Des cadres sous Oxygène
04 avril 2007
L'équilibre subtil entre le contrôle et la responsabilité dans le management des entreprises est un exercice sur lequel travaillent en permanence les dirigeants (et corrélativement leurs conseils).
Des auteurs comme Sutton et Pfeiffer, ou bien Lebow et Spitzer, sont de véritables chantres de la responsabilité, et nous aident à trouver et mettre en oeuvre les bonnes pratiques. De quoi nous rappeler que le job du manager ne consiste peut être pas à déterrer les graines chaque jour pour vérifier qu'elles poussent bien. Les règles pour motiver les collaborateurs sont plus complexes.
Cas pratique cité dans Les Echos de vendredi 30 mars : le nouveau programme de réorganisation de la SNCF, baptisé "Oxygène".
De quoi s'agit-il ?
Guillaume Pepy, Directeur Général interrogé sur ce programme en explique la motivation : la culture interne de l'entrepriseest restée marquée par un système bureaucratique.
Le mot est lâché.
Les constats ont l'air clairs :
" Les salariés passent ainsi leur temps à faire des statistiques, remplir des documents, faire du reporting. Notre entreprise étouffe sous les référentiels et les normes".
Alors, les remèdes ?
L'article cite des reportages vidéos de témoignages sur l'intranet, la possibilité de voter sur les meilleures praiques...un vrai débat participatif !
Ce programme ressemble donc à une "chasse à la paperasserie" : chaque collaborateur est invité à recenser le nombre de documents qu'il remplit chaque semaine et le temps qu'il y consacre.
Alors, des simplifications sont apportées :
- la fiche d'entretien annuel ne comprend plus que 6 pages, au lieu de 13 précedemment....mais on ne dit pas en quoi cela rend différent l'entretien annuel..
- pour les achats de commandes simples, deux étapes de validation sont nécessaires, au lieu de sept ...mais pourquoi ces deuxétapes ? pour valider quoi ?
Autre idée mise en oeuvre :
"Pour pouvoir investir dans la réfection d'un vestiaire ou l'installation d'un nouvel outillage par exemple, cela peut prendre des mois, voire des années, tellement les étapes de validation sont nombreuses et souvent embouteillées par des demandes de nature trés variées."
Alors, pour faire mieux, on a "externalisé les études de faisabilité" : !!! et fait en sorte de traiter les dossiers en fonction des priorités et non de leur ordre d'arrivée...
Bon, finalement, le mot responsabilité, qui est au coeur des évolutions managériales, n'est pas employé. Une impression que cette première bouffée d'"oxygène" n'est pas la dernière...
La CFDT, interrogée par la journaliste des Echos, marie Bellan, n'est pas convaincue :
" La direction a transformé l'organisation des services et des gares en véritables usines à gaz. Tout est normé, et on rajoute encore une couche de formalisme alors que c'est justement ce que l'on veut combattre. Les salariés n'ont pas besoin d'un site intranet pour leur dire comment rédiger un mail ou comment faire leur travail."
" La lourdeur de notre fonctionnement est réelle, mais cette lourdeur a été mise en place par la direction elle-même."
Oui, l'absence de ce mot de responsabilité est criante.
Ces témoignages ne font que mettre dos à dos la direction "responsable" de ce qui ne va pas dans l'entreprise; comme si tous les collaborateurs n'y pouvaient rien, et ces collaborateurs, "invités" à chasser ce qui est compliqué dans leur travail administratif, comme si ils étaient seuls responsables de cette complexité.
Espérons que cette expérience d'apprentissage du management participatif qui démarre permette de traiter les sujets autrement qu'en opposant "direction" (on parle comme ça, apparemment, à la SNCF), et "agents" (idem). Au vu des témoignages rapportés, on comprend que ce programme est ambitieux...
Bon vent !
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