Surplus cognitif
18 octobre 2009
Le dernier opus de Chris Anderson, "Free", traduit en français, nous introduit dans le monde encore un peu mystérieux qu'on appelle "l'économie du gratuit"; C'est le monde où les modèles économiques sont complètement chamboulés par le gratuit; on donne le produit, et on vend autre chose.
Exemple étonnant, par exemple, de ce club de gym danois qui propose un abonnement qui ne coûte rien, tant que l'on y va au moins une fois par semaine. Si l'on manque une semaine, on doit payer le mois entier. Subtile comme formule, où si l'on paye cher, on ne s'en prend qu'à soi-même et son manque d'assiduité, et où tous les habitués qui entretiennent leur forme ne payent pas.
L'ouvrage nous initie à toutes subtilités. Et aborde aussi une autre facette de la gratuité : l'économie de l'échange non monétaire. J'en avais parlé ICI, .
Cette économie de l'échange non monétaire c'est celle qui nous fait rendre service à notre voisine pour lui faire ses courses, l'aider dans certaines tâches; c'est celle qui nous fait faire un geste bénévole, donner un conseil gratuit, celle de personnes qui détiennent des connaissances et qui ont envie de les partager. Forcément, ceux qui ne jurent que par l'échange monétaire et capitaliste voient cela comme une drôle de concurrence du gratuit contre des services toujours plus monétarisés qu'il faudrait faire payer à tout prix.
Pourtant, selon Chris Anderson, cette économie de l'échange non monétaire est en augmentation.
Pourquoi ?
En fait, dans une écomomie comme la nôtre en Occident, où les besoins de base (rappelons nous Maslow) c'est à dire la nourriture, le logement, sont satisfaits, sans qu'on ait à trimer dans les champs jusqu'à la tombée de la nuit, nous avons beaucoup de temps disponible. C'est paraît-il ce que les sociologues appellent le "surplus cognitif", ce temps pour nous.
C'est une énergie, des connaissances, que nous n'utilisons pas complètement dans notre travail, et nous avons besoin de les dépenser. Bien sûr, on peut les dépenser en glandant devant la télévision; mais c'est de moins en moins le cas; avec internet, nous préférons échanger, donner et recevoir, être nous même producteurs et consommateurs.
Forcément, certains mileux, certaines entreprises, profitent peut-être de ce "surplus cognitif" (même si Chris Anderson ne semble pas envisager le cas), en faisant en sorte que l'investissement, l'engagement, des collaborateurs soit au-dessus du minimum nécessaire. Mais il en reste pour des tas d'échanges aussi en dehors du travail.
Cette part d'énergie que nous donnons gratuitement, quelle que soit sa destination, c'est celle qui, selon Chris, nous rend heureux :
" Faire sans être payé des choses que nous aimons nous rend souvent plus heureux que de travailler en contrepartie d'un salaire"
Et le net est un facteur de multiplication de ces occasions d'être heureux :
" être créatif, participer , exercer un effet, être considéré comme un expert en quelque chose, tout cela rend heureux. Cette économie de production non monétaire existait potentiellement dans notre société depuis des siècles, attendant l'apparition des systèmes sociaux et des outils qui la réaliseraient pleinement".
Alors, si on s'intéressait aussi au surplus cognitif de nos collaborateurs, de nos entreprises, et que l'on faisait faire un grand bon d'échanges et de générosité dans tout ce que nous faisons ? C'est simple le bonheur, non ?
En tout cas, cela permettra d'éviter ce que montre ce macabre lipdub qui circule sur le net, que j'ai trouvé ICI, et qui m'a beaucoup effrayé (on n'ose pas croire qu'une telle entreprise puisse jamais existe...)
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