Danse de débutant
Aristocrates et révolutionnaires

« J’ai peur de te décevoir » ou « Je t’emm… » ?

Deception

Dans l’entreprise, il se passe, parfois, entre le manager et le collaborateur de drôles de passions.

L’une d’elle, c’est celle du collaborateur qui veut tellement bien faire pour faire plaisir au manager qu’il vit avec un sentiment permanent de peur de le décevoir.

Ce sont ces équipes où l’on sent autour du manager une sorte d’admiration qui, certes, ne peut que flatter l’ego de ce manager qui se sent ainsi le parent nourricier de ses collaborateurs. Mais on y sent aussi cette peur qui empêche de se parler, de parler de ce que l'on ressent, de ses émotions et ses angoisses.

Ce sont aussi des situations qui peuvent être dommageables à la performance intrinsèque des équipes, qui n’osent pas prendre de risques, ou exprimer des opinions diversifiées.  Le débat d’idées est difficile dans ces équipes, car les conflits d’opinions sont constamment contournés.Et puis ce collaborateur qui est toujours dans la peur de décevoir, il ressent un sentiment de culpabilité qui le terrorise.Cela peut même s'accompagner de souffrance.

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Alors, cette histoire de « j’ai peur de te décevoir », ça vient d’où ? Comment s’en sortir, tant pour le manager que pour le collaborateur ?

La Communication Non Violente (CNV), théorie développée par Marshall B. Rosenberg dans les années 60, et très développée aujourd’hui à travers le monde, nous aide dans cette analyse, pour repérer ce phénomène qui consiste ne pas assumer librement la responsabilité de nos sentiments.

Ce qui est en cause dans ce comportement, c’est ce mécanisme de la motivation par la culpabilité qui consiste à attribuer la responsabilité de ses sentiments aux autres. Ça commence à l’école quand les parents nous disent : «  si tu as de mauvaises notes à l’école, cela nous fait de la peine ». Cela ressemble à de l’affection, mais c’est aussi une manière de nous convaincre de modifier notre comportement en fonction des désirs de nos parents, et de mener nos actions, non pas spontanément, mais pour échapper à la culpabilité.

Pour sortir de cette situation la CNV nous invite à assumer notre propre responsabilité de nos sentiments, selon une démarche en trois étapes pour passer de l’état de l’esclavage affectif (« j’ai peur de te décevoir ») à celui de la libération affective.

 

Première étape : l'esclavage affectif

L’ « esclavage affectif », c’est cet état par rapport aux autres où nous voulons faire plaisir à tout le monde, persuadés que nous sommes d’être responsables du sentiment des autres. Si nous constatons que notre manager a l’air mécontent ou insatisfait de notre travail, nous nous sentons responsables et obligés d’y remédier. Avec de tels sentiments, les personnes qui nous sont les plus proches, à qui nous voulons constamment faire plaisir, deviennent des poids, et nous empêchent d’exprimer notre liberté. Cela conduit à passer à côté de beaucoup de choses, de désirs, à nous fermer sur nous-mêmes, concentrés que nous sommes à endosser la responsabilité des sentiments d’autrui, et à essayer de « faire avec », quoiqu’il nous en coûte.

 

Deuxième étape : la colère

Une prise de conscience subite de cette situation conduit à vivre la deuxième étape de révolte ; c’est l’étape où l’on prend le courage de dire non, d’exprimer ses besoins, parfois avec violence, contre les besoins des autres.

Cette étape n’est pas non plus une situation stable, mais elle est nécessaire. Elle est un bon signe d’évolution.

On en connaît les manifestations les plus détonantes, qui consistent à réagir à la souffrance de l’autre par des réflexions désagréables. Par exemple, c’est ce jeune garçon qui se voit reprocher par le professeur de ne pas s’habiller correctement pour venir à l’école, et à qui il répond violemment « Je t’emmerde ! ». Voilà un signe d’affirmation fort. Dans la vie professionnelle cette phase va se caractériser par des sorties agressives pouvant être assez violentes entre le collaborateur et le manager ; d’autant plus douloureux que cette étape succède à une soumission affective. C’est le collaborateur qui, prenant conscience qu’il veut trop faire plaisir, en devient, par réaction, violent, maladroit dans la contradiction, blessant en étant trop direct, souvent malgré lui, mais parce qu’il ignore d’autres moyens de réagir. On dira de lui qu’il est « trop direct, trop agressif, trop violent ». Et il pourra alors facilement régresser vers la phase d’ »esclavage affectif » quand il se voudra revenir à son confort, sans conflit. Car cette phase n’est pas satisfaisante en ce qu’elle nous fait refuser d’admettre que les sentiments et les besoins des autres nous importent.

Alors comment s’en sortir ?

 

Troisième étape : la libération affective

C’est là que l’on arrive à la troisième étape, qui va constituer la véritable issue à la situation. C’est la phase de la « libération affective ».

Elle consiste à réagir aux besoins des autres ni par crainte, ni par honte, ni par culpabilité, mais avec bienveillance. Nous nous sentons responsables de nos actes et de nos intentions, et non de ceux des autres. La libération affective est cette posture qui consiste à exposer clairement ce que nous voulons, tout en montrant que nous voulons aussi que les besoins des autres soient satisfaits. C’est un autre niveau de relation avec les autres dont on parle. C’est la prise de conscience que nous ne pouvons jamais satisfaire nos propres besoins au détriment de l’autre. C’est cette posture où l’on sait affirmer nos besoins, les assumer, sans juger les besoins des autres, qui donne la solidité à la communication et aux relations professionnelles et au sein des équipes.

 

Car cette évolution et cette posture, cela marche dans les deux sens ; il s’agit autant de parvenir à exprimer ses propres sentiments et besoins, que d’accueillir et d’écouter les sentiments et besoins de l’autre. C’est cet échange adulte qui va constituer la qualité de la communication et de l’échange.

Dans cette posture, pas de « peur de te décevoir », ni de « je t’emmerde ! » ; mais une fluidité de communication que l’on souhaite la meilleure possible pour la performance de nos équipes.

 

Reste à s’y exercer chaque jour, sans se décourager.

Comme disait le bon Docteur Coué : chaque jour, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux.

Commentaires

ans

Les émotions sont liées aux décisions que l'on a prises (ou non prises) et aux observations de l'environnement (gens, processus) que l'on a faites (ou non).

French Ketchup

la phase de "liberation affective", et toutes ces phases du reste, se retrouvent partout, pas seulement avec son manager, mais dans le mariage, dans les relations d'amitie etc.

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