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Elle va sauver le service public !

Servicepublic

 Rencontre cette semaine avec un professionnel du service public. Il a été dirigeant de plusieurs entreprises publiques, et l'est encore aujourd'hui. Ses propos sont assez inhabituels, malheureusement.

Pour lui, le service public ne peut être sauvé que par ...la concurrence.

Il y a eu une confusion entre le service public et l'entreprise qui l'exerce, alors que ce sont deux choses distinctes. Il est tout à fait possible de faire exercer un service public par une entreprise privée, et même plusieurs entreprises, en concurrence. C'est même hautement souhaitable.

Dans le secteur des transports, c'est en 1982 que Charles Fitermann, Ministre communiste des Transports de François Mitterrand, imagine et fait voter la fameuse loi LOTI (Loi d'Organisation des Transports Intérieurs); cette loi, en gros donne un "droit au transports" à tout concitoyen (quel drôle de texte, plein de déclarations solennelles sur ce fameux "droit au transport", garant de la liberté de se déplacer de chacun d'entre nous). Cette loi est le début de cette distinction entre le service publique, dont l"Etat est garant, et l'entreprise qui exploite le service, sous contrôle de l'Etat.

De même, les Régions se sont vues déléguées l'Autorité des Transports régionaux en 1995.

Pourtant, les entreprises publiques ont souvent tendance à se considérer comme le service public, et donc intouchables, incritiquables. Et, exploitant un service public sans l'aiguillon de la concurrence, ont parfois perdu en innovation et en réactivité. Et ont aussi parfois limité les investissements et les innovations technologiques, pour préserver les emplois.

C'est grâce à l'Europe que la concurrence est en train de s'imposer partout dans les services publics; ceci va éviter de continuer les aberrations que l'on a constatées dans le passé : les barrières de péage automatique sur les autoroutes retardées le plus longtemps possible pour ne pas mettre l'emploi en danger; idem à la SNCF, où les postes d'aiguillage, hors d'âge, n'ont jamais été modernisés afin de ne pas créer de problèmes d'emplois. Cette obsession de l'emploi a conduit cette entreprise à avoir aujourd'hui le record du monde des effectifs ramenés au nombre de kilimètres de rails exploités.

 Aujourd'hui les travaux et les investissements de modernisation sont en cours; mais, afin de ne pas brusquer l'emploi, on va étaler sur quinze ans, afin que les économies d'effectifs soient dégagées au fur et à mesure des départs en retraite. Ainsi, on va garder pendant quinze ans des personnes effectuant un travail qu'on pourrait remplacer plus vite par des technologies, uniquement pour garder son emploi (mais pourquoi ne pourrait-il pas faire un travail plus utile pour la société que de s'accrocher à ce job sans valeur ? On manque pourtant d'entrepreneurs, non ? Non, on ne va pas le faire...).

Autre caractéristique de ces entreprises qui ont séquestré le service public, en résistant au changement, sans concurrence : la faiblesse du management, au profit du poids de la protection collective et statutaire; des organisations où les Directions sont découpées par technique. Il y a des exceptions, comme à la RATP, où Christian Blanc avait créé des Directions managériales par ligne (elles existent toujours), ou bien Aéroport de Paris, qui a créé des Directions managériales par aéroport. Mais à la SNCF, par exemple,on n'a pas ce genre d'organisation.

La concurrence, pour mon interlocuteur, c'est ce qui va sauver le service public; c'est grâce à cette concurrence que les investissements nécessaires vont être entrepris, que le service aux clients va s'améliorer, que les innovations vont s'accélérer.

Ce discours trés critique, qui voit dans l'ouverture à la concurrence, des bienfaits pour les usagers que nous sommes, on l'entend peu dans les propos des poiltiques, de gauche (forcément), comme de droite.

Généralement, on utilise l'exemple de l'Angleterre, Madame Thatcher, pour servir d'épouvantail. Elle a tout cassé, il a fallu revenir en arrière. Oui, mais in fine, on n'est pas revenu sur la libéralisation et la concurrence.

A entendre ce dirigeant d'entreprise publique, on n'a pas fini de voir les entreprises, publiques et privées, transformer les services publics, tant en termes de management que d'efficacité opérationnelle.

Il y aura forcément ceux qui vont s'en réjouir, comme lui, et il restera aussi ceux qui vont le déplorer. Le débat politique n'est pas prêt de s'arrêter.

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