Désengagés de l'intérieur
14 septembre 2007
Les Echos rendaient compte mardi dernier d'une nouvelle étude - encore ! - sur le "désengagement des cadres".
C'est une étude réalisée par l'institut de recherche d'ADECCO, le "Lab'Ho". Les auteurs ont interrogé des cadres d'entreprises qui ont choisi de se "désengager".
Ce sont "des hommes et des femmes qui avaient tout pour réussir et qui, pourtant, un jour, ont décidé de sortir du jeu, de renoncer aux carrières classiques dans les grandes organisations globalisées".
Ces histoires de reconversion insolites, de consultant en organisation reconverti en prof de yoga, de directrice financière d'un groupe international qui arrête de travailler, correspondent à des désengagements actifs de l'entreprise. L'étude tente d'en analyser les causes, en accusant toujours les mêmes choses: trop de reporting et de contrôle, trop d'objectifs court terme, manque de sens,des promesses de carrière et de progression trop incertaines et rarement tenues,...
Et puis il y a ceux qui restent dans l'entreprise, mais deviennent des "désengagés de l'intérieur".
Cruelle expression, qui fait penser à un corps sans émotion, à une tête renversée, à une perte d'identité au travail. Ces "désengagés de l'intérieur" sont les individus qui "s'en tiennent au strict minimum, refusent les promotions qu'on leur propose... Une vraie maladie, de toute évidence, pour une entreprise...
L'article, comme l'étude, ne donnent pas de recette miracle pour attaquer le problème, car, comme le souligne Juliette Ghuilamila, qui a dirigé la recherche, " ceux qui adorent leur entreprise peuvent un jour la détester", et les raisons intimes sont multiples; il y a un jour où les termes de l'échange entre le collaborateur et son entreprise ne sont plus à la hauteur...
Une remarque reprise dans la synthèse de l'étude, invite à porter un regard plus philosophique sur le problème :
" Les hommes et les femmes qui décident aujourd'hui de se désengager partagent au moins une caractéristique : tous doivent "s'inventer". A la différence de leurs aînés, leur identité ne leur est plus donnée (ou en tous cas plus totalement) par leur appartenance à un groupe, leur famille, leur village...Les décisions et les calculs qu'ils font quant à leur relation d'emploi sont alors fortement teintées par ce travail de construction identitaire : oui à l'engagement si ce dernier est payant en terme identitaire et d'estime de soi, sinon...
Réussir sa vie, telle est l'aspiration, l'injonction, à laquelle sont soumis ces individus contemporains.
Ce à quoi aspirent ces individus, c'est la possibilité d'avoir plusieurs vies dans une vie, plusieurs engagements forts en paralllèle : un engagement professionnel qui reste trés important, mais qui laisse de la place à d'autres formes d'engagements : dans la vie familiale, amicale, sociale, avoir du temps pour faire du sport, du théâtre, s'impliquer dans une association...
Face à ce type d'expression, qui vient parler du plus intime des collaborateurs, on comprend que nombre de dirigeants d'entreprise et de DRH sont complètement désemparés.
L'attitude a souvent été le déni du phénomène, cette obsession de demander toujours "plus de la même chose" pour chasser les états d'âme des collaborateurs les plus "sensibles"...
Mais on constate combien ce type de réaction est particulièrement néfaste pour la performance de ces entreprises.
Ce sujet du "désengagement de l'intérieur", ce n'est pas le moment de trop s'en sentir....désengagé.
Mise à jour :
Résultat du sondage réalisé ici en septembre :
Désengagé de l'intérieur
Je n'en connais pas | 0% | |
Il y en a quelques uns dans mon entreprise | 18.18% | |
Il y en a plein dans mon entreprise | 45.45% | |
J'en suis un moi-même | 36.36% | |
Oui, les désengagés de l'intérieur existent, et ils viennent traîner sur mon blog... |
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