Le capital social de la société
30 juin 2025
On se croise par hasard ; cela fait quelques années que nous ne sommes pas revus.
Oui, il est responsable de transformation et d’organisation dans une grande entreprise. Ça a l’ai sérieux. Il y est depuis huit ans. Je ne sais pas si il y est si heureux que ça ; je n’insiste pas.
Et puis il me parle d’une association qu’il a créée, et dont il s’occupe. Ses yeux s’illuminent ; son sourire apparaît. Il me montre les photos d’un festival qu’il a organisé ; des spectacles de danse, des musiciens, plein de monde. Et des fonds récoltés pour la recherche d’une maladie génétique qu’il connaît bien, c’est celle dont est atteint son fils.
A l’heure où certains croient encore que pour résoudre les problèmes de la société il faut plus d’Etat, plus d’impôts, plus de services publics et de fonctionnaires, combien sont-ils, ces salariés qui ont une deuxième vie bénévole dans les associations ? Et peut-on imaginer qu’il puisse exister une société dans laquelle il n’y aurait aucune association ? Et aimerait on vivre dans une telle société ?
C’est Jeremy Rifkin qui prévoyait, déjà en 2014, que le capitalisme allait se transformer en une société du partage et des biens communs (dans son livre « La nouvelle société au coût marginal zéro ») :
« Les communaux contemporains offrent un espace où des milliards de personnes vivent les aspects profondément sociaux de leur vie. Cet espace est fait de millions (littéralement) d’organisations autogérées, la plupart démocratiquement : associations caritatives, ordres religieux, ateliers artistiques et culturels, fondations pédagogiques, clubs sportifs amateurs, coopératives de production et de consommation, banques coopératives, organisations de santé, groupe de défense d’une cause, associations de résidents et tant d’autres institutions déclarées ou informelles – la liste est presque interminable – qui créent le capital social de la société. C’est sur ces communaux que naît la bonne volonté qui permet à une société de s’unir en tant qu’entité culturelle. Le marché et l’Etat ne sont que des prolongements de l’identité sociale d’un peuple. Sans reconstitution permanente du capital social, la confiance serait insuffisante pour permettre aux marchés et aux Etats de fonctionner ».
Et tout cela est aussi le fruit de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle et sociale de millions de personnes.
Quand on voit ces employés tellement à fond dans leur travail qu’ils en oublient, et ne peuvent plus trouver le temps de cette vie personnelle et sociale, pensent ils, et les dirigeants de leurs entreprises avec eux, qu’ils contribuent en fait à cette maladie du capital social de la société ?
C’est pourquoi cet équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle et sociale est aussi un sujet pour les entreprises et les dirigeants.
Contribuer à ces réseaux associatifs c’est aussi ce qui fait naître les sourires.