit de nos pensées, de nos représentations, des concepts que nous nous sommes forgés, de tous les stéréotypes que nous avons accumulés.

Et pourtant, celui qui n'écoute pas a du mal à progresser. Pour un consultant,l'écoute, c'est même une condition de survie dans la compétiton pour les clients.

Alors, cette année, pour le séminaire de PMP, qui vient de s'achever, nous sommes allés mettre à l'épreuve notre écoute à Moscou.

J'ai déjà évoqué ce séminaire annuel, point d'orgue et fierté de notre communauté de consultants, notamment l'année dernière à Bilbao. Ce sont des séminaires " expérienciels", où le lieu que nous visitons nous inspire pour réfléchir à nous, à notre performance individuelle et collective, à notre développement, notre stratégie, aux valeurs de notre entreprise, et au service pour nos clients.

Nous sommes tous partis avec nos stéréotypes sur Moscou, et avons pris le temps, dès le début de les échanger et de les écrire. Et ensuite, c'est parti pour la découverte.

Forcément en partant à Moscou, on a en tête la vodka, l'alcoolisme, la corruption, la brutalité des Russes, etc.. Rien de toujours vraiment bienveillant; même si on a aussi parlé de romantisme, de musique, de littérature, mais c'était il y a longtemps, au XIXème siècle.

Pour se confronter à Moscou, nous sommes allés à la rencontre de la religion orthodoxe, grâce aux églises moscovites, aux icônes, dont la plus belle collection au Monde est visible à la galerie Tretiakov, avec notamment celle de la Trinité écrite par Andreï Roublev ( qui date d'environ 1410), car on ne peint pas une icône, on écrit une icône.

La religion orthodoxe, c'est aussi celle des hésychastes et des pères du désert, ces moines qui se retirent dans le silence et la conscience de Soi, pour y rencontrer la Prière inérieure et perpétuelle. Cette concentration, ce recentrage, le rôle du silence et de l'Ecoute, sont aussi source d'inspiration.

" Tous les exercices du moine le conduisent vers un plus profond silence : silence des lèvres, silence de l'esprit, silence du coeur. Chacun de ces silences demande une maîtrise particulière. Le silence des lèvres dépend de notre volonté, le silence de l'esprit dépend de notre attention dans la prière, le silence du coeur est un don de la grâce". ( Jean-Yves Leloup - Paroles du mont Athos).

Et pour nous préparer, nous avons lu les " Récits d'un pélerin russe", ce petit livre, dont l'auteur est resté anonyme, qui constitue l'un des plus beaux textes spirituels de l'orthodoxie russe. Ces récits sont aussi un témoignage sur ce " besoin de repartir sans cesse à la recherche de ce qu'il est impossible de trouver" ( Dominique Fernandez - Russies). Et la compréhension de cette attitude russe est aussi une inspiration pour mieux comprendre les secrets de l' " âme russe" peut-être.

Nous nous sommes aussi plongés dans la musique, en visitant le conservatoire de musique Tchaikovski, qui a eu comme professeur le grand Tchaikovski, mais aussi Rachmaninov; et qui ne compte plus ses élèves qui sont devenus des stars mondialement reconnues ( Sviatoslav Richter, Yuri Bashmet,...).

Danse aussi, avec une représentation du " Lac des cygnes" par la troupe du BolshoÎ, la perfection technique, et l'enchantement des sens. On commençait à aimer Moscou...

Moscou, aussi, pour l'histoire et le pouvoir : le Kremlin, qui nous rappelle l'Empire Russe ( et comment ne pas s'interroger sur ce qui fait un Empire, et comment il se développe; y compris dans le monde des affaires et de la compétition entre les entreprises - et pourquoi pas sur l'Empire de PMP ?).

Et enfin, Moscou, dans sa vie contemporaine, en rencontrant une Manager russe d'une entreprise de technologie, un dirigeant de la chambre de commerce franco-russe, et un dirigeant local franco-russe d'un Groupe international.Tous, ils aiment Moscou, ils croient en sa réussite pour demain,

En parlant d'amour, on écoutait mieux...

Oui bien sûr, tout n'est pas complètement parfait.Ils nous font sentir les paradoxes, les contrastes, de Moscou aujourd'hui. On sentait aussi cette liberté de parole, cette capacité à voir les problèmes et les difficultés en face, mais sans se décourager.Les Russes ont l'air froid, et sont aussi trés chaleureux.

Des difficultés, mais aussi des richesses, des qualités humaines : pour entendre Moscou, il nous fallait lutter à tout moment contre ces stéréotypes que nous avions emportés : oui, Moscou, c'est pas Shanghaï; ce n'est pas non plus la ville qui attire comme New-York, oui, les rues ont l'air grises. Les bâtiments sovétiques côtoient les églises aux couleurs chatoyantes. On sent la ville en transition.

Alors, pour trouver ce " silence du coeur", éviter de laisser nos " stéréotypes" nous rendre sourds, il fallait faire cet effort; Effort qui est nécessaire dans de nombreuses situations que nous rencontrons par ailleurs. Nous avions d'ailleurs aussi écrit au début de ce séminaire les " stéréotypes de PMP"...

En écoutant Moscou, nous pouvions retoruver la posture de l'hésychaste :

" Tendre l'oreille, et parfois résister au désir d'entendre quelque chose, jusqu'à ce que le silence creuse en nous un plus haut désir. Comprendre alors que celui qui nous parle ne nous dira jamais un mot..." ( Ecrits sur l'hésychasme - Jean-Yves Leloup).

Espérons que nous sommes revenus de ce séminaire avec un peu moins de stéréotypes, plus d'écoute et de bienveillance; et pour certains l'envie de revenir pour poursuivre.

" Ecouter nous tait de toutes parts et dans ce silence nous saisissons à quel point l'Autre est tout Autre et à quel point il existe" ( Ecrits sur l'hésychasme - Jean-Yves Leloup).

On pense aussi au Petit Prince de Saint-Exupery, qui nous rappelait que " on ne voit bien qu'avec le coeur".

Car voir demande autant d'attention que d'écouter. Notre regard, lui aussi, est souvent chargé de mémoire, de jugements, de comparaisons. Là encore l'hésychaste nous aide à " purifier notre regard" :

" Cesser de mettre des étiquettes.

Passer de l'observation à la contemplation, tel est le mouvement de la prière des yeux.

Saisir tout ce qu'il y a d'invisible dans ce que l'on voit.

Aller vers ce point inaccessible où se rencontrent les regards.

Voir devient vision.

Vision devient union.

Nous lui devenons semblable parce que nous le voyons tel qu'il est".

Souhaitons ce même voyage, à Moscou ou ailleurs, à tous ceux qui ont, comme nous, envie de cette écoute, la nôtre et celle des autres, et de voir bien ( avec le coeur) : c'est aussi ça la performance, non ?

NOTA : Notre voyage a été organisé avec Frédérique Doillon, entrepreneure à Moscou depuis 18 ans; elle nous a accompagné avec son coeur et son amour de Moscou et de la Russie; je vous la recommande chaleureusement..

Vous pouvez la joindre ici : [email protected]


L'entreprise idéale

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Séance de créativité chez PMP hier, avec la "machine à idées" pour imaginer l'entreprise idéale, celle pour laquelle tous les consultants, les coachs, rêvent de travailler. Une expérience dont j'avais déjà parlé ICI.

Et comment contribuer à faire émerger de telles entreprises pour nos clients.

Une façon ludique et dynamique de créer des démarches innovantes qui feront la différence.

Une communauté diversifiée, de la bonne humeur, du chocolat, ..tout ce qu'il faut .

En trois heures nous avons, avec un groupe de 10 personnes, produit 800 inspirations et près de 150 idées.

Un moment fort : la maquette en pâte à modeler de l'entrprsie idéale. Elle est colorée, elle est en réseau, on y trouve des valeurs, des spirales qui s'interpénètrent, du plaisir, une piscine d'eau de jouvence pour tout le temps se ré-inventer.

De quoi faire jaillir les idées neuves et fraîches.

Aprés tout, il n'y a pas que nos clients qui ont le droit d'utiliser cette merveilleuse machine.

Photo5 L'entreprise en forme de coeur.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Les réseaux de l'entreprise.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Etape suivante : en sortir les offres innovantes que s'arracheront tous nos clients.


Méfions-nous des consultantes en Marketing

Ciseaux  Cet été,en plein mois d'août, le dirigeant de Hewlett Packard, P, Mark Hurd, a été  sorti par le conseil d'administration.

La raison officielle, c'est une histoire de sexe..Il a dragué une consultante en marketing qui travaillait pour HP; il a utilisé les notes de frais pour lui faire des cadeaux, rien de plus officiellement; mais aux Etats-Unis, chez HP, ça s'appelle "sexual harassment" ( c'est ellle-même qui a appelé le conseil d'administration pour s'en plaindre)...En fait, il n'est pas vraiment licencié, mais autorisé à démisionner, avec un petit package pour la route de ...40 millions de dollars !

Larry Ellison, le dirigeant d'Oracle, a commenté ce licenciement en disant que c'était la pire décision prise par un conseil d'administration depuis que ces idiots du conseil d'administration d'Apple avaient licencié Steve Jobs il y a plusieurs années (et qui l'ont rappelé aprés, avec la suite que l'on connaît).

Car Mark Hurd est considéré comme quelqu'un qui a bien fait le job : pendant son passage comme CEO de HP, qui aura duré cinq ans, les profits ont triplé (pour un chiffres d'affaires qui a augmenté de 32%). C'est le roi du "cost cutting". Fermeture de sites, licenciements, il a tout fait.C'est sa spécialité.

Car, côté croissance, il a surtout fait par croissance externe; achat d'EDS en 2008 (13 milliards de dollars), de 3Com en avril dernier (2,7 milliards de dollars), et encore de Palm en juillet (1,2 milliard de dollars).

Depuis août, Mark Hurd est remplacé en interim par sa directrice financière, Cathie Lesjak, la reine du cost cutting , qui n'est pas candidate à le remplacer. Elle tien juste la boutique en attendant.

Et donc les administrateurs cherchent LE candidat.

Et, en attendant, c'est le déchaînement sur Mark Hurd.

BloombergBusinessweek a interviewé Charlie Rose, journaliste et auteur d'un livre sur l'histoire de HP (j'avais évoqué cette histoireICI).

Pour Charlie c'est clair que l'histoire du "sexual harassment", c'est bidon. La vraie raison c'est que ce Mark Hurd ne faisait pas l'affaire...Ah bon ? Et les profits alors ?

Car, nous dit-il, malgré son incroyable succès, ce type était un mauvais patron. C'est un type pas sympa, trés "corporate tough guy", invisible, qui opère dans l'ombre, "en prenant HP par la gorge", un genre de serial killer en sorte. Il a fait du bon boulot, mais personne ne l'aime. Et puis il a cassé le"HP way'". 

Et puis, pour être fiers d'HP, les collaborateurs et Wall Street ont besoin d'un dirigeant spécialiste de la croissance, du développement, qui ait une vision sur le marché des technologies, qui redonne du rêve. Et c'est pas le style de Mark Hurt.

Deux leçons pour les dirigeants que l'on peut retenir de cette histoire :

- Méfiez-vous des consultantes en Marketing,

- Si vous êtes le Roi du "cost cutting", restez quand même sympa, et n'oubliez pas de faire rêver.

Sinon, devenez amie avec Mark Hurd et ses 40 millions de dollars (surtout si vous êtes consultante en marketing)..

Bonne chance.


Plans d'action, d'action, d'action....

Coule Une rencontre, cette semaine, qui m'a marqué.

C'est le Directeur Europe d'une Division d'un grand groupe industriel. Il est en plein marasme, comme beaucoup d'autres à la même place que lui, dans des Divisions de grands Groupes industriels du même genre : l'activité a baissé vertigineusement en 2009, de 20 à 40% selon les pays et les segments de produits. Il a préparé le Barco, il pilote tout depuis son ordinateur. Il me montre la courbe à l'écran, ça ressemble à une piste de ski de Vancouver...C'est en bleu, en rouge, en noir, il y a des chiffres autour, en-dessous, au-dessus; et derrière ces  chiffres, il y a des emplois qui sautent, des managers qui se font sortir.

Quel âge a-t-il, lui ? un âge suffisamment mûr pour être sur la sellette quand les résultats ne sont pas là. Je le sens anxieux, en sur-activité, on pourrait dire stressé. il me reçoit en retard, aprés m'avoir fait attendre dans le couloir environ un quart d'heure; il parle dans son bureau; j'attend.

Il vient de faire un "road show", comme il me le dit. Cela a consisté à rencontrer les cadres dans toute l'Europe, avec ces courbes noires et rouges sous le bras, dans la clé USB, et les Powerpoint qui expliquent bien tout. C'est impressionnant.

Il  est en chemise, plutôt agité, on dirait qu'il a chaud (au propre et, je pense, au figuré). Il agite sa jambe droite, un peu comme lui (lui, c'était la jambe gauche), il me fait penser à lui d'ailleurs.Il s'agite beaucoup, tout est rapide. Il connait tous les chiffres, tous les détails par coeur; le discours est nickel; Regardez, j'ai tout prévu, j'ai compris; et en même temps je sens comme une angoisse. C'est physique.

Puis il me présente les "plans d'actions" : il y en a  partout; plein de couleurs, des noms anglais, ça s'appelle "Fast ". L'idée, on le comprend vite, c'est de redresser la barre; mais au fur et à mesure que le chiffre d'affaires s'effondre, même en réduisant les coûts de plusieurs millions d'euros, on reste en pertes. Et le budget 2010 est en pertes. Alors le programme "Fast ", avec des économies ici, des réductions là, on se retrouve à l'équilibre. Il me débite ces slides à toute allure, moi aussi je fais partie du "road show". J'ai le sentiment d'entendre quelqu'un en  détresse, mais qui veut sauver la face.

Et puis il se calme un peu, et vient la question : "peut-être qu'il existe encore quelque chose à laquelle je n'ai pas pensé, qui existe dans une entreprise qui ressemble à la mienne, alors, vous, le consultant, si vous me dites ça, ça m'intéresse que vous me le disiez; d'ailleurs j'ai déjà parlé à d'autres consultants...". Je suis le consultant; il me toise; il me demande un miracle, une nouvelle action qu'il pourra jeter dans son plan d'actions multicolore, une solution à laquelle il n'a pas pensé..Je n' arrive pas à en placer une. Il attend quoi ? que je sorte un miracle ? Pourquoi m'a-t-il proposé cette rencontre ? pas pour me parler de lui, ni de ses ressentis; non, il cherche LA solution. Il a l'air tellement stressé. Je lui souris en me tournant vers lui, délaissant l'écran où brillent les courbes qu'il vient de me commenter. Je lui aurait presque mis la main sur l'épaule; mais je sens que ce n'est pas le moment; un consultant, pour lui, c'est une sorte de machine à solutions. Pas de sentiments entre nous.

Et puis il me précise que là on n'a plus le temps, il a autre chose, une nouvelle épreuve qui l'attend; on peut se rappeler par téléphone la semaine prochaine. Et sa jambe continue de remuer comme un mécanisme automatique.

Il s'agite encore, il appelle autour de lui; il a un rendez vous, encore.

Je me lève. Je lui dit merci.

Bon, je lui dois un retour; oserais-je lui dire les sentiments qui m'ont parcourus pendant cet entretien qui n'en était pas un.

Et puis-je vraiment l'aider ?

En tout cas, je ne vais pas lui sortir le truc magique de l'entreprise qui a trouvé un truc auquel il n'a pas pensé.

Peut-être devrait-il juste se reposer un peu.

Même les patrons, surtout les dirigeants managers, sont en stress en ce moment.


Prête-moi ta montre pour que je te donne l'heure

Montre C'est LA blague pour les consultants. Je ne compte plus le nombre de fois où je l'ai entendue.

"Les consultants, ils vous prennent votre montre pour vous donner l'heure !".

On me l'a rejoué hier..pas méchamment, mais quand même...

C'est vrai que la profession de consultant promène avec  elle pas mal d'images et d'a priori pas toujours super avantageuses.

Et pourtant, il y a une bonne façon de s'intéresser à cette boutade sur la montre.

Car c'est vrai que le client, les managers de l'entreprise, même avec leur propre montre sous les yeux en permanence, n'arrivent pas toujours à lire l'heure.

Tenez, à 16H30, par exemple, ça dit quoi ? Pour certains, c'est l'heure où ils vont chaque jour ressentir une petite faim pour se diriger vers la cafétaria et prendre une barre chocolatée dans la machine. Et tous les jours c'est pareil.

Alors, si tout d'un coup on leur dit "mais non c'est pas l'heure de la barre chocolatée....c'est l'heure à laquelle commence une profonde remise en cause du business model de votre entreprise, et ça ne va plus s' arrêter..". Alors, oui, on va voir la montre complètement différemment dorénavant.

On croit trop souvent que la connaissance, la vraie, l'expérience, cela consiste à avoir les réponses à de plus en plus de questions, le fin du fin de l'excellence étant bien sûr d'avoir réponse à tout. Et se développer dans l'entreprise, c'est apprendre, apprendre, des réponses, des solutions.

Ceux qui croient ça parlent aux consultants comme ils se parlent à eux-mêmes, ils cherchent des réponses, des solutions, et ils n'en ont jamais assez.

Alors que tous les consultants le savent, l'expertise ne consiste pas à connaître les réponses mais à savoir poser les questions.

La semaine dernière, j'ai animé une formation pour les consultants de mon cabinet. Le sujet ? pas les connaissances, pas les expertises techniques : non !

Le sujet, c'était celui qu'on n'apprend pas à l'école, c'est : comment poser des questions, faire des entretiens, poser des questions et encore des questions.

Observez les consultants que vous trouvez les plus efficaces : ce sont ceux qui "posent les bonnes questions", qui "aident à réfléchir", et non ceux "qui ont réponse à tout".

Et cela s'applique aussi aux managers et dirigeants qui cherchent à mettre en oeuvre des idées nouvelles pour leur entreprise.

Alors, oui, quand on veut fournir de bonnes réponses, c'est bien de commencer par apprendre à lire l'heure, l'heure que l'on n'a pas comprise, sur la montre de son client, de son collaborateur, de son manager.

Essayez, vous verrez.

Quelle heure est-il ?


La vie n'est pas faite que de pouvoir

Napoleonempereur C'est un ancien qui parle, rapporté dans Le Figaro ce week-end :

" j'ai fait deux carrières. Je suis monté au sommet dans ma première carrière. Je suis monté au sommet dans ma deuxième carrière".

Celui-ci qui voit sa vie comme des vies, et ses vies comme des carrières, reprend du service.

Mais il ne veut plus être salarié, ni avoir une seule activité; il veut être indépendant.

Alors, il va faire quoi ?

Il va créer une "société de conseil", la sienne, où il aura tout le capital. Il veut participer à la redistribution des cartes dans l'industrie aprés la crise.

Et dans le même article, cette remarque désabusée :

" Il y a un moment où on se lasse....La vie n'est pas faite que de pouvoir".

Celui qui vient de s'en rendre compte ainsi en s'en confiant dans Le Figaro, qui justifie ainsi de ne pas s'intéresser à un nouveau poste de dirigeant dans un établissement prestigieux, c'est Daniel Bouton, ex Président de la Société Générale, mais aussi, rappelons-nous, l'inspecteur général des Finances, un des meilleurs lieux de formation des "hommes de pouvoir" de l'Administration Française.

Bien sûr, on voit bien que sa société de conseil va quand même bien bénéficier du carnet d'adresses qu'il a constitué dans les lieux de pouvoir qu'il a fréquentés. Et il envisage aussi de prendre des mandats d'administrateur dans quelques groupes, en plus de ceux qu'il a déjà chez Veolia et Total.

Bon, il n'y a pas que le pouvoir dans la vie, mais ce nouveau venu dans la profession semble quand même ne pas trop s'en éloigner.

Mais peut-être songe-t-il à aider le pouvoir des autres, à être un entrepreneur qui apporte ses services dans l'ombre, sans faire parler de lui, être au service de, ce profil humble et soucieux de l'intérêt général et du bien commun de ses clients.

Bienvenu, cher confrère,  dans le club des consultants sans pouvoir... !