Possibles et impossibles
Donner son avis : question d'attitude

Née au sein du scepticisme

CharlesX  Certains ont l'impression que 2009 sera le début d'un monde nouveau, que quelque chose de neuf et de différent va émerger de la crise.

C'est aussi une question générationnelle.

Il est intéressant de retrouver dans l'Histoire des situations ressemblantes.

Un moment fort, souvent oublié, est la pèriode de la Restauration en France.

Aprés la Révolution, la Terreur, Napoléon, la France connaît entre 1814 et 1830 un moment particulier avec le retour des bourbons, les frères de Louis XVI, au pouvoir.

D'abord le comte de Lille, Louis XVIII, puis son frère, le Comte d'Artois, Charles X.

Ce n'est pas exactement le retour au Roi de l'Ancien Régime, c'est un mélange de Roi et de Parlement. Ce qui fonde le tout est une nouvelle constitution, la "Charte", dont l'interprétation fera débat pendant toute la pèriode.

Mais ce qui caractérise ce moment de l'Histoire, c'est l'émergence d'une nouvelle génération, n"e au début du Siècle, qu n'a pas connu la Révolution, qui a été élevée sous Napoléon, et qui va commenccer à vouloir participer à la société pour tenir le pouvoir ensuite.C'est cette génération, qui découvre le droit de vote (à cette époque, le croit de vote était fixé à 30 ans, et la participation au vote dépendait de votre patrimoine ou richesse).

Le mot qui représente cette tendance de "gauche" de la société, ce n'est pas encore le socialisme (ce sera pour 1848), encore moins le communisme, non, le mot qui effraie les royalistes, c'est : Libéralisme.

Et cette génération va se manifester encore plus fort avec l'arrivée de Charles X au pouvoir. Charles X, c'est l'ultra-royalisme, celui qui a peur du pouvoir du Parlement, et même des ministres, qui veut brider la liberté de la presse, qui ne conçoit l'éducation que religieuse. Un hiatus fort va se créer entre ce pouvoir et la société, qui fera se terminer la Restauration par ce que l'on appellera les "Trois Glorieuses", c'est à dire les mouvements révolutionnaires de fin juillet 1830.

Un manifeste a particulièrement marqué les esprits de l"époque; c'est celui de Théodore Jouffroy, dans un nouveau journal d'inspiration libérale, Le Globe.

Ce manifeste porte un titre plein de superbe : " Comment les dogmes finissent".

C'est la relecture des passages de ce texte qui peut nous inspirer aujourd'hui.

Ce manifeste parle en fait de la mort des dogmes et ds idées qui, un jour, doucement, meurent, et sont remplacés par d'autres. Ce cycle est éternel.

Théodore Jouffroy le décrit trés bien :

" Une génération nouvelle s'élève qui a pris naissance au sein du scepticisme. Elle a écouté et elle a compris...Et déjà ces enfants ont dépassé leurs pères et sneti le vide de leur doctrines. Une foi nouvelle s'est fait pressentir à eux : ils s'attachent à cette perspective ravissante avec enthousiasme, avec conviction, avec résolution...Supérieurs à tout ce qui les entoure, ils ne sauraient être dominés ni par le fanatisme renaissant, ni par l'égoïsme sans croyance qui couvre la société...ils ont le sentiment de leur mission et l'intelligence de leur époque; ils comprennent ce que leurs pères n'ont point compris, ce que leurs tyrans corrompus n'entendent pas; ils savent ce que c'est qu'une révolution, et ils le savent parce qu'ils sont venus à propos."

Ce scepticisme dont parle Jouffroy, c'est celui qui fait se détourner des idées anciennes. Il ne permet pas d'adhérer à de nouvelles idées. Il est plutôt assimilé à une sorte de désespérance, le peuple désespérant de la vérité, ne croit plus à rien, devient sceptique sur tout, sauf sur ses intérêts. S'ensuit selon Jouffroy une pèriode difficile où l'ancien ne sait que se venger, et le nouveau n'est représenté que par des hommes habiles et corrompus.

La génération qui s'élève au sein du scepticisme, c'est précisément celle qui va se distinguer de ces deux camps. Elle va refuser de continuer la querelle des anciens et des modernes, et plutôt chercher à découvrir une doctrine nouvelle. Alors une foi nouvelle va émerger et grandir. Les "globistes", comme on les appellera rêveront d'un "libéralisme éclairé", ni révolution, ni retour à l'Ancien Régime. Mais cette question du nouveau rêve est intemporelle, et nous parle encore aujourd'hui.

Cette prophétie de Théodore Jouffroy se termine par une question :

" Comment ce grand phénomène se produira-t-il ? Quelles circonstances particulières décideront son apparition un jour plutôt qu'un autre, dans tel lieu plutôt que dans tel autre ? (...). L'homme, le lieu, le moment l'occasion n'y font rien : toujours est-il que la force des choses rend inévitable une promulgation qu'elle a préparée, et dont elle a d'avance abattu tous les obstacles. Ainsi s'accomplit la ruine du parti de l'ancien dogme et l'avènement du nouveau. Quand au vieux dogme lui-même, il est mort depuis longtemps.

Ce texte est de 1825, cinq ans avant la fin de la Restauration et la chute des bourbons.

Sommes-nous de nouveau dans une telle pèriode de "scepticisme", et une nouvelle doctrine au-delà des anciens et des modernes d'aujourd'hui (on peut ici y mettre nos partis politiques, nos dogmes sur le fonctionnement de nos entreprises, nos croyances sur la finance internationale, etc...) est-elle prête pour une nouvelle génération, née précisément dans ce scepticisme ?

Toute la question sera de faire émerger ces nouvelles idées.

Et, comme en 1825, on en revient au même secret : le talent et le génie humain, qui seuls font toute la différence.

Souhaitons que 2009 soit une année pleine d'idées....

(Source biographique : "Histoire de la Restauration 1814-1830" Emmanuel de Waresquiel, Benoît Yvert)

Commentaires

Antoine

Et vive la Révolution (mais pas libérale !^^).

René

Merci pour cette référence à Théodore Jouffroy que je ne connaissais pas. Dommage qu'il n'y ait pas de pointeur sur l'article en question (Comment les dogmes finissent).
A défaut, voici un autre texte de Jouffroy :
http://fr.wikisource.org/wiki/De_la_philosophie_et_du_sens_commun

Pour le reste, les 3 glorieuses débouchèrent sur le régime Louis-Philippard, dont on ne peut pas dire qu'il ait accouché de beaucoup d'idées nouvelles.
Le renouveau s'est alors plutôt, et magnifiquement, exprimé par les grands romanciers de l'époque : Balzac et Stendhal

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