Démocratie et entreprise : dedans ou dehors ?
Besoin d'ailleurs

L'indicateur serviette

Suitcase_2  Quel métier que celui d'économiste !  Prévoir le futur en faisant parler les chiffres, déduire du volume de stock de voitures ou des expéditions par chemin de fer quel sera le taux de croissance du pays et de l'économie mondiale, voilà à quoi Alan Greenspan aura passé sa vie, qu'il raconte avec passion dans son ouvrage "le temps des turbulences". Il dit avec des mots simples comment il en est venu à "comprendre les mécanismes du monde économique, un apprentissage de soixante ans"...

Il aura occupé le poste de Président de la FED de 1987 (nommé par Reagan) à ...2006, c'est à dire jusqu'à l'âge de 80 ans. Quelle vie ! à cotoyer Reagan, Bush 1, Clinton, Bush 2, et tous les grands de ce monde.

Son livre aide à mieux comprendre comment se passe concrètement le job de la FED et en quoi les décisions sur les taux et les prévisions économiques sont importantes dans la maîtrise du monde capitaliste et libéral, dont Alan Greenspan est un fervent supporter : il y croit à fond, et ne voit le salut du monde et de l'économie que dans son expansion à travers le monde. Pour lui, tout autre modèle, notamment l'économie dirigée et planifiée, a démontré son échec avec la chute du monde communiste et de l'URSS, et le profond décalage de richesse qu'il a mis en évidence par rapport au capitalisme occidental,

Et puis il relate aussi combien, notamment autour de l'année 2000, il était devenu un véritable gourou dont on attendait les verdicts et prédictions sur l'économie comme des sentences qui pouvaient faire basculer ou relancer les marchés.

Une anecdote est particulièrement révélatrice.

Une chaîne de télévision, qui filmait régulièrement les arrivées d'Alan Greenspan dans les bureaux de la FED lors des réunions importantes, avait bâti un indicateur magique : l'indicateur serviette.

De quoi s'agit-il ?

" Si ma serviette était mince, cela voulait dire que je n'étais pas préoccupé et que l'économie se portait bien. Si, au contraire, elle était bourrée, j'avais passé la nuit à plancher sur un problème et une hausse des taux se profilait à l'horizon."

C'est vrai que le volume des serviettes est un indicateur qu'on ne regarde pas assez... Observons les conseils des ministres en France, mais aussi nos dirigeants d'entreprise, les comités exécutifs, les conseils d'administration....Que nous disent donc les "indicateurs serviette"? Est-ce que la légèreté des serviettes indique qu'il n'y a pas de problèmes, ou que le dirigeant est un gros fainéant ? Inversement, la serviette bien bourrée, c'est celle du dirigeant qui délègue mal ? ou bien celui qui a plein de problèmes ?

Voilà un nouveau sujet pour observer la vie et la santé de nos entreprises et comités de Direction.

Toutefois, la fiabilité d'un tel indicateur est ébranlée par la révélation d'Alan Greenspan à ce propos :

" A la vérité, l'indicateur serviette manquait d'exactitude. Ma serviette était bourrée lorsque j'y avais fourré mon déjeuner."

Aïe ! Finalement l'indicateur serviette, il servirait à identifier les mangeurs de sandwiches...

Pas sûr que cela soit complètement transposable dans notre pays...Mais cela peut être encore plus drôle d'imaginer, lorsque l'on voit quelqu'un d'important avec une grosse serviette, qu'elle contient son gros sandwiche pour le dejeuner ou un pack de choco-BN ...

Finalement, rien ne change depuis l'école...on amène toujours un petit goûter dans son cartable...

Commentaires

FJM

J'avais déjà entendu relaté cette anecdote. Si je pousse le cynisme à ses extrèmes, je trouve que baser la tenue de l'économie mondiale sur l'existence potentielle d'un sandwich me fait plutôt sourire de frayeur... et désespérer de la crédulité humaine... Notre récent prix Renaudot n'a t'il pas dit "une charpente d'illusion sur les fondations du doute"?

sylvain

L'un dans l'autre, ça ne change rien : si son sac est bourré, c'est soit qu'il a planché toute la nuit sur un sujet, soit qu'il va le faire à l'heure du déjeuner autour d'un sandwich !!

Sinon, preuve est faite que les journalistes américains (voire les agences financières) se basent sur des éléments extra-business pour pondre leurs analyses : crédibilité approche pragmatique proche du néant...

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