Innovation frugale
08 janvier 2012
En ce moment, dans les entreprises, si j'en crois les dirigeants que je rencontre, on est dans le paradoxe : 2012, il va falloir innover, car les ventes, les commandes, vont dépendre de notre capacité à étonner les clients. Mais, en même temps, on craint un peu ( ou beaucoup) la crise, et il ne faut pas se lancer dans des projets ou des investissements trop risqués. Et puis, ces consommateurs que l'on veut convaincre d'acheter, eux aussi ils vont faire attention à ne pas acheter n'importe quoi, ils vont faire attention à leurs dépenses.
C'est valable dans le commerce, mais aussi dans les business B to B, et même dans le transport public ( il est déjà impossible aujourd'hui de faire fonctionner un service de transport urbain - bus, metro, tramway - sans subventions publiques, et quand les collectivités locales elles-mêmes cherchent à faire des économies, l'innovation cela consiste à proposer plus avec moins de coûts).
Alors, de l'innovation, mais dans un contexte de dépenses réduites; on pourrait appeler ça " l'innovation frugale".
C'est précisément ce que dit Peter Löscher, PDG de Siemens, dans un article figurant dans le recueil " Le monde en 2012" du journal The Economist, et traduit en français grâce à Courrier International.
Mais l'innovation frugale, cela ne consiste pas à faire des produits dégradés, non;
" Ceux qui rencontrent le succès ne sont pas simplement des produits qui existent déjà, dépouillés de certaines caractéristiques. Ce sont souvent des produits révolutionnaires, conçus à l'aide d'un budget extrêmement réduit. Je les appelle les produits SMART ( Simple, Maintenance-friendly, Affordable, Reliable, Timely to market). Les innovations à l'origine de ces produits peuvent être technologiques, se fonder sur de nouveaux procédés de fabrication ou s'imspirer d'un modèle d'entreprise novateur. Quand on manque de ressources, ce n'est pas un obstacle, mais une motivation pour l'innovation frugale".
Cette innovation frugale, c'est précisément, selon Peter Löscher, ce que sont en train de faire les pays émergents; et pour que les grandes sociétés multinationales puissent rester compétitives dans ce contexte, elles doivent devenir des acteurs "multilocaux", et se doter de processus d'innovation plus ouverts.
Les meilleures idées de produits frugaux vont surgir dans des petites start-up qui vont aller puiser l'inspiration directement auprès des "clients".C'est d'autant plus d'actualité que dans les pays en développement, la population qui émerge de la pauvreté se compte en millions d'individus.Et , comme le fait remarquer Peter Löscher :
" Les clients frugaux d'aujourd'hui sont les consommateus haut de gamme de demain".
Dans la même revue, un business angel, Ron Conway, se déclare trés optimiste, car il est convaincu que les applications qui lient géolocalisation et réseaux sociaux vont se multiplier, et favoriser le développement du commerce de proximité.
Lui aussi croit à l'innovation frugale, et au concept de la "consommation collaborative", popularisée par Rachel Botsman :
" Pour la première fois dans l'Histoire, l'avènement des réseaux et des appareils de télépholie mobile a créé l'efficacité et le ciment social nécessaire pour permettre le partage et l'échange de biens, qu'il s'agisse de voitures, de vélos, de compétences ou d'espace disponible".
Les consommateurs vont privilégier la location par rapport à l'achat, l'usage plutôt que la propriété. Idem pour les communautés qui se constituent pour proposer, grâce à des entrepreneurs innovants, des locations entre particuliers de chambres en ville, des systèmes d'autopartage, etc..
Cette innovation frugale, elle va être en 2012, un sujet pour faire naître des idées et des entrepreneurs...en abondance.
Vive la frugalité de l'abondance !
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