Qui dirige les entreprises françaises ?
09 avril 2012
Intéressante, cette interview de Michel David-Weill, président du conseil d'Eurazeo, dans Les Echos (fin mars); Michel Davis-Weil, c'est l'héritier des familles fondatrices de la banque Lazard; il a aujourd'hui quatre-vingts ans, et a été le dirigeant de la la banque Lazard pendant quarante ans.
Fortement opposé à la cotation en Bourse de l'établissement, il a cédé ses parts lors de l'opération en 2005, a quitté la banque, en étant resté actionnaire du holding d'investissement Eurazeo, émanation de la banque d'affaires, dont il détient 20% du capital. il le dit dans l'interview, il déteste les marchés côtés, car il considère que l'introduction en Bourse crée la tentation de gagner de l'argent plus facilement. Pour lui, les investisseurs sont aujourd'hui trop court-termistes. Ils ne sont plus intéressés que par le futir immédiat.
Ce qui l'inquiète aussi, c'est que les sociétés françaises n'aient pas d'actionnaires; l'actionnariat normal d'une société française est étranger, et l'actionnaire étranger, qui est de passage, investit dans ce qu'il connaît.
Une recheche récente de l'Institut français de gouvernement des entreprises (IFGE) menée par Pierre-Yves Gomez, vient compléter ces propos. L'étude, analysant l'évolution de 664 entreprises côtées entre 1992 et 2010, montre que la Bourse a permis une concentration sans précédent de la puissance économique dans un trés petit nombre d'entreprises géantes dont le chiffre d'affaires dépasse 7,5 milliards d'euros. Elles étaient 58 en 2010, 37 en 1992; mais leur chiffre d'affaires moyen a doublé, lorsque celui des autres entreprises françaises est resté stable; l'effectif moyen a aussi augmenté de 68%, l'effectif moyen de ces entreprises étant de 106 000 salariés par entreprise. Elles assurent 90% des investissements, et aussi 90% des dividendes versés.
Conséquence de cette situation: l'épargne, ramassée par les fonds, les investisseurs institutionnels, se place majoritairement dans les entreprises les moins risquées, au capital le plus liquide ( les business angels qui préfèrent les start-up et les PME sont les minoritaires du système); Ce qui oriente donc l'argent vers ces entreprises géantes, ce qui leur permet de grossir encore davantage.L'étude montre ainsi que leurs capitaux propres ont augmenté de 265%, trois fois plus que les PME.
Conclusion, l'épargne des ménages est utilisée depuis vingt ans, grâce à la Bourse, pour accroître la taille et la puissance de quelques entreprises géantes, qui sont devenues mondiales.
Qui dirige donc ces entreprises?
L'étude indique que ces entreprises géantes ont généralement un actionnaire de référence qui détient 24% du capital en moyenne. Ce qui correspond finalement à environ un millier de personnes qui décident de la stratégie de ces firmes géantes; et ce sont elles qui décident de la politique économique, qui décident de la localisaton des productions, des marchés.
Comment, prenant conscience de ces analyses, ne pas sentir combien les incantations des politiques sur la réindustrialisation de la france ne sont au mieux qu'une révélation de leur inquiétante impuissance, au pire de leur incroyable naïveté.
Le système financier d'allocation des ressources est à la base bénéfique pour l'économie. C'est la spéculation qu'il faut limiter.
Rédigé par : action schneider electric | 04 mai 2012 à 15:03