La loi de la performance
25 novembre 2006
On est parfois surpris de la façon qu'ont les politiques d'aborder les questions de gestion et de management, avec des méthodes dont l'innefficacité a été plus que démontrée dans des contextes d'entreprises.
Voir par exemple cette obsession des chiffres à la place de la vision. Et aussi cette nouvelle découverte de "payer les fonctionnaires au mérite".
La lecture du catalogue des propositions de l'UMP , que Nicolas Sarkozy nous a fièrement présenté récemment, permet de nouvelles découvertes, et notamment cette étrange proposition N° 11 dans le chapitre visant à améliorer la gestion publique :
" Créer une quatrième loi du service public, en plus de la continuité, de l'égalité et de l'adaptabilité : la loi de la performance".
On ose à peine y croire !
On ne sait pas encore trés bien à quoi pensent les rédacteurs d'une telle proposition, mais le fait de croire qu'une loi, votée et discutée au Parlement par les députés, va améliorer la performance des organisations et de la gestion publique, c'est quand même incroyable.
Imaginons un chef d'entreprise s'y prenant ainsi ! Et que mettrait il dans une telle "loi" ??
Il y a longtemps que nos entreprises savent que l'on ne décrète pas la performance, et que ce ne sont pas les instructions, et encore moins les lois, qui la rendent réelle.
Mais alors c'est quoi l'astuce pour faire de la performance ? me dira ce rédacteur de la loi de la performance, toujours avide de se montrer bon élève.
Et bien , demandons le aux entreprises performantes.
Tenez, j'étais cette semaine en face d'un des dirigeants d'une entreprise de plusieurs milliards d'euros de chiffre d'affaires, qui chaque année fait une croissance à deux chiffres du chiffre d'affaires et de son résultat, avec un taux plus fort pour le résultat que pour le chiffre d'affaires.
C'est quoi le miracle ?
Les produits, la qualité, la publicité, les tableaux de bord, le chef, une "loi de la performance" ?
Non, me répond-t-il, notre secret c'est "la politique des Ressources Humaines, qui encourage la mobilité, l'envie de bouger, de changer de poste, de métier, de façon de travailler, en permanence".
Cette entreprise fait passer ses collaborateurs d'un emploi fonctionnel à un poste opérationnel, du siège à une filiale, d'une marque à l'autre, d'un magasin à un autre.Cette politique, elle n'est pas écrite dans une note de procédure, elle est relayée à tous les niveaux. Chacun des collaborateurs en est l'ambassadeur.
Cette capacité à bouger, à changer, elle rend entreprenant, donne envie de se remettre en cause, de faire autrement tout le temps, de rechercher toujours l'excellence.
Cette capacité, elle a été acquise depuis de longues années, elle imprègne d'abord la culture, c'est un critère pour les évaluations, et pour les embauches : "Nous considérons que nous embauchons l'élite, et que notre devoir est de la garder et de la faire progresser le plus haut possible".
Bon, c'est sûr, il vend bien sa boîte, et il a l'air d'y être trés heureux; mais n'est-ce-pas là aussi une des composantes du succés de celle ci ? Avoir un dirigeant aussi enthousiaste, de nombreuses entreprises aimeraient bien avoir le même, non ?
Je sens notre rédacteur de la proposition numéro 11 un peu dubitatif.
Il va sûrement réfléchir à une proposition numéro 11 bis : "la loi de l'envie de bouger" dans le service public. Et puis aussi une "loi qui rend heureux", ça serait super non ?
Bon courage !!!!
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