Grosso modo
29 mai 2011
" Les entrepreneurs ont une expression favorite : grosso modo; car pour eux c'est la vision large et l'intuition qui comptent"; Celui qui me dit ça, et qui aime bien lui-même employer cette expression - " grosso modo" - c'est Jacques Birol, qui vient de publier un ouvrage rafraichissant et agréable à lire : " 52 conseils éternels d'aprés les maximes de Baltasar Gracian". En plus du livre, il y a aussi un site plein de videos intéressantes.
Il va inaugurer une rubrique sur la Web TV du syndicat Syntec Conseil en management, sur les " coups de coeur" du jury, dont je fais partie, pour des ouvrages de management.
Ce Baltasar Gracian, c'est un jésuite espagnol du XVIIème siècle, auteur d'un vrai "best seller", "L'homme de cour", qui est, pour jacques Birol, un des visionnaires précurseurs du changement.
Les "52 conseils" sont tirés directement des 300 maximes de Baltasar Gracian, avec pour chacune un commentaire, une interprétation, qui constituent autant de conseils aux entrepreneurs et aux innovateurs d'aujourd'hui.
Toute cette vision, selon Jacques Birol, est dans la première maxime qu'il a sélectionnée :
" Il faut aujourd'hui plus de conditions pour faire un sage, qu'il n'en fallut anciennement pour en faire sept : et il faut en ce temps plus d'habileté, pour traiter avec un seul homme, qu'il n'en fallait autrefois, pour traiter avec tout un peuple".
Que dirait-il aujourd'hui ? Ce que Jacques Birol retient de cette maxime, c'est que décider "en toute connaissance de cause", grâce à la réflexion rationnelle, c'était difficile au XVIIème siècle, c'est impossible aujourd'hui. Plus nous avons accés aux connaissances, moins nous sommes capables de savoir. J'avais déjà évoqué les réflexions de Benjamin F. Jones, qui trouvait lui aussi que les épaules des géants sont de plus en plus hautes, et craignait une panne de l'innovation.
Ce que nous dit Baltasar Gracian, c'est que nous devons toujours décider dans l'incertain, avec nos émotions, et que c'est d'ailleurs la seule façon de décider. Réfléchir, peser le pour et le contre, chercher toujours plus de connaissances pour décider, voilà la meilleure façon de ne rien décider et de ne jamais innover. C'est ce que Antonio R. Damasio a appelé "L'erreur de Descartes : la raison des émotions".
Cette mise en jeu des émotions, c'est celle qui nous fait concevoir un rêve, comme une inspiration; tout n'est pas prévu, il y a des zones qui restent floues; et ce sont les échanges, les conversations, les rencontres qui vont permettre à l'entrepreneur et à l'innovateur de préciser ce rêve et de le transformer en réalité, parfois en le changeant, car pour démarrer il a livré une idée, un business model,qu'il a imaginé "grosso modo".
Voilà, "grosso modo", ce que je retiendrais de cette conversation avec Jacques Birol de ce jour.
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