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Des tripes et des reins

Cash Dans le dernier numéro (juillet-août) du journal de l'Ecole de Paris du management, les minutes d'une récente conférence-débat avec Noël Goutard sont reprises.

Noël Goutard, c'est l'ancien Directeur Général de Valéo, qui s'est rendu célèbre par ses programmes de "cost killer" redoutable, et sa réussite à la tête de cette entreprise.

Aujourd'hui, Noël Goutard s'occupe de LBO (Leverage Buy-Out), "un nouveau métier" dit-il...

Nouveau, pas si sûr.

Que fait-il ?

Il recherche des sociétés à acheter, et investit dans celles-ci avec un effet de levier grâce à l'endettement. Traditionnellement cela consiste à acheter une société avec 20% en capital, et 80% en dette. Les managers sont aussi sollicités pour investir dans l'opération, gage de leur engagement : "Il faut que le business plan sorte vraiment de leurs tripes".

Bien sûr, pour que cela marche, il va falloir que l'exploitation de la société permette de rembourser la dette, tout en valorisant celle-ci et permettre rapidement une plus-value à la revente. LBO France, où oeuvre Noël Goutard, se donne 4 à 5 ans pour parvenir à ce résultat, souvent juteux pour tout le monde, puisque les plus-values dégagées sont, sur une telle pèriode, de 3 à 5 fois, en moyenne, le montant de l'investissement initial.

Concrètement, cela veut dire que le "driver" de la stratégie qui va devoir être conduite sur cette pèriode courte a un nom : le cash !

Pour Noël Goutard , "le cash est le dénominateur commun, tout le monde comprend"; d'ailleurs quand il était chez Valéo, il montrait déjà un fort intérêt pour le cash.

"Le cash représente effectivement une tyrannie qui est imposée  par les investisseurs, mais il y aussi du fun : il faut faire de la stratégie, il faut avancer et progresser sans cesse;"

Autre gros avantage du LBO et de l'approche par le cash : les managers comprennent bien leur intérêt, et la plus-value à laquelle ils vont participer :

" Les managers d'une société cotée en Bourse sont généralement interessés par des stock-options, donc par le long terme, et n'ont pas l'épée dans les reins en ce qui concerne les résultats, puisqu'ils n'ont généralement pas à gérer le même niveau d'endettement à court terme. Dans le cas d'un LBO, au contraire, les managers savent qu'un minimum de capital et un maximum de dette se traduisent à la sortie par une plus grosse plus-value, dont une bonne part leur reviendra".

Alors concrètement, que vont faire les managers et les investisseurs, partageant le même but commun ?

" Prendre en compte chaque ligne des actifs : les terrains, les propriétés, les usines, et démontrer aux managers qu'ils peuvent opérer avec moitié moins de fonds de roulement et d'immobilier d'actifs immobilisés".

Autre domaine de progrés, exploré avec ardeur :

" Convaincre que les usines étaient surdimensionnées, le personnel sous-employé, la productivité moitié de ce qu'elle pourrait être."

"Le mérite du LBO est de concentrer l'attention du management sur l'essentiel".

Il est faux, nous dit Noël Goutard, de reprocher aux LBO de dépecer les entreprises; au contraire, il faut, en se concentrant sur l'essentiel, préserver ce qui fera la valeur de revente de l'entreprise, et sa plus-value, et pas seulement rembourser la dette. Le produit pour les investisseurs futurs doit être préservé, et donc développer la R&D et les perspectives à long teme.

C'est pourquoi il vante le LBO comme un modèle extrèmement efficace, notamment face au modèle boursier, qui "met en lumière les rapports nouveaux qui se développent actuellement entre investisseurs et managers. Ces derniers parviennent, souvent au bout de quelques LBO, à prendre la main sur les investisseurs".

Alors, ce système, on le sent bien, il est secouant pour les managers eux-mêmes, qui deviennent, du fait de ces aventures accélérées, mais qui les enrichissent aussi fortement quand ça marche bien, "beaucoup moins résistants au changement".

Les business plans et les objectifs qui sont construits n'ont ainsi plus rien à voir avec ces budgets imposés par l'actionnaire, ou le "corporate", et avec lesquels on essaye de biaiser en permanence. Non, ici on retrouve cette notion d'entrepreneur que nombreux voudraient bien inculquer aux managers, sans trop savoir comment prendre le problème.

En fait, tel que décrit par Noël Goutard, le LBO devient le catalyseur qui permettra à toutes les parties prenantes, partageant un même intérêt, de vraiment se donner pour faire réussir l'entreprise, libérer les énergies, faire circuler les capitaux mal utilisés, en les cédant à ceux qui en feront meillleur usage.C'est donc sur les choix stratégiques, leur focalisation, la redécouverte du "core business", que les investisseurs, les managers et les dirigeants vont le plus travailler pour correctement lancer leur aventure commune.

Oui, cette histoire de tripes et de reins, elle prend un nouveau sens, cette énergie étant guidée par la volonté commune, plus que par une contrainte bureaucratique, ou un exercice vide de brassage de chiffres.

En effet, avoir trouvé cet équilibre au sein de la communauté humaine de l'entreprise, au sens large, c'est faire en sorte que les les actionnaires, les dirigeants, les banquiers soient d'accord sur un business plan librement consenti parce qu'il faut que les managers qui le conduisent le réusissent, non pas à contrecoeur, mais parce qu'ils se le sont approprié.

Alors, bien sûr , on s'imagine que tout ça s'accompagne de programmes de transformation, d'un meilleur système de pilotage, d'indicateurs de performance correctement déclinés, d'une meilleure gestion de trésorerie, de meilleures prévisions, des délais de reporting plus courts, tout ce qui permet de faciliter cette "culture du cash", ... . Noël Goutard n'en a pas parlé, car lui aussi se concentre sur l'essentiel : le vrai point de départ, c'est cet esprit d'entreprendre,de se dépasser...le reste vient de surcroît...Une fois que l'envie et la motivation sont là, on trouve plus facilement les moyens et les façons de faire...

Tripes et reins, motivation par le cash : une belle leçon d'entreprise...

Commentaires

argent

actionnaire,actionnaire,actionnaire,actionnaire,actionnaire,actionnaire,actionnaire,

buddylove

Avec le recul (janvier 2011), on voit bien où cette façon visionnaire d'entreprendre, cette religion dévorante voué au Dieu CASH a su nous mener !

un bien bel exemple !

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