N'écoutons pas Cinéas !
Culture de discipline : le secret des stars

Le déclin en cinq étapes

Collins2 Lors de cette conférence, un des intervenants, Philippe Vivien, DRH d'Areva, a évoqué un groupe de travail auquel il venait de participer aux Etats Unis avec Jim Collins, auteur célèbre de "build to last" et "Good to Great".

Son dernier opus, sujet du groupe auquel a particié Philippe Vivien,  parle des entreprises qui ont connu, à l'inverse de la gloire, le déclin total, au point d'en mourir pour certaines. Il a cherché à comprendre comment des entreprises que l'on classerait parmi les "good" ou même les "great" sont ainsi tombées. Et pour Philippe Vivien c'est l'ouvrage qui permet, même pour une entreprise comme Areva, de ne pas prendre la grosse tête. L'ouvrage a un titre bien trouvé : " How the mighty fall".

Comment est-il possible qu'une entreprise prospère, considérée parmi les plus performantes, puisse ainsi s'effondrer ? Voilà un bon sujet, que Jim Collins explore à partir de l'étude de 11 entreprises, toutes américaines.

Ce dont il est convaincu, c'est que ce déclin ne vient pas des autres, ni de la crise, ni de quoi que ce soit d'externe; le déclin dépend d'abord de soi-même..

Et il a modélisé ce déclin en cinq étapes, la durée de chaque étape étant variable : le process peut prendre quelques mois, ou plusieurs décennies. Comment ne pas penser, en le lisant, à toutes ces chutes récentes (Lehmann Brothers, General Motors, ..). Et, bien sûr, on a envie d'utiliser le modèle proposé pour porter un diagnostic sur les entreprises que l'on connaît, voire sa propre entreprise. Juste pour jouer à se faire peur.

Jim Collins a tiré de son étude un modèle du déclin en cinq étapes . Ce qui est intéressant, c'est que les premières étapes sont des étapes de grand succès, qui pourtant contiennent les gènes du déclin.

Etape 1 : La démesure du succès (Hubris Born of success) :

C'est l'étape de la forte croissance; on ne sait pas trop pourquoi; On en devient arrogant; on se prend à croire que le succès est notre caractéristique, sans chercher à comprendre les facteurs causals de ce succès; on se raconte des histoires; On pense que l'on réussit parce qu'on fait des choses spéciales, on ne cherche pas trop à comprendre pourquoi.

Etape 2 : Encore plus sans discipline (Undisciplined Pursuit of More) :

Grâce à l'étape 1 (On est géniaux, on peut faire n'importe quoi, et ça marche !), l'étape 2 est bien préparée; On cherche plus : plus de produits, plus de croissance, plus de n'importe quoi qui nous permet de faire plus encore; on est prêt à faire n'importe quoi; bref, on en fait trop, on perd la maîtrise..Le problème n'est pas de chercher la croissance, mais de tout réduire à la croissance, d'oublier le core business de l'entreprise, et que la croissance, c'est aussi la croissance des hommes et des femmes de l'entreprise; faire de la croissance sans faire grandir les hommes et les femmes de l'entreprise, c'est augmenter les risques de chute; bref, .on prépare l'étape 3..

Etape 3 : Déni des risques et périls (Denial of Risk and Peril) :

C'est l'étape où, tout d'un coup, des indicateurs se grippent; mais les résultats encore corrects nous disent que les problèmes éventuels sont cycliques ou temporaires; on arrive en haut, mais on ne voit pas que, après, ça va être la chute. On y croit encore; on ne voit pas les signaux faibles. Quand quelque chose va moins bien on accuse les facteurs externes (la crise, les concurrents, les marchés,...tout est bon). Tout sauf se dire responsable de quelque problème. Quand on commence à prendre plus de risques que la situation ne le permet, on est prêt pour l'étape 4..

Etape 4 : Course au sauvetage (Grasping for salvation) :

Les dangers et périls accumulés dans l'étape 3 commencent à produire leurs effets : l'entreprise amorce un déclin brutal, visible par tous.Comment réagissent les dirigeants ? En recherchant un plan de sauvetage rapide, un plan d'urgence. Ils viennent de tomber dans l'étape 4. Généralement cela va consister à donner la barre à un nouveau leader charismatique, qui amène une nouvelle vision stratégique, un plan de transformation ou de "restructuration", une révolution culturelle, un nouveau produit que l'on espère révolutionnaire, une acquisition spectaculaire, bref quelque chose qui peut faire illusion pour un moment (une "silver bullet solution" selon Jim), mais qui ne dure pas...Prêt pour l'étape 5.

Etape 5 : Capitulation (Capitulation to irrelevance or death) :

Plus l'entreprise réussira à durer avec les "silver bullets" de l'étape 4, plus la chute sera vertigineuse et profonde. Les leaders s'épuisent, et épuisent les ressources financières de l'entreprise, dans ces tentatives successives pour redresser la situation, avec parfois des succès rapides, et d'autres fois de gros flops. Au point que les leaders perdent tout espoir de construire un grand futur pour l'entreprise. Ils la maintiennent tout juste en survie.Dans certains cas, cela va finir par la vente de l'entreprise; ou bien l'entreprise va s'atrophier tout doucement, ou bien, dans le cas le plus extrême, mourir.

Tout ça n'est pas trés rigolo, surtout lorsque l'on reconnaît pour soi-même ou son entreprise les signes mis en évidence par Jim Collins. Pourtant, il nous laisse de l'espoir, il est, selon lui, toujours possible de s'en sortir et de rebondir, du moins tant que l'on n'a pas dépassé les étapes 1, 2 ou 3. Après cela commence à être plus dur.

La réponse pour s'en sortir, pour Jim Collins, consiste tout simplement à revenir aux bonnes pratiques qu'il a déjà étudiées dans ses précédents ouvrages (notamment"Good to great"), ce qu'il appelle " highly disciplined management practices".

Le secret, c'est la discipline, à tous les niveaux.

Encore une fois, Jim Collins, un de mes auteurs de management favoris (j'avais déjà parlé du concept du hérisson, et rendu compte de son article sur "The ultimate creation"), nous apporte une analyse excitante et qui permet de benchmarker de nombreuses situations courantes rencontrées dans les entreprises par les dirigeants et les consultants, et particulièrement en ce moment.. Ce n'est peut-être pas la lecture idéale pour les vacances (quoique de lecture trés facile, et de petit volume, seulement 123 pages sans les annexes), mais cela vaut la peine.

Commentaires

Account Deleted

Bonsoir,

Finalement, yat'il une autre explication possible, un son de cloche différent, une autre lanterne... que sais-je ?

Des entreprises nombreuses, une concurence mondiale avec des coûts de main d'oeuvre et de matières premières variables, une abondance de produits dont on arrive même pas à écouler les stocks , des services inutiles et onéreux...

bref, trop d'entreprises !!!

On ne peut pas obliger les consommateurs à acheter des trucs dont ils n'ont pas besoin et qu'ils ne peuvent pas se payer quand même !!!

signé: une employée du secteur privée à but social (maison de retraite) et lucratif (serait-ce contradictoire ?) Qui ne comprend pas tout mais qui aime la logique mathématique:
par exemple :
- "X" marques de voitures qui fabriquent X voitures dans X modèles différents en un an , dans un monde ou seulement D familles ont besoin et auront les moyens d'acheter une bagnole neuve( à crédit en général )= trop de véhicules fabriqués pour rien .
Hein ?

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