L'open Innovation dans les Services
14 janvier 2013
Henry Chesbrough est connu pour son concept d' "open innovation" que tout le monde a aujourd'hui adopté : L'idée est que les entreprises doivent organiser leurs processus d'innovation pour devenir plus ouvertes aux savoirs et idées externes.
Son dernier ouvrage est spécifiquement consacré à l'innovation dans les services. Car les services sont pour lui le lieu privilégié de l'innovation aujourd'hui.
Une des souces d'innovation dans les services, c'est la spécialisation. Il suffit de voir tout ce qui peut aujourd'hui être externalisé, "outsourcé", grâce justement à des entreprises de services diverses et innovantes, pour le comprendre. La paye - outsourcée ; la compta : outsourcée; l'encaissement - outsourcé; le paiement des fournisseurs : outsourcé; la récupération de l'argent chez les clients mauvais payeurs : outsourcé; la livraison, la logistique : outsourcé.
En fait, on peut tout outsourcer; sauf peut-être la gestion des prestataires d'outsourcing.
Au point de se demander, avec tous ces prestataires qui nous proposent de tout faire à notre place, en se spécialisant, et donc en étant plus efficaces, quels sont donc les process que l'entreprise va décider de garder en interne.
La réponse de Chesbrough a l'air simple : il faut garder ce qui précisément fait la différenciation de l'entreprise, ce qu'elle veut garder comme un savoir-faire à ne pas copier.Ils les appelle les "core processes". Pourtant, même en ouvrant ces "core processes", on peut trouver des opportunités de croissance. Alors ?
Faut-il ouvrir les processus, les partager avec d'autres, en les outsourçant ? ou bien faut-il les fermer, les garder pour soi ?
Deux concepts mis en évidence par Henry Chesbrough viennent aider au choix.
Le premier est celui d'économie d'échelle : on fait une économie d'échelle lorsque l'on réduit les coûts grâce au volume de production de l'item en question. Dans les services, cela consiste à utiliser plus de capacité d'un actif pour exercer le service pour un plus grand volume : Exemple l'utilisation de serveurs, de moyens informatiques, mutualisés, qui abaisse ainsi le coût du service par unité.
Là où l'économie d'échelle est la plus stratégique est dans la valeur du savoir accumulé sur un client grâce aux informations sur les transactions que nous collectons. C'est ainsi qu'Amazon collecte de nombreuses informations sur les achats de ses clients, et est capable d'identifier les habitudes, les préférences, de ces clients.C'est précisémént cette valeur accumulée grâce à la connaissance d'un grand volume de transactions qui apporte la valeur. Et l'économie d'échelle devient un avantage stratégique fort et différenciant. Cet avantage peut bénéficier aux grands acteurs, mais aussi, bien sûr, aux "outsourceurs" qui accumuleront et exploiteront cet avantage.
Alors que les économies d'échelle procurent un avantage en étalant des coûts fixes sur un plus grand nombre de transactions, un autre concept peut procurer un avantage, celui que Chesbrough appelle " economies of scope" ( économies de champ") : celui-ci se réfère à l'efficience qui résulte de l'offre de multiples items par une seule source.
Là encore un concept bien connu des services. Exemple des banques qui peuvent offrir des produits variés à leurs clients, comme des assurances, sans surcoût important. C'est l'idée du "One Stop Shopping", qui a motivé aussi des entreprises de conseil ou d'informatique à proposer à leurs clients, sous le même toit, la gamme de services la plus étendue. L'idée est de tirer le maximum de revenus d'une "relation client", en proposant le maximum de services à partir de cette relation.
Et, précisément, l'ouverture, " l'open innovation" est un bon moyen pour obtenir plus d'économies d'échelle et plus d' "economies of scope". Comment ?
Deux modèles sont proposés par Henry Chesbrough : "Outside In", où l'entreprise utilise plus d'idées et de technologies externes pour son business, et "Inside Out", qui consiste pour l'entreprise à autoriser les autres à utiliser ses propres idées et technologies.
Outside In et "economies of scope"
Cette ouverture commence quand l'entreprise réalise que, aussi capable et intelligente soit-elle, il existe plein de gens capables et intelligents qui ne travaillent pas pour elle. Et si il existe de nombreuses personnes capables et intelligentes dans le monde, imaginons ce que l'on pourrait en tirer si elles travaillaient pour nous. Pour l'entreprise de service, cette prise de conscience va permettre d'ajouter des services complémentaires aux services déjà proposés aux clients, que l'expérience propre à l'entreprise et ses savoir faire ne pourraient proposer seuls.Cela va permettre d'être encore meilleur en "economies of scope" et en "One Stop Shopping".
Là encore, on pense à Amazon, qui propose de vendre des livres d'occasions d'autres vendeurs sur sa plate-forme.
Inside-Out et économies d'échelle
L' "open Innovation" est aussi un moyen de stimuler les économies d'échelle.
Alors que l'entreprise n'a pas intérêt à outsourcer ses "core processes", ceux qui apportent une vraie différenciation, elle peut, à l'inverse, trouver des gains réels, y compris sur ses "core processes", en les proposant à d'autres entreprises ou partenaires. C'est le principe du modèle " Inside-Out". C'est ainsi que Procter&Gamble a distribué des licences de ses technologies et produits à des partenaires pour mieux valoriser ses savoir-faire. Cela permet de faire croître encore plus, et plus vite, les compétences de l'entreprise. Bien sûr, ce n'est pas Unilever qui va prendre la licence de P&G; mais de nombreuses petites entreprises, n'ayant pas la taille, ni les moyens, de la R&D de Procter&Gamble, seont les partenaires adéquats pour ce type d'appproche.
Economies d'échelle, "economies of scope", Inside-Out, Outside-In... : qui a dit qu'on ne pouvait pas pratiquer l' "open innovation" dans les services ?
Merci Henry Chesbrough.
Il ne reste plus qu'à appliquer ces idées dans les plans stratégiques et les Visions des entreprises de service.
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