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La dictature du bonheur

Bonheur2C’est une évidence : avoir une équipe motivée, des collaborateurs « engagés », c’est une bonne chose pour la performance de l’entreprise et de toute organisation. On en rêve tous.

Et pourtant, paradoxalement, les études diverses, dont celles de Gallup qui publie un baromètre depuis 25 ans, montrent que les employés sont précisément de plus en plus « désengagés ».

L’enquête Gallup est réalisée auprès de 30 millions de collaborateurs dans 200 pays.

Selon la dernière enquête de 2020, avec une moyenne européenne autour de 11%, seuls 7% de français se disent engagés au travail, alors qu’ils étaient 11% il y a dix ans à vivre avec bonheur et implication leur expérience en entreprise. La France partage donc en 2021 l’avant dernier rang du classement avant l’Italie. A titre de comparaison, 34% des salariés aux Etats-Unis se disent engagés. Mieux qu'en Europe.

Dans les entreprises, les enquêtes internes orchestrées par des organismes comme « Great Place to Work » ou « Choose My Company », permettent de se créer des baromètres personnalisés, en interrogeant anonymement les collaborateurs. Le classement permet d’identifier les entreprises où les collaborateurs sont les plus heureux. Et on a envie de comprendre ce qu’ont pu faire ces entreprises pour répandre le bonheur parmi leurs collaborateurs, pour les copier.

Et c’est ainsi que les entreprises et leurs dirigeants rivalisent d’idées pour redresser la situation de « désengagement ». Ils ont souvent l’impression d’en faire un maximum : des salles de repos sympas, des baby-foot, des bonbons et fraises Tagada en libre-service, des séminaires où l’on rigole bien, mais aussi l’anticipation des primes de fin d’année tout au long de l’année, idem pour les promotions, etc. Cela parle de plaisir et d’argent.

Ces démarches peuvent se transformer, si l’on n’y prend garde, en une forme de « dictature du bonheur » : avec la conviction que l’on fait tout pour rendre heureux les employés, l’entreprise et ses dirigeants ne comprennent pas pourquoi ces mêmes employés auraient encore à se plaindre et à râler. Cette déferlante de gestes soi-disant faits pour le bonheur, comme des offrandes, doit désamorcer tout acte de contestation. C’est ainsi que si les employés sont désengagés, c’est leur faute, c’est qu’ils n’ont pas compris, ni su apprécier tous les avantages que leur procurent l’entreprise et leurs employeurs. Ceux qui oseraient encore se déclarer désengagés ou insatisfaits en deviennent suspects, comme des personnes dangereuses susceptibles de contaminer leurs collègues. Alors que l’entreprise fait tout pour ton bonheur, tu dois te conformer à cette pensée dominante du bonheur.

On pourrait parler de conflits de visions et de perceptions. Alors, on cherche un nouveau truc, des formations, des évènements, des fêtes, des apéros, et pas que « Zoom », ou alors de nouvelles promotions, de nouvelles primes, du cash. L’argent achète tout, non ? Même le bonheur.

Pourtant, ce qui fait chuter l’engagement dans les équipes et parmi les collaborateurs, on sait ce que c’est. Là encore, les enquêtes et études l’ont bien disséqué : la pauvreté du leadership, en premier, et aussi les processus bureaucratiques trop lents, l’incapacité à influencer les décisions de l’entreprise (les chefs ne nous écoutent pas), les inégalités, et l’atmosphère générale qui nous déprime. Evidemment, c’est plus compliqué à traiter qu’avec des paquets de bonbons. Et c’est vrai que les premiers désengagés vont porter un coup à la motivation des autres employés, voire à celle des chefs et sous-chefs.

Alors les idées ne manquent pas pour proposer de créer sa « machine à bonheur ». Et l'on va alors jouer sur un autre créneau, plus smart pour communiquer : "la responsabilité". 

Cette semaine, c’était, dans Le Figaro, le dirigeant d’une entreprise de Conseil, Marc Sabatier, qui répondait aux questions de Marc Landré. Il est le cofondateur du cabinet, né par acquisition et fusion de deux structures existantes, et qui compte aujourd’hui 450 employés. Le « credo » de l’entreprise dont il semble être fier c’est « consulting for good ». Car, c’est lui qui le dit, la spécificité de l’entreprise c’est d’être « business et people » : « Notre force, c’est d’avoir une approche intégrée qui prend en compte l’humain au même niveau que l’organisation et le développement du business ». Cela ressemble à ce que l’on appelle la « novlangue », un mot inventé par Orwell dans « 1984 ». C’est la langue officielle d’Océania, qui correspond à un langage dont le but est l’anéantissement de la pensée. C’est devenu une expression pour repérer la « novlangue managériale ».

Le dirigeant explique quand même ce que, concrètement, il a mis en place dans son entreprise, ou plutôt ce qu’il n’a pas mis en place : « Il n’y pas de comité de direction, pas de budget, pas d’objectif de chiffre d’affaires à attendre ». Et pour prendre les décisions, alors : « Pour les décisions courantes, chacun a la main, en responsabilité ». Dans cette entreprise sans hiérarchie ni organigramme, c’est la responsabilité et la confiance qui créent l’engagement, et, toujours selon ce dirigeant, « le plaisir et la fierté » de travailler pour l’entreprise. Le journaliste pose quand même la bonne question : « Il y a bien un chef qui tranche ? ». Mais le dirigeant répond qu’il ne « tranche » pas, il « anime ». Car la fonction de « manager » est « éclatée entre plusieurs personnes en fonction des sujets », et pour l’organisation, « la vie en interne est gérée par 34 règles du jeu et chacun peut exercer jusqu’à trois rôles sur les quatre existants : leader de communauté d’expertise, à laquelle chacun est libre d’adhérer ; facilitateur de développement chez les clients ; référent RH, et consultant".

Cela ressemble au fonctionnement de l’holacratie, qui aide à repenser une forme de management distribué entre plusieurs rôles, même si le dirigeant ne cite pas le concept.

Il le reconnaît lui-même, le secret de son entreprise et la fidélisation des collaborateurs repose beaucoup sur ce qu’il appelle, dans sa langue, « la responsabilité entrepreneuriale des collaborateurs ».

Autres biscuits dans sa « machine à bonheur », il soutient une cause (une association pour aider les jeunes en difficulté) et il ouvre le capital aux collaborateurs.

Avec une telle machine, même histoire, qui oserait dire qu’il n’a pas tout pour être heureux dans cette entreprise ?

Oui, qui ?

Et puis, si ça ne suffit pas, il reste la chanson et la danse que le dirigeant peut adopter aussi et se faire gratter l’épaule droite (de quoi redevenir tous Mowgli) :


Sphinge

SymbolesssC’est le nom de la « science » qui étudie les mythes, on l’appelle la mythologie. On peut voir dans la mythologie grecque et romaine une collection de belles histoires, comme des contes, avec des dieux, des héros, des hommes et des demi-dieux, des animaux fantastiques que l’on combat, sans y rechercher d’explications.

Mais la mythologie est aussi porteuse de messages, de révélations sur la destinée humaine. On y voit alors « l’explication de l’inexplicable, l’apparition de la lumière, l’obscurité devenue parole », comme le soulignent Laure de Chantal et Jean-Louis Poirier dans l’introduction de leur « Bibliothèque mythologique idéale » (Les Belles Lettres).

En y cherchant des explications et des leçons, on trouve alors dans les récits mythologiques des enseignements fondamentaux qui, à travers les généalogies des dieux et leurs aventures, nous font découvrir des révélations sur les commencements du monde ou le destin final de l’âme humaine. Ils en deviennent alors des textes sacrés.

Et la mythologie devient aussi un guide pour orienter l’action, le développement, et pourquoi pas la stratégie de nos entreprises et des leaders.

Un des mythes qui a inspiré de nombreux analystes et commentateurs est le mythe d’Œdipe, et parmi les commentateurs, Annick de Souzenelle, notamment dans son ouvrage « Œdipe intérieur ».

Elle apporte une lecture originale du mythe, connu surtout à travers les pièces de Sophocle.

Parmi les épisodes de ce mythe, celui de la rencontre d’Œdipe avec la Sphinge.

Resituons d’abord le contexte du récit.

Œdipe, c’est le fils de Laïos et Jocaste, à qui la Pythie de Delphes a prédit que «Œdipe tuera son père, épousera sa mère, et plongera sa famille dans le deuil et le sang ».Pour éviter cette prédiction, les parents déterminent de se débarrasser de ce fils, et le pendent par les pieds, préalablement transpercés et traversés par une corde. Mais Œdipe est sauvé et recueilli par des bergers, qui en font don au roi Polybos et à la reine Periboea, qui l’élèvent comme leur fils. Mais Œdipe va aussi aller consulter la Pythie de Delphes, qui, lui prédit également que « Œdipe tuera son père et épousera sa mère ». Effrayé, et pensant qu’il s’agit du roi et de la reine ,qu’il aime beaucoup, Œdipe s’enfuit.

C’est sur le chemin étroit, alors qu’il s’éloigne de Delphes, qu’il croise un char circulant en sens inverse. Une altercation se produit avec l’homme sur le char, qui lui demande de s’écarter. Œdipe refuse, le char lui roule sur le pied (déjà bien fragile depuis la pendaison). En réplique, Œdipe tue le cocher et l’homme du char. On l’a compris, cet homme c’est le roi Laïos (son père, ce qu’il ignore, bien sûr), qui précisément revenait de Thèbes, la ville dont il est le roi, pour aller consulter la Pythie à Delphes et lui demander comment se débarrasser d’un monstre redoutable, une Sphinge, qui menace la ville et étrangle et dévore tous les passants qui se révèlent incapables de répondre à l’énigme qu’elle pose. Le nom de Sphinge signifie « «étrangleur « (étymologie du mot « Sphinx » : sphiggo=serrer).

Œdipe, se rendant donc à Thèbes, apprend la mort du roi, et la promesse que vient de faire la reine Jocaste d’épouser celui qui débarrasserait le pays de la Sphinge, et ainsi de l’élever à une dimension royale. Œdipe rencontre la Sphinge, résout l’énigme, et la Sphinge se jette du haut du rocher. Et Œdipe épouse Jocaste, sa mère. La prédiction est réalisée.

Annick de Souzenelle voit dans cet épisode, et toute l’aventure d’Œdipe, un besoin de dépassement de soi, et l’éveil d’une véritable identité.

Le char d’abord : C’est « un aspect de lui-même, de son corps particulièrement ainsi que de son ego ».Ce char est « tiré par les chevaux de sa libido et monté par l’esprit qui jusqu’ici a été le sien, hérité de ses ancêtres gauchers et boiteux dont il ne peut se libérer tant qu’il n’est pas entré en contact conscient avec lui-même ». Mais, en allant dans le sens contraire du char, Œdipe « entre en contradiction avec l’ancienne part de lui-même héritée de ses ancêtres ». En tuant le cocher et Laïos, il tue en lui-même « le vieil homme ». C’est le premier face-à-face.

Pensons à ces entrepreneurs, à ceux qui veulent se lancer dans une nouvelle aventure, à ce leader qui pressent qu’une nouvelle stratégie est nécessaire, à cette personne qui veut tout simplement changer : quel char ont-ils rencontrés en face-à-face, comme Œdipe, pour tuer le vieil homme et aller à la rencontre de « l’homme nouveau » ?

En suivant Œdipe, nous rencontrons le deuxième face-à-face, le face-à-face avec le monstre. Là encore, Annick de Souzenelle nous aide à décrypter le mythe. Ce second face-à-face, c’est celui avec le monstre, la Sphinge. Et là le symbole est très fort. Car ce monstre à quatre formes est un animal aux pieds de taureau, au tronc de lion, aux ailes d’aigle et au visage d’homme.

Annick de Souzenelle fait remarquer que dans les mystères chrétiens, ces mêmes figures correspondent aux quatre évangélistes, du fait des premières phrases de leurs évangiles : saint Luc au taureau ; saint Marc au lion ; saint Jean à l’aigle ; saint Matthieu à l’homme. On retrouve ces figures dans de nombreuses sculptures ou mosaïques d’édifices religieux chrétiens.

Concernant Œdipe et son besoin de dépassement de soi, le monstre qu’il rencontre dans ce deuxième face-à-face, cette Sphinge (féminin car son visage est féminin), est le symbole des étapes progressives de l’Homme durant sa vie.

Le taureau, c’est le symbole de l’enfance et de l’adolescence (la fertilité et la puissance physique), c’est la zone qui va des pieds jusqu’aux hanches. C’est l’étape de la purification par l’eau, étape nécessaire pour entrer dans une véritable dimension d’Homme. Le lion correspond à l’âge adulte, zone qui va des hanches aux épaules. Au niveau des épaules correspond la « Porte des dieux », c’est l’étape de la purification par le feu (« l’épreuve du feu »).  L’aigle, c’est celui qui conduit l’Homme dans son passage de la « Porte des dieux », qui lui permet d’acquérir la « Vision totale ». Enfin le visage humain est celui que nous portons sur nos épaules et qui change au fur et à mesure de notre « dynamique de vie ».

Cette monstrueuse rencontre, symboliquement, c’est donc « l’objectivation des énergies potentielles qui nous sont données dès la naissance en vue de notre construction ; elles nous paraissent terrifiantes tant que nous ne les avons pas intégrées, mais divines lorsqu’elles sont devenues nôtres ».

Cette Sphinge que rencontre Œdipe, c’est « l’autre côté » d’Œdipe dans ce deuxième face-à-face. Et ainsi Œdipe va entrer dans Thèbes, dont il va devenir le roi en épousant Jocaste, « muni de tous les dons ». Cette fois, ce n’est pas en tuant qu’il acquière ces dons, mais en utilisant son intelligence pour résoudre l’énigme.

Ce mythe d’Œdipe, interprété par Annick de Souzenelle, est un signe pour tous ceux, aujourd’hui, qui sont en recherche de nouvel élan, de nouvelle ambition, ou juste de sens.

De quoi rencontrer et dialoguer avec notre taureau, notre lion, notre aigle et notre figure humaine.


Créer du collectif

CollectifElle a été nommée à ce poste, membre du Directoire, depuis presque un an. Elle regroupe sous sa responsabilité, dans un poste reconfiguré, des entités regroupées, qui n’étaient pas rassemblées ainsi auparavant. Elle change deux des responsables de son Comex (les précédents partant en retraite). Sa mission, c’est de « renforcer la performance ». Elle a l’air d’aimer ça.

Elle me raconte ses projets, elle est « débordée ». Son ambition c’est de « créer du collectif » avec sa nouvelle équipe de Direction et le « premier cercle » des managers.

Je m’interroge. Qu’est-ce que ça veut dire « créer du collectif » ? On pourrait penser que cela consiste à aller chercher les trucs et astuces, genre séminaire, « team building », toute une panoplie, qui créeront ce collectif magique.

On peut aussi revenir aux sources. Parler de « collectif », c’est sûrement être convaincu, question de valeurs, que la force de l’humain est de pouvoir soulever des montagnes (ou « renforcer la performance ») en s’alliant avec ses semblables, dans une forme d’entraide, pour faire ensemble ce que l’on ne pourrait pas faire seul, ou en compétition avec les autres. Les membres du « collectif » ont un but commun, mais néanmoins, chacun est à sa place dans l’organisation avec ses méthodes et modes d’action propres.

Parler de collectif, c’est évoquer la peur que mon équipe n’arrive pas à travailler ensemble avec fluidité. Et parler de la peur, on le sait bien, c’est parler de confiance.

La littérature, philosophique ou livres de management ou de développement personnel, ne manque pas sur ce sujet de confiance. A chacun sa recette, ses formules toutes faites applicables à tout le monde. C’est le sujet du livre assassin de Julia de Funès, dont j’avais parlé ICI.

La confiance, c’est aussi le sujet du livre de Laurent Combalbert et Marwan Mery, « Les 5 leviers de la confiance ».

L’ouvrage est original par ses auteurs. Laurent Combalbert est un ancien du RAID, et Marwan Mery a exercé ses talents de dénicheur des tricheurs dans les casinos, en mode « Lie to me », en observant les signes du visage pour détecter les menteurs et les tricheurs.

A eux-deux ils ont créé l’ADN, Agence des Négociateurs, qui forme et accompagne des décideurs pour mieux négocier. Leurs clients sont surtout des patrons et des entreprises, pour briser une grève, négocier au mieux les salaires, ou emporter des appels d’offres ou des contrats avec clients et fournisseurs. C’est pourquoi leur livre sur la confiance, nourri de leurs expériences, contient de nombreux exemples de filatures de gangsters, ou de prises d’otages. A nous de transposer ça dans notre monde, moins dangereux quand même, de l’entreprise et de ses petites histoires de confiance entre collègues. Mais qui peut le plus, peut le moins. Le livre a d’ailleurs comme sous-titre « Aidez vos collaborateurs à se dépasser ! ». Oui, c’est un livre pour les chefs, ceux qui en veulent pour leurs collaborateurs. Encore et toujours la performance.

Ils évoquent cinq leviers car, pour eux, la confiance se décline en cinq sujets. Pour créer la confiance, on pourrait dire pour « créer le collectif » à ma Directrice, ils proposent même un ordre de mise en œuvre, étape par étape. Mais pour créer la vraie confiance et atteindre l’excellence il faut bien sûr cocher les cinq cases.

Etape 1 : la confiance dans la mission

Ah oui, on l’oublierait presque, mais croire en la mission, en avoir une, et faire en sorte que les équipes et les collaborateurs aient conscience de la mission globale à laquelle ils participent, et surtout, y croient, c’est le début de la confiance. Une « Raison d’être », en ce moment, tout le monde en veut une. Ça phosphore dans les services de communication. Il ne faut pas en rester à « renforcer la performance ». Il est préférable d’aller s’adresser aux émotions, de toucher l’intime. C’est le sens de cette citation de Saint-Exupéry que j’ai souvent utilisée, et que je conseillerai bien à ma directrice : « Si tu veux construire un bateau, ne rassembles pas les hommes et les femmes pour leur expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose. Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur des hommes le désir de la mer ». A discuter et à formaliser pour en faire une mission claire, simple et réaliste. Mais formaliser la mission, c’est plus précis que la « raison d’être ». Les auteurs, habitués aux libérations d’otages et aux attaques terroristes, nous disent qu’il faut viser grand. Ils parlent en connaisseurs : « D’expérience, on constate que les équipes qui doivent affronter des enjeux forts en environnement complexe sont plus motivées et plus efficientes que les autres ».

La mission est trouvée, les enjeux forts et les émotions à la clef ?

On passe à l’étape 2 alors.

Etape 2 : la confiance hiérarchique

Quel meilleur gage de confiance que de croire dans celle ou celui qui vous guide ? Et que de problèmes quand, surtout quand l’ambition fixée est forte, quand on doute de la capacité du ou des chefs.

Il y a, pour un chef , ou pour les collaborateurs, les mauvaises méthodes, que pourtant certains utilisent :

  • La peur : faire avancer ses collaborateurs sous la crainte d’une sanction relève plus du dressage que du management. Pas trop la recette pour la confiance.
  • La ruse : pour être tranquilles les collaborateurs font mine de suivre le leader, mais en réalité avancent à reculons, sans envie ni engagement. Cela finit par se voir. Pas trop une relation de confiance non plus.

 Pour créer la relation de confiance avec le chef, les auteurs recommandent au chef l’empathie, celle du leader qui perçoit l’émotion et montre à son interlocuteur qu’il en accuse réception.

Vous êtes reconnu comme un bon chef crédible et sincère, empathique.

Prêt pour l’étape 3. Eh oui, ce n’est pas fini.

Etape 3 : La confiance dans l’histoire

«  Comment savoir où l’on va si on ne sait pas d’où l’on vient ? » disent les auteurs. Cela rappelle cette citation de Churchill : « Plus vous saurez regarder loin dans le passé, plus vous verrez loin dans le futur ».

Connaître son histoire, c’est être capable de valoriser les succès et de d’apprendre des erreurs passées. C’est porter un regard lucide sur les capacités et les points faibles de l’entreprise. Ce qui renforce la confiance collective, ce sont aussi ce que les auteurs appellent les « valeurs fondatrices » : Ensemble hiérarchisé de principes et de comportements considérés comme nécessaires à l’existence de l’entreprise, les valeurs fondatrices sont l’ADN du groupe, qui constituent sa conscience collective ». On parlera aussi de culture d’entreprise, qui est un ensemble de comportements et d’attitudes qui structurent le fonctionnement du groupe.

L’histoire, ce sont aussi les rituels et les traditions, les évènements réguliers, les rencontres habituelles. Ce sont les séminaires de rentrée, mais aussi les pots du vendredi soir. Avec le Covid, certains ont disparus ; il va être temps d’y revenir.

Etape 4 : La confiance en soi

Il est évident que la confiance collective de l’équipe ou de l’entreprise dépend aussi de la confiance en soi de chacun de ses membres.

Les auteurs proposent un indicateur pour la mesurer (même s’il n’est pas très facile à calculer ; c’est plutôt un indicateur intuitif) : le quotient d’insécurité de l’entreprise.

Le quotient d’insécurité est la multiplication de notre niveau de sécurité intérieure par notre capacité à accepter l’incertitude.

Cela concerne l’appétence à l’incertitude et la sensibilisation à la complexité. Si on aime ce qui est carré, être sûr de tout bien contrôler avant d’agir, alors notre quotient d’insécurité est faible et, dès que quelque chose tourne mal ou n’est pas prévu, c’est la panique. Pas trop l’ambiance de confiance.

Pour développer ce quotient, les expériences, les debriefings des situations, l’entraînement à agir et décider dans l’incertain, sont de bons facteurs de développement.

Etape 5 : la confiance d’équipe

On comprend bien que si les associés prennent leurs collègues pour des imbéciles ou des incapables, si les collaborateurs se « tirent dans les pattes » pour gagner la course et se montrer meilleurs que les autres, la confiance de l’équipe sera nulle.

Certaines règles du jeu, notamment dans les systèmes de rémunération et de bonus, facilitent la conscience collective et la solidarité, d’autres moins. Il ne suffit pas d’avoir les règles, encore faut-il qu’elles soient vraiment appliquées de manière juste et équitable.

De quoi y revenir et les vérifier régulièrement.

Mais parler de confiance d’équipe, c’est aussi se méfier du risque d’avoir trop confiance, de se croire invulnérables (on est les meilleurs !). Au moindre coup dur, c’est la sidération et l’incapacité à agir ensemble. Risque aussi, quand ça va mal, de systématiquement s’en prendre aux autres, à la conjoncture, à « pas de chance », sans se remettre en cause.

Pas si simple, la confiance d’équipe. Cela peut nécessiter de régulièrement montrer à chacun l’intérêt à travailler en équipe, car l’esprit d’équipe ne se décrète pas tout seul.

On comprend que « créer du collectif », si on le fonde sur les cinq leviers de la confiance, ce n’est pas seulement « renforcer la performance », mais une forte ambition qui nous porte sur la durée, comme ce que Laurent Combalbert et Marwan Mery appellent « une envie d’excellence »

Renforcer la performance, c’est aussi une affaire de désir, un désir authentique.