L'effet Halo
12 mars 2007
Imaginons que Ségolène Royal gagne l’élection présidentielle.
Que dira-t-on sur sa campagne ?
Quelle excellente idée que ces « débats participatifs », ces discours en veste blanche, ce souci des problèmes de la vie quotidienne… etc.… on verra toute la campagne avec des yeux bienveillants.
A l’inverse, si elle perd : quelle connerie cette limitation à la vie quotidienne, ces débats participatifs à la noix, ces discours foireux, et ces tenues de madone idiote, etc.…
Dans l’entreprise, c’est la même chose :
Cette entreprise qui voit son chiffre d’affaires en croissance, ses marges augmenter, son cours de bourse s’envoler, on la regarde avec bienveillance, et on découvre le charisme de ses dirigeants, les talents de visionnaire de son directeur général, des employés motivés, une orientation client exceptionnelle, …
Et si cette entreprise, d’un coup, vient à avoir des résultats moins bons, on n’omettra pas de pointer le caractère hasardeux de la vision de son dirigeant, les employés qui sont perdus, l’orientation clients très superficielle, … alors que, finalement, cette entreprise aura changé peu de choses dans ses process.
Nous venons de découvrir ce que Phil Rosenzweig appelle l’effet Halo : la tendance à rechercher a posteriori les origines du succès dans des critères qui n’ont rien à voir. A voir toutes les qualités dans Superman uniquement parce que c’est Superman, et qu’il a réussi.
Cette façon de faire est typique des auteurs de livres de management, même les plus célèbres (rappelons nous Tom Peters et « le prix de l’excellence ») : on sélectionne des entreprises qui ont réussi, et on construit une pseudo statistique des critères qui ont menés à cette réussite.
Tout ça, explique Phil, n’a rien de scientifique, et baratine le lecteur.
En fait, ce type de logique essaye de faire croire que le succès est la conséquence du respect d’une méthodologie quelconque où les étapes 1, puis 2, puis 3, font gagner forcément.
Même si cela peut constituer le fond de commerce de certains , ce type de démonstration est complètement débile.
En fait, ce biais est aussi lié au phénomène qui consiste à décrire les entreprises qui réussissent avec toujours les mêmes critères : la qualité du dirigeant, les process, les best practices, bref tout le bla bla habituel.
Alors, cette perversion de la pensée qui atteint même les plus brillants auteurs de livres de management, comment l’éviter ?
Croire que tout est affaire de volonté (comme lui), et que les causes produisent les effets, sans souci de la concurrence, des clients, de l’environnement, quelle erreur !
Oui, les mouvements des concurrents, les comportements des clients, les évolutions de l’environnement, tous ces éléments jouent un rôle dans la réussite.
C’est pourquoi il nous faut accepter l’incertitude comme une donnée ; comme « l’écologie de l’action » d’Edgar Morin.
Et puis les changements technologiques vont aussi bouleverser nos plans, et il faut se préparer à tout.
Exemple sordide de cet « effet Halo », dans les commentaires qui fleurissent suite aux suicides d’employés de Renault :
Un syndicaliste a trouvé une cause : l’intranet de Renault, qui isole les individus. De là à dire qu’il rend suicidaire, y a qu’à se baisser… Même si certains ne sont pas dupes de ces subterfuges, le mal existe.
Il ne faut pas, en effet, confondre les inputs et les résultats : rien n’est automatique.
Cette tendance à lier trop vite certaines caractéristiques au succès, ou même à l’échec, est particulièrement nocive pour diriger correctement nos entreprises.
En même temps, c’est une bonne nouvelle : s’il était vrai qu’une succession de méthodes, d’étapes, de bonnes pratiques, amenait automatiquement à la réussite, qu’en serait-il de la valeur des hommes, des dirigeants, de la vision stratégique ?
A quoi cela servirait-il de prendre des risques, de faire des paris ?
Oui, grâce à Phil Rosenzweig, et à cette dénonciation de l’effet Halo, on se met à croire à la chance plus qu’au calcul…
Bonne chance à vous !
Je suis le journaliste qui a interviewé le délégué CFE-CGC de Renault. Cette personne n'a jamais dit que l'intranet était la cause des suicides. Ce serait pour le coup du grand n'importe quoi. Il a simplement dit que l'intranet actuel contribuait à isoler.
Rédigé par : RH | 13 mars 2007 à 09:03
Réponse au journaliste :
Merci, mais alors pourquoi cette introduction de l'article :
"Entre octobre 2006 et février 2007, trois salariés du Technocentre (lire l'encadré "Focus") de Renault à Guyancourt se sont suicidés, dont deux sur leur lieu de travail. Les syndicats tout autant que la direction s'accordent à y voir le signe d'un isolement croissant des salariés. Pour Gérard Blondel, le délégué syndical central de la CFE-CGC du constructeur, la place prise par l'intranet d'information alimente ce phénomène."
Ces mots "la place prise l'intranet d'information ALIMENTE ce phénomène"...
sèment le doute : c'est quoi ALIMENTER un phénomène, sinon en être quelque peu la cause supposée ?
Intranet (l'aliment) = Isolement = Suicide (le signe)
C'est ça l'Effet Halo.
merci pour votre blog; une bonne source d'informations sur le monde de l'entreprise, avec un point de vue différent. Je le référence.
Rédigé par : Zone Franche | 13 mars 2007 à 13:12
C'est bien dans le contexte des récents suicides que ce délégué s'exprimait.
L'intranet contribue à alimenter un isolement professionnelle dangeureux pour des salariés en rupture. Pas plus, pas moins. Nous sommes bien d'accord que les causes d'un suicide sont souvent multiples, interdépendantes et in fine quasiment impossible à analyser. C'est d'ailleurs bien le problème des médecins inspecteurs du travail qui restent vagues sur les causes quand le suicide est qualifié d'accident du travail.
Rédigé par : RH | 13 mars 2007 à 14:42
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Rédigé par : Juju | 17 juin 2008 à 15:21
Bonjour,
Ce livre de Phil Rosenzweig "L'effet de Halo" vient d'être traduit en français et est disponible sous le titre "Les mirages du management".
Marie-Pierre Vaslet
Editions Vuibert
Rédigé par : MP Vaslet | 18 mars 2009 à 12:49