Comment ça marche la "pensée stratégique" ?
29 octobre 2017
Une des façons de définir la stratégie, que je retrouve dans le livre de Rich Horwath, "Elevate - The three disciplines of advanced strategic thinking", est " l'allocation intelligente de ressources limitées par un système unique d'activités qui permet d'être plus performant que les compétiteurs dans le service aux clients".
Le secret d'une bonne stratégie est précisément dans ce "système unique" : être performant dans des activités différentes ou bien exécuter des activités similaires mais d'une autre façon plus performante.
Rich Horwath s'est fait connaître justement par ses recherches et ouvrages sur la pensée stratégique. Il a aussi créé le " Strategic Thinking Institute".
C'est un bon créneau et ses livres sont de bon conseil car, c'est vrai, la capacité à penser correctement la stratégie, et surtout à l'exécuter, ce n'est pas si simple. Déjà, si l'on interroge les dirigeants et managers de nos entreprises sur le sujet, la réponse est souvent : " Avec tous les sujets opérationnels, tous les jours, je n'ai pas le temps pour la pensée stratégique". D'ailleurs, c'est pour une eux une bonne chose finalement : quand il a plein de choses à faire, un agenda plein de réunions et de rendez-vous, le manager se sent utile et efficace; alors que prendre le temps de réfléchir et de penser à la stratégie est presque considéré comme une activité coupable et un signe d'oisiveté.
Mais, plus préoccupant, si vous proposez à ces mêmes managers d'imaginer avoir une journée entière pour réfléchir à la stratégie, et ce qu'ils feraient de ce temps, il ne le savent finalement pas très bien. Car les idées reçues sont nombreuses : pour certains cela consiste à avoir de "grandes idées", lire des ouvrages savants de prospective, regarder les vidéos de TED. Ouais...
En fait, le point de départ de toute entreprise est une idée, et ce sont les idées qui génèrent les activités, les offres, les processus, les marques, les cash flows. Le problème c'est que, envahis par ces activités et tout le reste, on n'arrive plus à avoir de nouvelles idées, ni à imaginer de nouvelles stratégies. Pour s'en sortir il faut déjà connaître la raison d'être de l'entreprise et l'enjeu stratégique. A partir de là la méthode de Rich Horwath est bien illustrée par la métaphore de l'hélicoptère : il s'agit de se placer au-dessus du business à une hauteur d'hélicoptère (quelques centaines de mètres) : c'est de cette hauteur que l'on voit très bien les paysages, les immeubles, la structure des routes, mais que l'on distingue encore aussi certains détails. C'est cette perspective que nous invite à considérer Rich. D'où le titre du livre ("Elevate").
Une fois à cette hauteur, en quoi va consister la pensée stratégique?
Dans son livre précédent, "Deep dive", il fournissait "les trois principes de base de la pensée stratégique" :
- Acumen : Comment générer des "insights" (que l'on pourrait traduire par inspirations, mises en perspectives),
- Allocation : Comment allouer les ressources ?
- Action : Comment exécuter la stratégie et atteindre les objectifs ?
Dans son nouvel opus, il fournit la suite : "Les trois disciplines de la pensée stratégique avancée" :
- Coalesce (fusionner) : fusionner les insights pour créer un business model innovant
- Compete : créer un système de stratégie pour obtenir un avantage compétitif
- Champion : Entraîner les autres à penser et agir stratégiquement pour exécuter la stratégie.
"Coalesce" c'est la phase où l'on va trouver ce que l'auteur appelle le "spectre stratégique" : Quoi (quelles offres de produits / services), qui (potentiels clients cibles), pourquoi ( besoins clients ou services satisfaits), où (canaux pour accéder aux offres), quand ( temps d'accès aux offres), comment (activités à exercer).
"Compete" : c'est la phase où l'on va comprendre les compétiteurs (business intelligence) et aligner les efforts de tous et faire les choix. La bonne stratégie n'est pas celle qui plaît à tous les clients, mais celle qui choisit les clients à satisfaire et sur quels critères.
"Champion" : Cela concerne les comportements et la pratique de "conversations stratégiques" dans toute l'entreprise. Cela comprend les dialogues (échanges d'idées et d'opinions stratégiques) et les discussions ( décisions d'actions, d'objectifs, et de mises en oeuvre). Rich Horwath propose notamment de créer une "histoire stratégique" : Elle décrit la situation ( où en est-on sur le marché, quels sont nos insights), les joueurs internes et externes qui sont impliqués dans le succès du business ( des personnes, des entreprises, des organisations publiques, ...Il peut y en avoir des centaines, il faut se concentrer sur les plus déterminants), le challenge ( celui qui affectera le plus le business, positivement si il est résolu, négativement si non), les enjeux ( les éléments critiques derrière le principal challenge), les options ( les trois à cinq alternatives exclusives pour adresser le challenge), la résolution ( une des options que l'on choisit), les actions ( les étapes réalistes et claires que l'on va lancer, quand, qui, comment), le thème central de l'histoire ( une métaphore, une montagne à franchir, la lutte du bien contre le mal, une nouvelle route, un nouveau véhicule pour le succès,...).
Bien sûr, de tels exercices sont permanents; on est tout le temps en train d'ajuster les stratégies et de se poser ces questions. Et la présentation des outils de l'auteur peut paraître un peu "bateau" avec une dose de jargon qui peut faire fuir. C'est dans la pratique et l'exercice que l'on en verra le bienfait.
Le cœur ce type d'approches est, comme toujours, de créer cet espace de "conversations stratégiques" et aller chercher les incertitudes de nos certitudes pour nous inspirer. A partir de là, de nombreux "outils" sont utiles. Le but reste d'associer à l'histoire le plus grand nombre.
Alors pour faire "marcher" la pensée stratégique, imaginons notre histoire stratégique.
Cela peut commencer par : "Il était une fois..." . A nous de créer la suite, vue de notre hélicoptère. pour être stratégiste.
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