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Le Job du Manager

Job_1

Ce dilemme semble vieux comme le monde : manager des hommes, c’est chercher constamment le bon équilibre entre la délégation et le contrôle, entre les instructions précises et la liberté laissée au collaborateur pour satisfaire son désir d’autonomie.

Pourtant, j’entends souvent de la part de certains managers, une remarque qui laisse songeur :

« mes collaborateurs à moi, ils n’aiment pas qu’on leur laisse trop de liberté, il faut les prendre en main, les surveiller tout le temps, sinon ils sont perdus et ils ne font que des conneries ! ».

Et ça continue avec une ou deux anecdotes irréfutables où, alors que le manager leur avait laissé un peu de liberté, ils ont effectivement fait une grosse connerie.

Autre confession :

« tu vois, ce collaborateur qui travaille avec moi depuis un an, à qui on a déjà dit tout ce qui n’allait pas, et bien, il est toujours aussi nul ».

Le monde des services professionnels est un bon environnement pour ce genre d’interrogations, car le client est pour le manager la statue du Commandeur à qui on a tant promis, à qui on doit tout, qui nous fait parfois un peu peur (et si tout d’un coup, il ne m’aimait plus ?) alors derrière, les consultants et collaborateurs, ils faut que ça suive, pas de contestations dans les rangs, pas d’états d’âme, ouste…

Alors, évidemment, avec ces cas concrets en tête, on ne peut qu’être interpellé quand on lit dans l’ouvrage de Rob Lebow et Randy Spitzer, « Accountability, freedom and responsability without control », dont j’ai déjà parlé, qu’il faut abandonner toute idée de « control based organisations » et passer à « freedom based environment ». On a envie de leur dire qu'ils ne sont pas dans la réalité !

Et en même temps, la présentation et les résultats paraissent convaincants, et on a envie d’essayer.

Alors, si je veux passer à une organisation où les collaborateurs sont le plus autonomes possibles, choisissent leurs actions, leurs objectifs, (oui, ils y vont à fond Rob et Randy !), et surtout sont plus efficaces, il faut faire comment ?

Forcément, il n’y a pas de recette toute faite qu’il suffirait d’appliquer sans réfléchir. Au contraire, les règles qui sont proposées doivent être confrontées à nos propres pratiques concrètes, pour être intériorisées.Elles sont d'abord une remise en cause de nos comportements habituels.

Rob et Randy nous incitent à :

-          prendre une décision,

-          puis mener en parallèle, sans jamais s’arrêter, trois activités.

La décision : c’est de décider que vous voulez vraiment mettre en place une organisation et un environnement de travail basé sur la liberté et la responsabilisation.

Prendre cette décision est difficile, du moins sincèrement. C’est un peu comme de décider que l’on veut mettre en place une décentralisation maximum.

Cela fait forcément peur, on l’imagine, car si on découvrait tout d’un coup que nos collaborateurs ne sont pas si nuls que ça, ou que cette histoire comme quoi ils ont envie qu’on les prenne en main c'est de notre faute, et que c’est pour ça qu’ils font des conneries, par rébellion inconsciente, oui ça serait vraiment un comble. Et puis cette psychologie de bazar, on n’en veut pas, c’est tellement simple de penser que le monde est simple, que les gens peuvent être dirigés comme je veux. Pourquoi se compliquer ?

Alors cette étape de la décision elle peut prendre finalement pas mal de temps, le temps de la retourner dans notre tête, de la digérer. Elle peut demander un peu d’aide de quelqu’un d’extérieur. Elle peut nécessiter de connaître un peu mieux ses collaborateurs, d’écouter, de retrouver le sens profond du mot « confiance ». Cette confiance qu’on a du mal à accorder aux autres parce qu’on en manque tellement soi-même…

Les trois activités, maintenant :

  1. Donner le droit à la liberté individuelle de chacun : chaque individu a le droit de faire des choix ;
  2. Demander à chacun d’être responsable : permettre aux gens de définir et de s’engager dans leur travail, et de créer leur propre système ;
  3. Avoir confiance dans les gens : croire que tout individu a envie d’être le meilleur, grand, et lui faire confiance pour qu’il fasse de grandes choses.

La première activité, c’est de travailler sur l’environnement de travail, c’est de fixer les délégations, les zones d’autonomie, qui permettent à chacun d’exercer ces choix. Il faut préparer cet environnement, on ne peut pas tout lâcher du jour au lendemain, mais cela doit devenir un but. Les auteurs ont l’expérience qu’il faut environ trois ou quatre ans, en partant d’une organisation hyper contrôlée, pour atteindre quelque chose qui ressemble à ce but. Mais il est toujours possible de connaître des petits succès rapides (ces quick wins qu’aiment bien les consultants).

La deuxième activité, elle porte directement sur les pratiques d’évaluations et de fixation des objectifs. Il s’agit de permettre à chacun de définir lui-même ses objectifs, d’être engagés sur les résultats (accountable). En fait, c’est le seul moyen, car, dans les organisations où les objectifs sont fixés par le supérieur hiérarchique, c’est finalement ce supérieur hiérarchique qui est engagé, pas les collaborateurs à qui on les a fixés, et qui peuvent manifester toute leur opposition grâce aux subtilités de l’attitude « passive agressive ».

C’est à ce moment que les objections arrivent, celle que j’ai citées au début de cette note : oui, mais…

Oui, mais, mes collaborateurs à moi, ils sont différents, vraiment pas au niveau…

Oui, mais, ils veulent que je les guide, sinon ils sont perdus,

Oui, mais comme ils sont fainéants, ils vont fixer des objectifs débiles, trop petits, ils ne se rendent pas compte….

Oui, mais ça va prendre un temps fou, on n’a pas le temps, il faut faire les « target »….

Oui, mais,…..je ne sais pas si je suis capable d’y arriver…

ETC…

D’où la troisième activité, qui est plus un comportement, d’avoir confiance dans les gens.

Peut être y en a-t-il qui ne méritent pas cette confiance, qui ne veulent pas, mais combien y en a-t-il ? 5% ? Pas plus probablement. Ceux là devront peut être quitter le navire. Mais pourquoi s’empêcher de mettre en place une telle organisation pour ces 5%, alors que 95% des gens n’attendent que ça ? A condition que ces 95% s'impliquent et s'engagent aussi, en responsabilité, et en conscience, dans cette démarche.Là aussi, cela ne se fait pas tout seul.

Et puis, bien sûr, il y a les cas où l’on va regretter d’avoir fait confiance, où tout ne se passe pas comme prévu… Les auteurs nous conseillent alors de relire dans la Bible le « Livre de Job »… Un peu d’humour (si l'on peut dire)  ne fait pas de mal.

Job, c’est ce croyant complètement convaincu de la bonté de Dieu, mis à l’épreuve par le Diable, et qui va connaître les pires malheurs sans jamais se décourager de sa foi…

C’est une bonne référence pour ne jamais se décourager devant les difficultés, de toujours se sentir en état de faire des efforts.

A chaque manager de trouver son Job.

Bon courage !


C'est quoi, un manager?

Collaborateur_1 Michel Barabel et Olivier Meier, professeurs de gestion à Dauphine et Paris 12, viennent de publier une somme encyclopédique de ...850 pages sur le management opérationnel. J'avoue que je ne l'ai pas lu. ça s'appelle "Manageor", comme Strategor, Marketor, Boucle d'or,...

Pour eux, le manager se définit comme un individu qui, statutairement, a des subordonnés, par opposition aux experts (cadres sans collaborateurs directs). J'en connaissait une autre définition tout aussi éclairante : "un manager, c'est quelqu'un qui manage". Bon, mais les 850 pages doivent sûrement nous en apprendre un peu plus.

Bien sûr, ils ont relayé leur ouvrage par un blog qui prolonge les réflexions par une revue de presse, des articles sur l'actualité, et des paroles d'experts. Intéressant.

Et ils ont eu la gentillesse de me proposer de me joindre à ces paroles d'experts. Je les en remercie.

Je ne sais pas si je suis vraiment un expert,...mais bon, en tous cas j'ai donné mon opinion sur les questions qu'ils m'ont posées; ça parle de managers et des qualités d'un bon manager.

Mon article sera publié en plusieurs parties, comme dans les romans feuilletons.

A la fin, vous saurez si ils se marient et si ils ont beaucoup d'enfants...forcément.

L'article (première partie) est ici.


Qui a les clés du royaume?

Cinderellascastle C'est un lieu commun du discours sur le management des entreprises : on aime les métaphores monarchiques; ça doit être une vieille nostalgie de l'Ancien Régime...

Alors, on y va : Qui est le Roi de l'entreprise ?

Du dernier ringard de croire que c'est le patron, il n'y a plus que Olivier Besancenot pour y croire.

Pendant un temps une formule a fait fureur : "Cash is king !"

Cette conviction que le cash est le roi, c'est celle qui nous a amené tous les business plans avec projection d'EBITDA sur le maximum d'années, celle qui fait saliver les actionnaires et les fonds d'investissement. Oui, le cash, c'était chic.

Et puis aujourd'hui on en revient; tout d'un coup on s'aperçoit que ce Roi qu'on appelle Cash, et bien il n'a plus de royaume si il lui manque un élément indispensable , je vous le donne en mille : LE CLIENT !!

Oui, le client, tiens c'est vrai, on l'avait oublié celui-là, c'est vrai, il est le principal apporteur de cash, non ?

Alors, allons-y sur les discours sur le client... Ce sont souvent de telles bêtises que l'on se demande bien qui peut y croire, des banalités, des phrases toutes faites qui ne trompent personne. J'avais déjà évoqué ce point en rapportant, par opposition, la sincérité avec laquelle Tom Peters parlait de ses propres clients.

En fait le discours sur le client a évolué.

On a d'abord crû que la relation entre l'entreprise et le client était transactionnelle : l'entreprise a quelque chose à vendre, elle le fait savoir, par la publicité par exemple, le client se présente, il achète, il repart. Dans cette relation, je ne sais pas trop qui est le client, je sais qu'il est venu, qu'il a acheté, et à la fin de l'année , tout ça c'est du chiffres d'affaires; Miam, Miam !

Cette vision du client, elle doit bien exister encore par ci par là, cette vision de "guichet", mais elle est rare. On la trouve encore à La Poste, par exemple : même si vous y aller tous les jours pour acheter des timbres et expédier votre courrier, vous restez, pour cette entreprise, un parfait inconnu.Tout ça est en train de changer, mais ça aura pris du temps.

Alors, ensuite, on a popularisé une nouvelle notion : le Marketing One to One : chaque client est unique, les offres se spécialisent, se customisent. C'est toute la vague des gourous de la relation client, des marchands de CRM (Customer Relationship Management). Don Peppers s'est fait le gourou de cette tendance, avec son livre , "The one to one fieldbook". Il en a publié des tas d'autres depuis.C'est une étape décisive, qui a fait prendre conscience que le client est une personne, qu'il a une existence. Quelle audace !

Alors, pour aller encore plus loin, que faut il dire maintenant ?

Le dernier ouvrage de Stefan Engeseth, un suédois, pas un américain pour une fois, apporte la réponse : ONE, a consumer revolution for business. One

De quoi s'agit il ?

Il s'agit de confondre en un seul (ONE) le client et l'entreprise.

Il s'agit en fait de faire diriger l'entreprise par le client, en le faisant entrer dans tous ses process.

Concrètement, cette tendance est déjà en route : si vous voulez que votre entreprise réussisse il faut que les gens la connaissent, mais surtout il faut qu'ils connaissent aussi vos clients.Les clients de nos entreprises se rencontrent, se connaissent, parlent entre eux dans notre dos, comme une secte.Alors, autant entrer dans le jeu, et être partie prenante de ce phénomène, provoquer ces rencontres, les encourager, les utiliser pour faire entrer l'innovation et la créativité dans tous les étages et process de l'entreprise.

Les blogs, internet, les forums, les communautés, tout ça a fait exploser les schémas.

Si UN seul client est mécontent, il peut, grâce à internet, les médias, littéralement ruiner la réputation d'une entreprise en quelques clics.

Alors, il suffisait d'y penser, Stefan Engesth nous conseille de vite nous mettre en mouvement pour exploiter ce phénomène dans le bon sens, c'est à dire en faisant faire du bruit, en faisant se rencontrer les clients satisfaits.

Autre conseil, dépêchons nous de faire participer les clients à la Recherche et au développement, sinon nos produits vont devenir ringards et la publicité ne servira plus à rien (si tant est qu'elle serve encore à quelque chose).Il ne s'agit pas seulement de faire des "études de marché", non, il s'agit de faire VRAIMENT entrer le client dans la Recherche.

Un peu théorique ?

Non, certains ont déjà commencé.

Prenez Procter et Gamble, qui a pris pour slogan : "The consumer is the boss" .Corpinfo_consboss

Conscients que leurs 300 marques, et leurs collossaux budgets de publicité, ne les protégeaient plus comme avant, ils ont mis le paquet sur ce concept du client dirigeant, chef du royaume. Ils ont ainsi créé une communauté des clients adolescents  les plus influenceurs, il y en a 250 000 aux Etats Unis, et des plate-formes pour qu'ils se retrouvent et parlent des produits.

Cette plate-forme, c'est tremor.com, qui est étonnante et dont Stefan Engeseth nous fait découvrir toute la puissance. Pas encore en France, mais pour combien de temps ?

Alors, pour se lancer dans cette approche révolutionnaire de la relation client, ce ONE, Stefan Engeseth nous propose des tests . Exemples :

- Fermez les yeux, et imaginez que vous êtes le client de votre propre entreprise; Que voyez vous ? Vous appelez cette entreprise, et vous demandez à parler à ...vous-même : de quoi vous plaignez vous ? que voulez vous changer tout de suite ?

- Est ce que vous avez envie d'être client de l'entreprise où vous travaillez ? Non; alors peut-être devez vous songer à créer votre propre entreprise.

- Combien de temps passez vous chaque semaine avec des clients de votre entreprise ? Pour info, il paraît que Michael Dell, le Président de Dell, dit passer 40% de son temps avec des clients.

- Est ce que vous avez des intérêts communs avec vos clients ? Avez vous des clients communs avec vos fournisseurs ?

Bref, tout un tas de tests et de questions qui mettent le client, non pas au centre, comme continuent à le clamer ceux qui savent à peine de quoi ils parlent, mais comme UN parmi nous , parmi d'autres, parmi les collaborateurs de l'entreprise, parmi ses partenaires.

Oui, cet ouvrage est excellent pour ringardiser et rendre ridicules tous les discours convenus sur les clients que l'on entend régulièrment.

C'est aussi une excellente introduction pour mieux comprendre tous ces phénomènes de discussion entre clients qui dépassent les entreprises et leurs dirigeants, toutes ces rumeurs qui peuvent faire beaucoup de mal, ... ou de bien. Ce que l'on appelle le "Buzz Marketing", cette prise en main des phénomènes de rumeur par les entreprises elle-mêmes, et leurs conseils en communication, et pour lequel de nombreux jeunes se passionnent, comme ce fan qui en a fait son blog.

Oui, le royaume de l'entreprise est plus que jamais dirigé par le client, dans des proportions que l'on ne soupçonne pas encore totalement dans de nombreuses entreprises.

Visitons régulièrement le blog de Stefan Engeseth pour rester dans le coup ...et en parler entre nous.Certains bloggeurs l'ont déjà repéré.

Les bloggeurs sont probablement l'avant garde de ces phénomènes.


Le chausseur de Marie-Antoinette

Marieantoinette_2   Cela fait un an déjà que ce blog existe, le premier article fondateur datant du 10 octobre 2005, consacré à ce que j'avais appelé, dans un Manifeste introductif, le "Projet Zone Franche" .Depuis, il y a eu 90 articles postés.

Le but était de porter un autre regard sur le management et la performance dans nos entreprises, partant du constat que les dirigeants, les actionnaires et les collaborateurs ne se comprenaient plus.

En fait les sujets ont été variés, parfois plus superficiels, souvent des réactions à des spectacles, des opéras, des lectures, des rencontres, des conférences, des blogs,...mais globalement ils m'ont permis d'aborder de nombreux sujets qui me tiennent à coeur et constituent ma vision du management et mes propositions pour faire de l'entreprise un monde meilleur. Cela donne envie de continuer, d'approfondir.

Le lectorat est resté éliste, puisque vous êtes environ un millier chaque mois à venir sur ce blog, certains par le hasard d'une recherche sur Google ou Yahoo; d'autres sont venus grâce aux liens que certains amis ont mis sur leur blog : merci Yoann, merci Philippe, Générations Débats, mais aussi des blogueurs,rencontres virtuelles d'ici, que je n'ai jamais rencontrés mais qui ont mis un lien vers ce blog : Vanina, La Chouette, TVnomics,Bertrand, Le Perfologue. D'autres viennent parce qu'ils sont des amis, des proches, des collaborateurs, des clients. Certains sont venus et reviennent, à fréquence variée, et deviennent les fidèles ...

Certains viennent aussi en passant par le site de ma société de conseil en stratégie et management, PMP.

En fait, cette proximité de ceux qui fréquentent, comme un club privé,  ce blog est le moteur qui m'inspire. C'est comme d'écrire pour chacun individuellement.

Cette impression de m'adresser à des individus qui m'ont choisi, et non à une masse informe qu'il faudrait contenter pour faire de l'audience, correspond bien à mon tempérament.

Peut être avez-vous vu ce film de Sofia Coppola, "Marie Antoinette" ?

On ne sait pas lequel des deux est le plus heureux dans ces scènes, Marie Antoinette avec tous ces serviteurs à ses pieds, et ses gâteaux à sa disposition, ou bien ce coiffeur, ce patissier, ce chausseur.

En fait, ce film dit tout de cette "relation client" , que l'on expérimente chaque jour.

Certains jours, nous sommes Marie-Antoinette, et nous avons envie du meilleur, d'être non pas satisfaite, mais comblée, ravie par ces merveilleuses chaussures, cet excellent service, ces gâteaux surprenants, ce coiffeur si drôle; et malheureusement, la Marie-Antoinette qui est en nous est souvent déçue par les files d'attente, les vendeuses désagréables qui sentent la transpiration, les serveurs qui ne savent plus sourire, les coiffeurs mal coiffés.

Et puis, certains jours, surtout si l'on travaille dans une activité de service (mais qui peut dire aujourd'hui qu'il ne travaille pas dans une activité de services ?), on est le chausseur, le pâtissier, le coiffeur, et on a un mal fou à rendre Marie-Antoinette heureuse, au point de la traiter au fond de nous même de petite conne.

Mal nous en prend, car tous nos clients sont aujourd'hui des Marie-Antoinette, des jeunes filles précieuses et inconséquentes, des garçons diletantes, toujours à demander plus, à ne jamais se satisfaire de ce qui a déjà été donné. Par contre, et on le voit bien dans le film, si la relation colle bien, c'est tout bénéfice, et toute une relation fidèle qui s'installe entre le coiffeur et la reine.

Alors, merci pour votre fidélité, à vous, toutes les Marie-Antoinettes du blog.

Et rappelons-nous que parfois nos clients sont aussi  ces Marie-Antoinettes, devant lesquelles nous nous agenouillons, de belles chaussures rouges à la main, sans qu'elles ne daignent même nous remarquer....et d'autres fois, elles ne peuvent plus se passer de nous...et on les adore...Encoremarieantoinette_2

C'était mon post sur les clients, et les lecteurs de blogs, volages...


Y a-t- il un secret pour faire bouger une entreprise publique ?

Fonctionnaire

Quand on parle du Service Public, c'est l'occasion,surtout pour ceux qui n'y connaissent rien, d'échanger de bonnes blagues; ça parle de fainéants, de grèves, de résistance au changement. Coluche déjà avait donné le ton dans un sketch célèbre, caricaturant les chassés croisés entre « ceux qui arrivent plus tard qui croisent ceux qui repartent en avance », et c’était avant les trente cinq heures.

Alors, évidemment, être patron depuis toujours, d'entreprises publiques, et venir affronter l'assemblée des anciens HEC, ça relève du courage. Jean-paul Bailly, président de La Poste, et ancien président de la RATP, n'en manquait pas, et c'est avec un large sourire qu'il s'est adressé à nous le 10 octobre aux "matins HEC". Il a été accueilli par une assemblée attentive, toute respectueuse de ses états de service. 

Le métier de consultant donne  parfois la chance de rencontrer et de travailler avec des personnes remarquables, dont on respecte la confiance, et dont on garde le souvenir pendant longtemps. Jean-Paul Bailly fait partie pour moi de cette galerie de rencontres mémorables de mon expérience professionnelle. J’étais heureux de l’écouter ce matin.

A cette occasion, il nous a fait part de son secret pour faire bouger une entreprise publique, à partir de son expérience à la RATP et à La Poste.Il est profondément convaincu que l’exigence de performance est essentielle, et un devoir quand on dirige une entreprise publique. Cette exigence n’a pas de couleur politique, il a d’ailleurs été nommé à ses postes tant par des gouvernements de droite que de gauche.

Il est opposé à ces systèmes de Direction à deux têtes, avec un Président d’un bord, et un Directeur Général de l’autre bord, qu’il a eu à connaître parfois, et dont il a constaté, dit il « les ravages ». Pourvu qu'il soit entendu, car plusieurs entreprises publiques en sont encore là aujourd'hui.Et puis il nous a donné en 5 points les ingrédients de sa méthode de gestion du changement. Elle a peu changée entre la RATP et La Poste., sauf qu'il a fallu aller plus vite à La Poste.

Alors, cette méthode ?

  1. Donner une Vision, un projet et des valeurs : tout ça, la Poste en était dénuée lorsqu'il est arrivé, nous dit il.Il nous encourage à bien peser en amont ces ingrédients de la réussite, plutôt que de succomber à la frénésie de l’action, des projets en désordre, dont on ne connaît pas le but qu’ils servent. Tout le temps passé sur l’amont est clé pour réussir. Cette vision, il faut la communiquer, l’expliquer, et on sent combien il aime personnellement le faire ; il a rencontré, au cours de conventions et réunions diverses, plus de 10 000 personnes par an pour cet exercice - rappelons que La Poste, c'est 280 000 personnes en France.
  2. Mettre en place un management décentralisé par métier : La décentralisation, la délégation, les business units, c’est la marque de fabrique de Jean-Paul Bailly. Ce fonctionnement fait le pari que la responsabilité est plus efficace que la soumission. La Poste est aujourd'hui clairement organisée par métiers, et les niveaux hiérarchiques ont été ramenés à trois (national, territorial, établissement). Je me rappelle encore y avoir connu jusqu’à 7 ou 8 niveaux il y a quelques années, sans que cela choque personne ; j’entendais toujours : "La Poste, c'est compliqué, vous ne pouvez pas tout simplifier" ; aujourd’hui le bon sens a montré que, si, la simplification, c’est simple.
  3. Mettre en place un style de management « 3 S » - Sens, Soutien, Suivi : "A La Poste, un bon manager est celui qui fait progresser ses collaborateurs".C’est simple là aussi, mais on a plaisir à l’entendre. On connaît tellement de gens qui pratiquent l’inverse.
  4. Organiser le dialogue dans l’entreprise : Pas seulement avec les syndicats, mais en créant toutes les occasions de rencontres, d’échanges. Cette passion pour le dialogue, c'est là encore une caractéristique forte, qu'il a rôdée à la RATP, et qu'il poursuit aujourd'hui.
  5. Avoir des alliés : Il parle ici des élus locaux, qui ont traditionnellement été pris de haut par La Poste, à qui on expliquait les projets, mais sans écouter les propositions ou objections. Aujourd’hui, il sent que le dialogue, la concertation, avec les élus locaux permet de faire des changements et transformations qu’il n’aurait pas imaginé, dans la gestion des implantations de bureaux de poste notamment.

Oui, tout ça a l’air bien simple. Ça fait un peu auto-promotion, bien sûr. Et certains n’ont pas manqué de lui rappeler d’autres réalités : les lettres en retard, les files d’attente au guichet, … Eh, Ho, Président, ça ne marche pas si bien que ça La Poste !

Sans perdre son calme, Jean-Paul Bailly nous a répondu point par point, avec précision : des progrès ont été fait (les retard, ça va mieux, 80% des lettres arrivent en 48 heures), mais, c’est sûr, il y a encore plein à faire, il ne s’en cache pas. Ainsi, pour les files d’attente, ne faudrait il pas revoir les processus administratifs en guichet, qui incluent de multiples manipulations de papiers et de feuilles carbonées, et qui rendent très lent le service ? On se demande pourquoi on n’y a pas pensé plus tôt.

Mais, bon, on sent que c’est bien parti. Et on lui souhaite bonne chance.

Pour une fois, c’est le Service Public qui nous donnait des leçons, et c’était réjouissant. De nombreux dirigeants du secteur privé pourraient s’en inspirer, non ?


Lifestyle tour

Versailles

Dans la rubrique Voyages du Figaro de mardi dernier (3/10), on découvre de nouvelles formes de micro-entreprises, ces entreprises tant chéries de Renaud Dutreil et Jean-Louis Borloo en ce moment : les micro agences de tourisme.

Il s’agit de particuliers, amoureux de leur ville, qui se reconvertissent en guides touristiques et proposent à une clientèle de niche de les accompagner et de leur faire découvrir tout ce qu’ils aiment dans leur ville. Ils les accompagnent ainsi dans des « gastro rallye » à Berlin, la tournée des bars à tapas de Barcelone, ou un plan shopping dans les meilleures boutiques de Melbourne.

Cet engouement pour l’expérience originale (oui, cette fameuse expérience, qui est au service ce que le service est au produit), complètement customisée pour le client, répond apparemment à un vrai besoin.

« Les voyageurs en ont assez d’être traités comme des moutons. Ils veulent du sur-mesure et qu’on les mette en relation avec le bruit de la ville, qu’on leur fasse découvrir les meilleures adresses du moment… » témoigne Tara Stevens, une des fondatrices de Saboroso à Barcelone.

C’est vrai que quand on débarque dans une ville qu’on ne connaît pas, on a toujours le risque de passer à côté du meilleur, de l’endroit sympa dont on ne parle pas dans les guides et où tous les habitants branchés se rendent.

Et dans nos entreprises, alors, est ce que ce n’est pas un peu pareil ?

Rappelons nous cette première journée dans l’entreprise. C’est souvent le souvenir d’une anecdote amusante. Personne n’est épargné. Lou Gerstner, l’ancien Président de IBM, raconte dans son livre de souvenirs (« Who says elephants can’t dance), que le premier jour de son arrivée comme Président, le 1er avril 1993, il est resté coincé devant la porte d’entrée. Il y avait un lecteur de badge à côté de la porte, mais comme c’était son premier jour, il ne possédait pas ce badge magique. Alors il cogne à la porte, plusieurs fois, avant qu’une femme de ménage s’inquiète de ce fou qui tambourine la porte de l’entreprise, et finisse par lui ouvrir.

Des histoires comme ça, on en connaît tous. Alors cette nouvelle profession de « lifestyle tours operators », pourquoi ne pas la créer aussi dans l’entreprise ?

Oui, un accueil spécial par un guide, un « vieux de la vieille » de la boîte, qui connaît tous les trucs, les bonnes places à la cantine, le prénom des secrétaires, où sont les toilettes, et qui pourra répondre à toutes les questions pendant les premiers mois ou semaines d’intégration, ou d’arrivée à un nouveau poste, ça serait sympa non ?

Comment l’appeler ?

« lifestyle coach » ?

«  Chief Majordome Officer (CMO) » ?

“Directeur du bien-être” ?

Et puis cela pourrait constituer une communauté de guides dans l’entreprise, qui se relaieraient selon les arrivées, comme les guides qui attendant dans la cour du château de Versailles, et accompagnent les groupes dans les visites.

Alors, prêts ?

Qui commence ?


La sincérité est-elle du baratin?

Baratin

S’il y a une valeur qui marche fort quand on parle de management ou de leadership, ou même des hommes politiques, c’est bien la sincérité.

Oui, on nous le dit et redit, le vrai leader n’est pas un style ou une posture, mais est un être authentique. Il faut apporter dans ses actes et ses comportements cette part de soi-même qui dit le vrai, le sincère.

Alors, évidemment ça fait tout drôle de lire à la dernière ligne du petit ouvrage de Harry G. Frankfurt, « De l’art de dire des conneries », que :

« La sincérité, c’est du baratin ».Frankfurt_1

De quoi parle-t-on ?

Le baratin dont on parle ici (traduit de « bullshit », qui est plus imagé), est une tendance en fort développement pour une raison simple :

« Le baratin devient inévitable chaque fois que les circonstances amènent un individu à aborder un sujet qu’il ignore. La production de conneries est donc stimulée quand les occasions de s’exprimer sur une question donnée l’emportent sur la connaissance de cette question ».

Une des sources de la prolifération du baratin identifiée par Harry G. Frankfurt est liée à un scepticisme envers la possibilité d’accéder à une réalité objective. Pour tout observateur du monde de l’entreprise et des pratiques de management, il est facile de voir de quoi il est question.

Le monde est tellement complexe, les facteurs de changements tellement nombreux, les progrès de la connaissance et de la technologie tellement rapides qu’il semble impossible d’aborder le moindre sujet avec exactitude. Ou alors cela demande un effort d’analyse que beaucoup ne se sentent pas le courage de faire, sans parler du manque de temps invoqué par tous les fainéants.

C’est cet abandon devant la complexité du monde qui conduit à rechercher un autre idéal, qui permettra de simplifier, de mutiler, de raconter n’importe quoi sans se sentir coupable.

L’idéal de sincérité vient à point nommé pour remplir cette fonction.

Observons ce patron, pris au dépourvu et sommé de prendre position dans un débat entre experts et managers, sur un sujet sur lequel il n’a aucune expertise ni opinion : c’est la sincérité qui va lui permettre de raconter n’importe quoi, sans aucun souci de rechercher des éléments de vérité ou de preuves dans ses positions. C’est aussi cette sincérité bien particulière qui autorisera un politique à parler au nom de la France profonde, ou "d'en bas", des français qu’il a écouté, des banlieux, bref n’importe quel sujet.

Pourtant :

« Aucune théorie ni aucune expérience ne soutient ce jugement extravagant selon lequel la vérité la plus facile à connaître pour un individu serait la sienne. Les faits qui nous concernent personnellement ne frappent ni par leur solidité, ni par leur résistance aux assauts de scepticisme ».

Intéressant, mais vous, SINCEREMENT, vous en pensez quoi ?

Attention, ne répondez pas trop vite, vous risqueriez de …..dire des conneries !