Tout un roman !
15 août 2011
Je prends la suite après les 35 millions qui lui sont passés dessus avant moi…Mais le plaisir est intact.
Il s’agit du roman « Cent ans de solitude » de Gabriel Garcia Marquez, auteur colombien, prix Nobel de littérature en 1982. Ce roman, paru en 1967, a été traduit en 35 langues. Et moi, je ne l’avais pas toujours pas lu. On sort un peu groggy d’un tel roman.
Cet épais roman ( 460 pages dans l’édition de poche) nous fait parcourir tout un siècle en restant dans un seul village, imaginaire, Macondo, de la Colombie ; ça se passe entre la moitié du XIXème siècle et la moitié du XXIème siècle. Et l’on passe ce siècle avec la famille Buendia, génération après génération, où tous les garçons s’appellent José Arcadio ou Aureliano, et les filles Remedios, ou presque. C’est dire qu’on les mélange facilement si l’on ne fait pas attention.
Le roman mélange l’Histoire, la vraie, relatant des évènements réels de la Colombie (par exemple cette grève dans les bananeraies, en 1928, réprimée violemment, qui a fait des milliers de morts), et les histoires des membres de cette famille, avec la présence de fantômes , dans le genre dit du « réalisme magique ».
Difficile à percevoir, à la lecture, ce qui a fait un tel succès ; ce côté magique, ces personnages tous originaux, ce style qui permet au narrateur de décrire les faits les plus improbables avec le recul de celui qui raconte une histoire dont il connaît déjà la fin avant nous. Cela donne envie de dévorer les chapitres les uns après les autres ; cela ne s’arrête jamais.
Ce blog ne parle pas souvent de romans, même si l’été est souvent l’occasion de varier les lectures.
A quoi cela sert-il de lire des romans ?
Le roman, c’est le moins scientifique des discours, il ne n’explore pas de concepts, il n’expose pas d’idées et de réflexions. Cela ferait ranger la lecture de romans dans ce que l’on appelle les activités distrayantes, voire sentimentales, réservant à d’autres ouvrages, les essais, les sujets de connaissance.
Pourtant, la littérature permet justement des expériences que n’apportent pas d’autres types de lecture. Selon Jacques Bouveresse :
« La littérature peut nous apprendre à regarder et à voir – et à regarder et à voir beaucoup plus de choses que nous le permettrait à elle seule la vie réelle – là où nous sommes tentés un peu trop tôt et un petit peu trop vite de penser » ( in « la littérature, la connaissance et la philosophie morale »).
C’est exactement cette impression que l’on a en cheminant, grâce à Gabriel Garcia Marquez, avec les protagonistes de la famille Buendia, en suivant les périodes de plein développement de ce village, l’arrivée du chemin de fer, les entrepreneurs qui se lancent dans des affaires innombrables – une loterie, un commerce de bijoux, la culture des bananes – avec plus ou moins de succès ; et ceux qui se lancent dans la guerre – la lutte entre les conservateurs et les libéraux . Cette microsociété est passionnante.
On connaît cette phrase d'Oscar Wilde, à propos d'un roman de Balzac : " La mort de Lucien de Rubempré est le plus grand drame de ma vie".
Dans cette vision, la littérature devient une expérience de pensée, une façon de découvrir des vies différentes, et des sujets de société, dont nous n’aurions jamais l’expérience dans la vie réelle ou dans des lectures plus théoriques. Le roman est alors une façon d’accueillir d’autres mondes, d’autres caractères, d’incorporer dans sa propre personnalité des savoirs et des émotions nouvelles et différentes.
C’est une sorte de rendez-vous avec soi.
Voilà une bonne raison pour lire des romans..
Bienvenu dans la réalité romanesque Gilles ! ( voir " Mensonge romantique et vérité romanesque " de René Girard )
Rédigé par : Anne Pallatin | 16 août 2011 à 23:32