Des leaders qui brûlent ou des leaders "résonnants" ?
05 mars 2006
Un lecteur qui se dit "assidu de mon blog" (merci vincent), me fait connaître, pour compléter le sujet de mon précédent post, une enquête du cabinet Burson Marsteller, parue en 2005, réalisée auprès de CEO, seniors executives, analystes financiers, responsables politiques et dirigeants des médias aux Etats-Unis, en Europe, en Asie, en Amérique Latine.
Que dit cette enquête (que l'on trouve aussi ICI ) ?
54% des CEO, s'ils avaient le choix, refuseraient d'être CEO.
Ce taux est de 60% en Europe, de 64% en Amérique du Nord, 27% en Amérique Latine.
Les motifs évoqués en priorité :
- déséquilibre vie privée-travail (64%),
- vision trop court-termiste de l'entreprise (42%),
- stress (37%).
Cette enquête est également citée dans un dossier préparé par Business Digest en janvier 2006, et qui s'intéroge sur ce phénomène de "burnout" (l'usure au travail) parmi les cadre et les dirigeants.
Ce phénomène peut être décrit comme un état de fatigue extrême, un mauvais sommeil, un désintérêt à la tâche et une baisse d'activité du cadre qui en est victime.
Les cadres dirigeants et les célibataires de moins de 30 ans qui ont un niveau d'études élevé sont plus touchés que les autres, selon les professeurs Christina Maslach et Michael Leiter, auteurs de plusieurs ouvrages de recherche dont le dernier, "Banishing Burnout".
En fait, ce sont les personnes dont le travail est "passionnant, amusant, motivant" qui sont menacés car ils ont tendance à travailler trés dur et à enclencher cet épuisement, prise de distance, innefficacité.
Ce qui est intéressant dans ces recherches, ce sont les remèdes que les deux chercheurs considèrent comme les plus efficaces.
On pourrait croire que la meilleure réponse, tant au niveau curatif que préventif, se concentre sur l'individu : on voit bien rappliquer tous les coachs, spécialistes en techniques diverses de relaxation, de méditation, et j'en passe...la soupe est bonne....
Sans contester à ces approches leur efficacité, les auteurs font plutôt la promotion d'approches par des changements managèriaux et collectifs, et donne donc de l'espoir aux dirigeants d'entreprise qui redoutent que ce phénomène ne freine la performance de l'entreprise.
De quoi s'agit il ?
Il faut cliquer pour lire la suite.....
Maslach et Leiter proposent de lutter contre le burnout, c'est à dire en fait le prévenir (banish), en "abordant le bien-être des individus sous un angle positif", et devinez quelles méthodes sont mises en avant : L'engagement ! (pour les lecteurs assidus, revoir ICI).
Le burnout, c'est en fait "l'érosion de l'engagement de la personne vis à vis de son travail".
Il s'agit donc d'être capable de "promouvoir des valeurs soutenues par des pratiques managèriales cohérentes". L'engagement se traduit par l'énergie, l'implication, l'efficacité, autant d'antidotes au "burnout".
Ils ont identifiés six facteurs organisationnels clés à surveiller : la somme de travail, le contrôle (jusqu'où donner de l'autonomie ?), la rémunération, la communauté, l'équité, les valeurs.
L'un des auteurs est cité :
"Un état affectif persistant et positif de satisfaction du salarié qui se caractérise la vigueur (énergie, résilience, volonté de s'investir, résistance à la fatigue), l'implication (enthousiasme, sens, fierté, inspiration) et l'absorption (état plaisant d'immersion totale : le temps passe vite et on peut se détacher du travail)"
Il est bien précisé que l'engagement ne correspond pas à un excès de zèle aveugle, ni à se laisser dominer par un manager irresponsable qui vous refile "le dossier de 1000 pages à lire pour la veille" ou "l'objectif annuel à satisfaire dans la semaine".
Le dossier de Business Digest contient aussi un intéressant témoignage de Yoann Boaretto, inspecteur Général des Finances, qui pose bien les responsabilités du leader dans ce phénomène de "burnout".
Il nous rappelle notamment (ouf!), que "la course à la performance n'est pas automatiquement synonime de "burnout". C'est la recherche ou l'imposition d'une performance démesurée qui est en cause", c'est à dire l'inconscience du caractère excessif de l'effort exigé (souvent par la victime elle-même). C'est donc une erreur de management, délibérée ou inconsciente".
Reste à bien déterminer ce qu'est une "performance démesurée" : tout est affaire de perception...
Yann Boaretto pense que plus à même pour traiter le sujet est le manager de proximité, en charge d'éviter de "casser" un collaborateur de bonne volonté.Pour le DRH des grandes unités, l'enjeu est dans la gestion des "accidents de parcours successifs".
La tâche n'a pas l'air facile, et les méthodes restent encore un peu théoriques. Il faudrait lire l'ouvrage de Maslach et Leiter en détail.
Pour aider encore les praticiens un peu déboussolés, le dossier indique un ouvrage pratique pour permettre d'écouter ses collaborateurs et partager les émotions, pour plus d'efficacité : Resonant Leadership,de Richard Boyatzis et Anne Mc Kee. (HBR, octobre 2005). Il existe aussi en français depuis février 2006 : "Les nouveaux défis du leadership".
Pas mal de lectures en perspectives.
Pour le dossier de Business Digest, qui contient plein de choses intéressantes, il est disponible ICI, mais il faut s'abonner je crois.
Alors : Êtes vous un leader "résonnant" ?
Auriez-vous des cas du burnout en France, précisément des cas de cadres dirigeants qui sont exclus de la règlementation sur la durée du temps de travail?
Il y a-t-il déjà eu de la jurisprudence au niveau européen à ce sujet?
Merci
Rédigé par : Waeg | 26 février 2007 à 11:19