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Le compétent et les obéissants dans une démocratie

CapitalismeCela date de 1748 :

" Dans une nation qui est dans la servitude, on travaille plus à conserver qu'à acquérir. Dans une nation libre, on travaille plus à acquérir qu'à conserver".

C'est Montesquieu, dans "L'Esprit des Lois"" qui en est l'auteur.

Tout y est déjà : la liberté du côté politique; l'esprit d'entreprise, la passion d'acquérir, du côté de l'économique. Pour Montesquieu, ça marche ensemble.

Jean Barchler, dans son opus sur "Le capitalisme", le cite pour appuyer sa thèse : ce qui a permis le capitalisme, c'est la démocratie, les idées de liberté.

La démocratie garantit la liberté d'initiative de tout citoyen. Le citoyen est donc laissé libre de lancer le pari qu'il existe une demande solvable pour un produit ou un service X. Il va alors réunir les facteurs indispensables à la production du produit ou du service X; soit il les possède déjà, soit il les loue ou les achète. En un mot, il entreprend.

Dans l'entreprenariat, tous les principes de la délégation démocratique de pouvoir sont respectés scrupuleusement.

Une démocratie c'est le régime où le pouvoir est délégué, de manière circonscrite, temporaire, et réversible (par les élections par exemple), à des compétents, reconnus comme tels, par des obéissants.

Les consommateurs sont comme des obéissants.

 Les consommateurs délèguent en effet, par leur acte d'achat, un pouvoir à des acteurs qu'ils jugent compétents (pour leur offrir des produits ou services les meilleurs); ils sont obéissants de manière circonscrite (pour tel produit), temporaire (pour cet achat singulier), et réversible (ils peuvent changer à l'achat suivant).

Dans cette image, le marché, le fonctionnement du marché est complètement assimilé à un forum de démocratie directe permanente.

Le profit n'est pas, alors, le prix du travail de l'entrepreneur, ni même la rémunération de sa prise de risque; le profit est le prix de cette prise d'initiative, de cette poussée en avant d'inovation, de différenciation, de conviction, qui fait rencontrer le "compétent" et "l'obéissant".

Bien sûr, si ça marche, cette initiative sera copiée, améliorée, et donc la valeur, le prix de cette initiative d'origine tend inéluctablement vers zéro. Il va falloir, encore et toujours, de nouvelles initiatives pour le restaurer.Ce profit; à l'instant donné, au moment de l'acte d'achat qui fait se rencontrer l'obéissant avec le monopole du compétent (j'achète à lui et à personne d'autre pour cet achat), car son initiative me paraît "unique", est alors,pour reprendre l'expression de Jean Baechler," le signal monétaire que la démocratie directe est respectée dans l'économie. Toutes les autres sources de profits n'en sont pas : ce sont généralement des vols rusés au dépens des consommateurs".

On en arrive à cette conclusion qu'une économie démcratique est une économie d'entrepreneurs.Et que c'est en laissant les citoyens libres d'entreprendre et en les récompensant par le profit de leurs entreprises que l'on encourage les innovations permanentes et perpétuelles, garantissant ainsi un développement économique sans fin.

L'entrepreneur qui garde ce caractère de "compétent", dans un rapport démocratique vis à vis de "l'obéissant",son client démocratique, participe à ce mouvement.

Cette démocratie disparaît, soit du fait de l'entrepreneur qui croit dominer les "obéissants" en les volant, ou en les dominant, soit du fait des politiques, qui veulent contraindre les entrepreneurs en les privant des "profits".

Le capitalisme et les entrepreneurs, les meilleurs indicateurs de la liberté des citoyens et de la démocratie ?


Poubelle du présent ?

Poubelle2Qui appelle-t-on ainsi ?

La formule est du philosophe espagnol Daniel Innerarity, que j'ai découvert en lisant ceci, et cela m'a donné envie d'y aller voir. J'ai bien fait.

. Pour lui, "le futur n'est pas la poubelle du présent", mais nombreux sont ceux, il les appelle les "ennemis du futur", qui le traitent comme tel. Son livre s'appelle " Le futur et ses ennemis". C'est plutôt un ouvrage de philosophie politique (il en parle ICI)., mais il nous éclaire sur notre conception du futur en général.

Car notre façon d'aborder le futur, dans nos sociétés, nos entreprises, parle d'abord de notre façon d'aborder le présent.

Pendant longtemps, le futur, il fallait le deviner : la divination, les oracles, caractérisent nos sociétés archaïches. Puis viennent les sociétés modernes où le futur est lié à la connaissance : croire dans un progrès linéaire et éternel, se persuader que plus on comprendra le monde grâce aux sciences, aux techniques, plus on comprendra le futur. C'est le moment où l'on fait confiance à la planification, aux prévisions.

Aujourd'hui, le futur est en crise. Ce qui le caractérise, c'est l'incertitude. On ne croit plus à cette notion de progrès éternel de la science qui éclaire; on a peur du futur, on cherche plutôt à s'en protéger qu'à le provoquer (principe de précaution, règles de protection).

Les ennemis du futur, ce sont ceux qui cherchent encore à le planifier, à l'enfermer dans des processus permettant de la configurer, en tentant de neutrailiser son caractère ouvert et imprévisible. Les politiques sont champions à ce jeu, avec leurs programmes, leurs idées héroïques sur la maîtrise du futur, celui qu'ils vont tenir en laisse grâce au souffle nouveau que leur auront donné les électeurs qui les auront élus...On est de moins nombreux à y croire, non ?

Mais, à l'autre extrême, d'autres ennemis du futur s'activent : ceux là n'y croient plus; les politiques les agacent; l'espoir, ce n'est plus leur truc. Pour eux, il suffit de s'abandonner à une sorte de mouvement naturel des choses, qu'on ne maîtrise pas, et de sauver sa peau en se débrouillant au mieux, concentré sur l'individualisme et sa personne (et surtout se méfier des aspirations collectives).

Comme le dit Daniel Innerarity, "le présent s'habille en France d'une humeur dépressive".

Mais le plus inquiétant, c'est cette tendance à utiliser le futur comme le lieu où le présent se soulage en rejetant ses problèmes non résolus, d'où cette image de la poubelle. L'horizon temporel se rétrécit; on ce concentre sur ce que l'on peut faire aujourd'hui, la bonne administration et gestion de nos affaires personnelles, la course à l'adaptation (s'adapter, c'est s'en soritr); et on envoie dans la poubelle (le futur) ce que l'on n'a pas envie de régler. C'est ce que Daniel Innararity appelle une "coalition des vivants", qui entendent jouir ainsi d'une sorte d'impunité dans la sphère temporelle du futur.

Ainsi l'espérance disparaît; elle est considérée comme un désir qui s'éloigne du réel, quelque chose d'inutile, voire de dangereux, car complètement ignorant de la dureté de la réalité. Pas facile de faire rêver dans une telle ambiance !

Pour les plus "réalistes", la seule chose qui nous sauverait du désespoir du présent, c'est la fuite dans l'action : pas besoin d'espérance, bosse !

Bon, avec ce terrible diagnostic, pas facile d'y croire, au futur ?

Pour s'en soritr, Daniel Innerariity appelle à une autre vision, une autre pensée, du futur. Car le futur n'est que la façon dont nous regardons le présent.

C'est notre regard sur le présent qui pourra seul changer notre regard et notre comportement par rapport au futur.

Le futur n'est pas la connaissance de ce qui va arriver nécessairement, mais une spéculation sur le possible.Nous n'avons pas besoin de planificateurs, mais d'une approche plutôt prospective. Quand les choses changent trés rapidement, les données du présent sont moins pertinentes pour éclairer les décisions; nous avons plutôt besoin d'imagination, condamnés à connaître le futur par nos propres forces.

Dans cette approche, l'incertitude devant le futur doit devenir un objet de connaissance qui nous mobilise. Il ne s'agit pas d'élaborer des pronostics, mais de construire des procédés pour gérer l'ignorance. La bataille dont parle Danien Innerarity ne se gagne pas par un vague appel à un autre monde mais dans la lutte pour décrire la réalité d'une autre manière.

La prospective n'est pas tant la connaissance du futur (ce qui va arriver) que la réflexion et l'évaluation qui permettent de choisir parmi les diverses options et préférences en attirant l'attention sur leurs effets potentiels associés.

Pour redonner confiance dans le futur, trois conditions :

- exercer notre capadité d'identification du nouveau : la nouveauté reste incompréhensible si nous nous obstinons à rechercher des enchaînements logiques dans les choses; il nous faut recourir à la pensée non linéaire;

- savoir observer le présent : Notre véritable difficulté à prédire le futur vient du fait que nous connaissons peu de choses du présent. Notre myopie par rapport au futur vient d'un appauvrissement de notre perception du présent : manque d'intérêt, manque de curiosité, explorations rudimentaires, attitudes stéréotypées;Le futur à proprement parler n'existe pas; il est connaissable et projetable dans ce qu'il contient de passé et de présent, c'est à dire dans ce qui est le moins futur.

- faire appel à la connaissance pratique : il ne s'agit pas de décririe le futur (exercice qui contient toujours une part de manipulation idéologique - les politiques utilisent ça pour nous attirer dans leurs desseins), mais dans le contrôle d'un comportement déterminé par la référence qu futur. D'où les procédés pour gérer l'ignorance, et imaginer autrement.

L'attitude que nous conseille Daniel Innearity est simple en fait :

" Il y a peu de choses certaines; mais beaucoup de choses possibles".

Fermons la poubelle !


Le lion et l'antilope

Lion1Pour comprendre les nouvelles formes de compétiton et d'alliances entre les entreprises d'aujourd'hui, dans un monde globlaisé, faut-il utiliser les modèles de l'écologie ?

Certains le croient, et on parle de plus en plus de ces "écosystèmes d'affaires"...

C'est précisément le sujet de ma chronique pour "Envie d'entreprendre" ce mois ci.

C'est ICI.

Reste à savoir qui est le lion, et qui est l'antilope...

Le tout est de savoir courir.

Courrez-y...

NOTA : Tiens, je m'aperçois que j'avais déjà fait un post sur "le lion et l'antilope" ICI...sur un autre sujet...mais ce n'es peut-être pas sans rapport ...