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Vision et décision : la leçon d'un grand Homme

Monnet

Sur les conseils d’un ami, je me suis lancé dans la lecture des Mémoires de Jean Monnet (617 pages !). On y ressent à chaque ligne combien cet homme avait la force qui permet de changer le monde.

Jean Monnet, c’est le « père de l’Europe », celui qui a créé le Plan en 1946.

Cette carrière qui lui fera une place d’honneur dans l’Histoire, et le conduira grâce à François Mitterrand au Panthéon, il la commence vraiment à 57 ans, en 1945.

Ses réflexions et témoignages sont une véritable leçon sur la force de la Vision et de la Volonté, cette concentration sur le moyen terme, qui est nécessaire pour mettre en perspective le présent, et éclairer le futur.

Son obsession, le but de sa vie, il l’a identifiée très tôt, nous dit il :

« Il me semblait que j’avais toujours suivi la même ligne continue dans des circonstances, sous des latitudes différentes, mais avec une seule préoccupation : unir les hommes, régler les problèmes qui les divisent, les amener à voir leur intérêt commun ».

Il n’oubliera jamais une rencontre avec Antoine de Saint-Exupéry qui lui dira : « Le plus beau métier des hommes, c’est d’unir les hommes ».

Ce sens de l’intérêt commun, il a en eu bien besoin pour convaincre à s’unir des nations qui sortaient de la Guerre. Son récit de la construction de l’Europe, vécue de l’intérieur, de petites victoires en petites victoires, est passionnant.

J’ai aussi été sensible aux moments plus intimes, où il parle de lui-même et de ses méthodes pour réfléchir et décider, car pour lui, la pensée ne vaut que dans l’action.

Voici une belle leçon sur la vision, qui se déguste mot après mot :

« Je ne saurais dire à quoi tient cette conviction qui dans les circonstances importantes de ma vie arrête brusquement ma réflexion continue pour la transformer en décision.

C’est ce que d’autres appellent le sens du moment. Mais je ne m’interroge pas  sur la nécessité de faire ceci ou cela – c’est la nécessité qui me conduit à faire quelque chose qui n’est plus un choix dès l’instant où je le vois clairement. Pour le voir clairement, je dois me concentrer – ce que je ne peux obtenir que dans l’isolement, au cours de longues marches. (…). Je me lève tôt et je parcours des kilomètres en solitaire. Quand je quitte la maison, j’emporte avec moi toutes les pensées, les préoccupations de la veille. Mais quand j’ai marché pendant une demi-heure, ou une heure, elles commencent à disparaître et peu à peu je découvre les choses autour de moi, je remarque les fleurs ou les feuilles sur les arbres. A ce moment là, je sais que rien ne peut me déranger. Je laisse mes idées se situer d’elles-mêmes à leur propre niveau. Je ne me force pas à réfléchir à un sujet donné – les sujets me viennent naturellement parce que je poursuis toujours la même pensée, ou plutôt je n’en poursuis qu’une à la fois.(…).

Marcher m’a toujours été une hygiène intellectuelle autant que physique qui m’aide en effet à conclure. Ensuite c’est différent, je reviens dans le monde de l’action, de l’exécution ».

Lisez Jean Monnet, une référence pour les décideurs en panne de vision, ou de courage.

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