Vivre avec son temps
03 juin 2007
Pour le citoyen moyen, quand on parle du temps, c'est pour savoir si il faut prendre un parapluie, si je dois mettre une petite laine ou m'autoriser à sortir en tenue légère...
Mais dans l'entreprise, surtout dans les bureaux des dirigeants, quand on parle du temps, on parle de la "gestion du temps", de "gagner du temps", de tout ce qui permet de faire de plus en plus de choses en moins en moins de temps...
Alors, demander à un dirigeant de vous révéler ses secrets pour mieux "gérer" son temps, c'est la garantie de passer un petit moment sympa où il va vous sortir les pires bêtises. On en reste la plupart du temps (oui,encore le temps) à des observations et astuces pour courir encore plus vite.
Encore entendus cette semaine, plusieurs témoignages tout aussi futiles les uns que les autres :
" Mon prédecesseur avait une voiture avec chauffeur; moi, j'ai un scooter et un casque : je gagne une heure par jour" (à signaler que ce scooter manager est arrivé en retard au rendez-vous...Mais que fait-il pendant cette heure "gagnée"?)
" Les e-mails où je suis en copie, je ne les lit pas : les réunions sont faites pour décider, les mails pour informer; si je suis en copie, pas besoin de perdre du temps"..(et les e-mails où il est destinataire, ils font gagner du temps systématiquement ?).
"J'envoie un ordre du jour avant une réunion". (et pendant la réunion, il se passe quoi ?).
Cette obsession à parler du temps comme un jeu où l'on va "gagner" ou "perdre", c'est vriament ancré dans les discours vides ...Essayez d'entendre le mot "temps" dans la bouche de votre interlocuteur sans entendre "gagner" ou "perdre" : pas facile...C'est un peu comme un jeu radiophonique ancien, le "ni oui, ni non", à tous les coups on...perd.
En fait , ces discussions sur le temps sont souvent vides car ceux qui vous en parlent ne se posent pas vraiment la question de ce qu'ils font réellement de leur temps. Et puis le temps, il y a tellement de façon de le regarder : celui de la vie, celui de l'année, celui de la journée, de l'heure...Et à chaque fois, on ne voit pas le gain ou la perte de la même façon. Le sujet de notre rapport au temps dépasse ce côté mécaniste. La question du comment vivre avec son temps permet d'aborder un autre registre.
Daniel Harkavy, coach, donne dans son dernier livre, une vision originale pour permettre au dirigeant de mieux "manager ses priorités" et d'élever un peu la question.
Il nous conseille, en tant que dirigeant, de diviser nos activités en quatre catégories :
. Growth
. In
. On
. Off
Growth, c'est la partie commerciale de notre job. Cela inclut la prospection, le networking, les entretiens avec des candidats au recrutement, la valeur ajoutée apportée à des propects importants. Ce sont les activités qui permettent à notre entreprise ou notre Département de croître, et nous aident, nous ou notre équipe, à apporter de la valeur au reste de l'organisation ou du marché.
In, c'est le temps administratif.Il commence dès qu'un prospect est devenu un client. Ce sont toutes les activités qui vont assurent que tous ceux qui vont travailler sur le produit ou le service pour ce client vont le faire avec le plus haut niveau d'excellence. En traitant ces activités "In" avec excellence, le dirigeant fait du client d'aujourd'hui la force de vente de demain.
On, c'est quand on se sort de l'excitation quotidienne de la conduite de l'entreprise. On est comme dans un hélicoptère, on observe ses activités, la croissance de notre entreprise, les activités qui nous occupent lorsque l'on est "In". On commence à travailler sur l'entreprise, à rechercher des moyens d'améliorer notre productivité et notre profitabilité. Cela inclue notre développement personnel. C'est aussi le temps où l'on lit, où l'on planifie la stratégie, où l'on réfléchit. C'est le temps où l'on met en place et où l'on exécute.
Off, c'est quand on laisse l'entreprise de côté, où l'on pense à soi, à sa vie, son plan de vie. Cela peut se produire par exemple pendant le déjeuner, lors du jogging. C'est aussi peut être le samedi ou le dimanche, lorsque l'on lit un bon livre sur la plage ou chez soi. C'est le moment où l'on a l'impression de se "recharger".
Daniel Harkavy nous recommande de bien répartir ces quatre types d'activités, en n'en négligeant aucun, et de vérifier que personne ne vient nous déranger lorsque l'on passe du temps sur chacune. On peut par exemple réserver une part de notre temps (50% ?) pour cette programmation, le reste permettant d'être prêt pour les imprévus. Mais une bonne maîtrise permettra de monter ce pourcentage à 60 ou 70%.
A chaque fois que le "In" devient trop fort par rapport au "On" et au "Off", nous nous mettons en danger. Et quand nous sommes obsédés de "Growth" (vendre), en oubliant le "In", la satisfaction client disparaît et les résultats avec...Et si l'on vit sans "Off", un jour, tout craque...
Cette programmation se prépare chaque jour pour le lendemain, au minimum, et si possible pour les 90 jours à venir. Ainsi, l'on trouvera plus facilement l'équilibre nécessaire, et l'on réduira l'impression de chaos, où l'on perd la maîtrise de notre vie, et où l'on court sur le scooter, le casque sur la tête, pour arriver quand même en retard à ses rendez-vous....
Vivre avec son temps, c'est choisir la façon dont nous allons le vivre demain, et lundi, et décider quand serons nous "Growth", "In", "On", et "Off". Et la semaine ? Et le mois ?
Le tout est de commencer....
Je pense que le sujet d'aujourd'hui est particulièrement important. Je pense que la division de Daniel Harkavy est tout à fait logique, pour moi le temps est comme une salade, chaque ingrédient doit être présent mais ne doit pas couvrir les autres. Le manager d'aujourd'hui doit bien comprendre que grandir durablement rime avec satisfaction.
Rédigé par : Zeriouh Aziz | 04 juin 2007 à 21:30