Previous month:
août 2012
Next month:
octobre 2012

Communication imaginaire

CommunicationDans l'entreprise, dans la politique, dans la société, vous avez remarqué comme moi, on parle beaucoup de communication.

Il faut apprendre à communiquer, et il y a du monde pour vous aider : des agences, des consultants, des Directeurs de la Comunication, des "media trainers", etc...

En plus, niveau outils, on est servis : le web, le mobile, le trés haut débit, les médias sociaux, on n'a que l'embarras du choix pour communiquer.

Même dans un cabinet de conseil, on se laisse embarquer dans ces formations pour "bien communiquer", et les consultants sont demandeurs. Et c'est vrai que c'est utile de bien se faire comprendre quand même.

Pourtant, est-ce que l'on peut dire que l'on communique quand on parle, quand on envoit des "messages", quand on a appris à "prendre la parole en public" ? Car souvent la communication que veulent apprendre ceux qui veulent "bien communiquer", cela consiste à faire un discours devant plusieurs personnes, et, au summum de la perfection, aux foules...

Ce qu'il manque à ce type de communication ? L'imaginaire.

Je retrouve, à l'occasion de cette réflexion le livre de Jacques Païtra sur " Votre imaginaire interdit de travail".

Quand il s'interroge sue ce mot moderne de "communication" (l'ouvrage date de 2002 mais on s'y retrouve encore plus en 2012...), il remarque :

" On se parle, on se raconte...Mais est-ce qu'il y a échange, partage, véritable "écoute", chaleur dans la relation, réflexion, aide, solidarité accrue ? Tout le monde se plaint de n'avoir "personne à qui parler"..."

Pour lui, la communication est devenue un "grand mythe social" : la communication, la vraie, entre personnes,d'individu à individu, se vide d'imaginaire, d'affectif, d'intime, au profit d'une communication de masse, la même pour tout le monde.

Car pour bien communiquer avec son imaginaire, il faut plus de temps, plus d'écoute, plus de générosité. Alors que le truc Pro, c'est la communication qui pète, qui envoie le message à la figure comme un coup de poing. Et pas besoin d'attendre la réponse : ce qui compte c'est de faire passer ce qu'on a à dire...Et pour ça on a les "techniques de communication", on les apprend dans les écoles et universités, et ça continue dans les formations en entreprise.

C'est pourquoi, malgré ces techniques, la plupart des communications n'en sont pas; ce sont plutôt des manifestations de ce que Jacques Païtra appelle " l'obsession de soi", un genre d'égoïsme.

On le voit bien dans le monde du business, la communication est souvent hiérarchique, assez autoritaire, du haut vers le bas, et forcément, vide d'imaginaire.

C'est pourquoi le petit livre de Jacques Païtra est un bon compagnon pour nous faire prendre conscience de cet imaginaire que l'on oublie ou que l'on trahit. Il appelle ça " les comportements qui changent la vie"...

Forcément, les conseils qu'il essaye de nous faire passer vont paraître un peu nunuches aux malades de la communication et de l'efficacité sans imaginaire...Car ces comportements sont tout simples, mais quand on les a oublié, ou jamais appris, c'est dur dur...

Cela vaut donc le coup de les relire de temps en temps :

Cultiver un brin de solitude qotidienne, se rendre disponible, s'attacher à des exercices d'imaginaire, réchauffer la place de l'affectivité, être expressif et spontané, choisir la lenteur, privilégier la fantaisie, ..

En gros, cela consiste à ne pas se laisser étouffer par la rationalisation, alors que l'on nous a apppris dès l'école que un bon élève c'est un "élève sérieux", alors que "l'élève fantaisiste", c'est le rigolo à qui l'on prédit qu'il n'arrivera à rien...

Pas facile de se convaincre de l'inverse.

Pourtant, cela commence parfois par de tout petits changements...

Et on peut commencer par la "communication"...


Accélérons !

AccelererRéunion avec le comité de Direction d'un client ce matin. On évoque la conjoncture du Groupe auquel appartient l'entité en question. On parle d'incertitude, de snetiment que l'entreprise est en transition, qu'il faut encore l'adapter (alors que l'organisation a déjà changé il y a un an à peine);

A ce moment me vient en tête une anecdote que j'évoque spontanément.

C'est le début de l'ouvrage de Vineet Nayar, "Les employés d'abord, les clients ensuite".J'en ai déjà parlé ICI, et ICI,

Cette anecdote est en fait à l'origine du programme de changement que Vineet Nayar a mené dans son entreprise, HCL Technologies, et que raconte le livre. Elle est le déclencheur, la prise de conscience.

Vineet Nayar discute avec son voisin dans un avion. Ce voisin est un pilote automobile à la retraite; il raconte un incident auquel il a dû faire face dans le passé.

Il s'est retrouvé dans une course et les freins ont lâché.

Et il demande à Vineet Nayar quelle est la réaction dans ce cas là.

La plupart des pilotes choisissent une des deux options : soit ils cherchent le moyen de faire fonctionner les freins de nouveau; soit ils ralentissent. Dans les deux cas cela augmente le risque d'accident.

Alors, que faut-il faire?

" Accélérer. Dépasser les autres voitures et prendre les mesures adaptées, quelles qu'elles soient".

Dans nos entreprises, nos projets, c'est pareil, prend conscience Vineet Nayar : face aux difficultés, ou une perte de rythme, transformer, ce n'est pas chercher à contrôler encore plus, ni ralentir, c'est accélérer, c'est à dire dépasser les concurrents, pour disposer de plus d'espace pour manoeuvrer.

Et Accélérer, comme les membres du comité ce matin l'exprimaient, c'est aussi prendre des risques, libérer les énergies, pour justement redonner de la puissance à l'organisation et aux communautés humaines qui en font la chair et l'âme.

Cela résume bien les programmes de changement et de transformation : changer, c'est se donner l'envie et les moyens d'accélérer. Modifier les organisations, c'est pour retrouver cette agilité que l'on avait souvent au début de l'aventure entrepreunariale de l'entreprise, mais que l'on a oublié parfois depuis; et, lorsque l'entreprise est un groupe déjà ancien, certains collaborateurs, voire tous, ne l'ont jamais connue. Ils doutent même qu'elle n'ait jamais existé.

C'est alors que cette image des freins du pilote de ligne  peut nous être utile.

Alors, prêts à accélérer ?

Accrochez-vous......


Le complexe de l'édifice

VilleDepuis 2011, plus de la moitié de l'humanité vit dans les villes. Chaque mois, cinq millions de personnes supplémentaires s'installent dans les villes du monde en voie de développement.

Sur une planète qui dispose de vastes espaces, nous choisissons de vivre dans les villes.

Ce n'est pas un hasard : les villes sont les moteurs de l'innovation et du développement. C'est du moins la conviction d'Edward Glaeser, spécialiste d'économie urbaine, qu'il développe dans son livre : " Des villes et des hommes". Comme il le dit de lui-même, il est un "fan" des villes.

 Ce dont il est convaincu c'est que c'est le capital humain qui explique le succès des villes, et non les infrastructures.

Et il dénonce ce qu'il appelle le " complexe de l'édifice".

Ce complexe, c'est celui des dirigeants des villes qui, au lieu d'essayer d'attirer des gens intelligents, riches, audacieux, construisent des immeubles et des bâtiments de toutes sortes.

C'est cette tendance à vouloir construire de nouveaux édifices pour donner l'image d'un succès certain, prendre la pose lors de leur inauguration, croyant ainsi signaler la vitalité de leur municipalité.

Alors que l'excès de construction, notamment dans une ville déjà en déclin, est une grave erreur.

Intéressante analyse car, dans nos entreprises aussi, on rencontre aussi ce "complexe de l'édifice", non ?

Ces dirigeants qui pensent aux bâtiments avant les gens.

Cela rappelle cette anecdote de Tom Peters qui avait vu se rénover un commerce près de chez lui, et évalué que cela avait dû coûter assez cher; mais n'avait pas du tout réglé le problème du personnel désagréable, de l'accueil pourri, etc...

Et il en conclut qu'il vaut parfois mieux investir dans les personnes que dans les bâtiments...

la vidéo est ici

Le conseil est clair et simple : réduisez votre budget Bâtiments de 25% et remettez tout ça dans les personnes, les salaires, la formation, etc...

Ce complexe de l'édifice, il n'a pas fini de nous hanter....


La tyrannie du choix

ChoixRenata Salecl est slovène, philosophe, sociologue et historienne du droit. Son premier livre traduit en français vient de paraître : " La tyrannie du choix".

Elle analyse ce qu'elle appelle la détresse qui se développe chez les gens pour la seule bonne raison qu'ils ont bien trop de choix dans leur vie.

Se référant à Lacan, elle nous explique que l'individu est marqué par un manque qui le conduit à  essayer constamment de récupérer l'objet qui, à ses yeux, incarne la jouissance perdue. Nous sommes donc constamment à la recherche de la chose dont nous espérons qu'elle nous comblera - un conjoint, un enfant, un objet de consommation - et inversement nos choix nous laissent un goût d'insatisfaction. En même temps nous avons l'impression que les autres connaissent la jouissance que nous recherchons, ce qui en retour éveille en nous de l'envie et de la jalousie.

Alors, pour s'en sortir, nous cherchons à éviter de choisir, en en appelant à une autorité, à "l'Autre", que nous nous représentons comme celui qui nous oblige à un choix. L'individu essaye alors d'interpréter le désir de l'Autre pour choisir sans vraiment choisir, comme si son choix était imposé.

Cette expérience de l'Autre est vécue par certains comme un doute, une incertitude : je vais alors me plaindre qu'il n'y a pas d'autorité qui assure la cohésion et l'unité de la société; il n'y a pas de responsable, les autorités sont impuissantes, mon patron est un imposteur, mes associés sont des corrompus ou des impuissants. Ceux là souffrent que l'Autre n'existe pas comme une entité suffisamment puissante et cohérente, et vont rechercher un maître qui semble être responsable de leur choix, tout en s'employant à secouer le joug de son autorité.

Pour d'autres, l'expérience sera celle du la perception du pouvoir menaçant de l'autorité; mon patron me vole mes idées, Dieu communique avec moi et m'envoie des messages secrets, les politiciens conspirent contre moi et menacent mon existence; Pour ceux là, leur conception de ce qu'est l'Autre est bien arrêtée : un regard menaçant ou une voix lancinante. Il vit l'Autre comme une entité matérielle qui exerce une puissance particulière sur lui et sur lui seul.

Cette façon d'analyser le choix veut nous montrer que notre histoire est toujours l'histoire de l'Autre, et même des histoires de l'Autre.

Nous croyions que la possibilité de choisir nous rendait libre; Renata Salecl nous embarque dans des histoires de psychanalyses qui veulent nous démontrer l'inverse : plus nous sommes libres de choisir, plus nous sommes angoissés, et recherchons des moyens de ne pas choisir, recherchant chez un Autre le choix que nous faisons.

Elle cite une chanson de John Lennon :

" La vie, c'est ce qui t'arrive alors que tu es occupé à faire d'autres plans".

C'est pareil pour le choix : réfléchir aux opportunités qui s'offrent et faire un choix ne sont pas la même chose.

Nous pouvons donc, librement, choisir d'accepter ou de refuser la tyrannie du choix.