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Générations connectées et déconnectées

Connected Le Monde daté du 27 novembre publie une interview du prospectiviste américain Howard Rheingold. Il est l'auteur de "smart mobs", récemment traduit en français ("foules intelligentes"), et est réputé pour ses analyses des effets politiques, sociaux et économiques des technologies émergentes.

Il observe que ces technologies, telles les mobiles, les SMS, le web, qui sont simples et facilement accessibles, permettent à des groupes importants dispersés géographiquement de se connecter, pouvant ainsi être réunis rapidement pour agir collectivement.

Il rapporte dans l'interview que 2 Miliards de téléphones mobiles sont en service dans le monde, et que 600 millions d'unités supplémentaires sont prévues pour 2006. Tout ça fait plus du tiers de la population mondiale.

Dans ces évolutions, Howard Rheingold voit une montée du pouvoir des individus, qui trouveront de plus en plus dans ces technologies de nouvelles façons de se réunir et de résister à l'Autorité, celles des gouvernements, et celles des hiérarchies.

Ceci fera acquérir de plus en plus de pouvoir aux consommateurs, ceux-ci étant capables de fixer le contenu et le prix de ce qu'il veut acheter, charge aux offreurs de s'adapter. C'est la généralisation de ces systèmes d' "enchères inversées" que l'on voit de plus en plus à l'oeuvre dans les appels d'offres d'achats des entreprises aujourd'hui.

Autre point intéressant, c'est sa vision que :

"L'accélération des innovations technologiques va accroître, dans dix à quinze ans, le fossé entre générations. Actuellement coexistent déjà cinq générations dont chacune a une approche différente des nouvelles technologies et des objets informatiques et électroniques.

Grâce à ces nouveaux outils , les jeunes qui ont entre 15 et 20 ans peuvent pour la première fois échanger avec leurs pairs - chercher ou propager de l'information, tisser des relations sociales - sans que leurs aînés aient la moindre connaissance de ce qu'ils font. A l'avenir, tout cela va changer profondément les relations entre générations dans la société."

Cette capacité à construire des réseaux et d'agir transversalement, grâce aux possibilités des technologies, on la retrouve dans les entreprises, où les connections entre pairs, qui peuvent aller au-delà des frontières de l'entreprise, créent de nouveaux jeux de pouvoirs, et permettent de mettre en place des fonctionnements complètement nouveaux. Ceux qui continuent à croire aux organigrammes, aux objectifs fixés dans des cascades de hiérarchies, feraient bien de lire Howard Rheingold.

Vous pouvez consulter son livre, en anglais, ou en français.

Il a aussi un site internet-blog.

Vous pouvez aussi voir les blogs qui, comme moi, ont réagis à cette interview du Monde, ici, et aussi ici.

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Mots de coeur

Coeur

Quand je lis aujourd’hui les « Projet d’Entreprise », « Vision 200X », « Chantiers Transverses », « XYZ Mieux que jamais », ou toute autre formulation, un item revient souvent et me frappe, surtout dans les entreprises publiques, ou à capital partiellement public, c’est :

« Placer l’économie au cœur des décisions de l’entreprise », ou quelque chose d’approchant.

On voit bien la louable intention qui accompagne une telle ambition : que l’activité de l’entreprise soit appréciée au regard de sa performance économique, que les actes et décisions des managers soient guidés par cette préoccupation permanente, que la culture économique soit plus forte.

Tout cela paraît à certains bien banal, voire trivial.

Pourtant, si de tels énoncés fleurissent, c’est qu’ils disent quelque chose sur l’entreprise et la communauté humaine qui y vit.

Il est certain que la pression des actionnaires sur les résultats et la performance est pour une bonne part dans cette tendance, et l’Etat actionnaire, sur ce terrain, véhicule des messages assez proches de ceux des administrateurs d’entreprises privées. Dans les entreprises où ces deux animaux cohabitent, c’est encore plus visible.

Ce qui est intéressant c’est d’observer ce qui est fait concrètement pour « placer l’économie au cœur des décisions de l’entreprise ».

Souvent on pense OUTILS, faire des procédures, mettre en place des systèmes, par exemple :

-         tableaux de bord,

-         balanced scorecard,

-         contrôle de gestion,

-         reporting,

-         « Pay for Performance », rémunérations variables.

Ces outils ont bien entendu leur efficacité, et le manque de pertinence des outils de pilotage constitue un handicap majeur pour les entreprises qui doivent constamment anticiper et s’adapter au changement.

Mais un programme qui se limite à ces OUTILS peut aussi manquer l’objectif.

En effet, il est aussi important que les managers eux-mêmes se sentent vraiment engagés dans la poursuite de la performance économique. C’est le point de départ de ce blog (voir ICI).

Or, on peut se trouver dans des situations où l’entreprise aimerait bien que son cœur parle « d’économie », de « rentabilité », mais où le cœur, la fierté des managers, parlent d’autres choses, telles que :

-         l’image : la mienne, celle que mes collaborateurs, et aussi (surtout? )mon chef ont de moi, mais aussi la perception de mes amis,de ma famille ("t'es un type bien puisque tu travailles dans une super boîte"), et alors ce à quoi je suis sensible, c’est à l’image de mon entreprise, car je m'identifie à elle,

-        le statut : le mien, mon grade, mon statut, mon autorité, et alors je suis sensible au statut de mon entreprise, à tout ce qui la rend sacrée, respectueuse (le fameux « service public » veau d’or adoré),

-         la sympathie, et alors ce sont mes collègues, les posters dans les bureaux, les choix à la cantine, les pots, « mes copains de bureaux », qui me motivent, et je me méfie des discours qui parlent de l’entreprise, être anonyme sans cœur.Mon entreprise, je la veux "sympa", "cool".

On pourrait chercher d’autres références.

Mais ce qui est clair, c’est que, pour que l’entreprise mette l’économique dans son cœur, il est indispensable de mettre du cœur dans l’économique pour y faire adhérer les managers : on parle alors d’ÊTRE.

C’est en allant chercher dans cette direction que l’on trouvera de nouvelles pistes d’action, plus subtiles que de mettre en place un tableau de bord de plus, et plus exigeantes pour la Direction Générale, mais indispensables pour obtenir vraiment les résultats visés.

Ces réflexions me viennent en observant les mouvements de grève et les discours des salariés des entreprises publiques qui défilent. Ils sont aussi fort bien relayés (récupérés ?) par les leaders du Parti Socialiste dans leurs discours au congrès du Mans (« Notre horizon, ce n’est pas le marché » a dit Dominique Strauss Kahn, qui n’est pourtant pas le plus virulent dans son camp). Pour eux, « l’économie au cœur », ça leur fait mal au cœur, incontestablement. Ils y voient des choses horribles.

Les entreprises ont compris l’enjeu, et je suis frappé de la profondeur des réflexions et de la qualité des démarches conduites par certaines.

Par contre, quelques irréductibles des approches mécanistes, qui pensent que la culture économique est livrée avec SAP ou tel logiciel de reporting, qui cherchent le graal dans les approches « balanced scorecard », sévissent encore. Ils peuplent les forums à dominante technologique, consacrés au pilotage des entreprises, par exemple ici.

Tout ça pour découvrir, là comme dans d'autres domaines, que "le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas".

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La caserne de pompiers

Pompiers

Dans de nombreuses entreprises, en ce moment, on prépare l'exercice de Plan Moyen terme, à trois ans, cinq ans, voire dix ans.

Cet exercice peut sembler de plus en plus difficile, voire impossible : L’environnement change, l’horizon n’est plus le même, de nouvelles orientations sont à trouver. La transformation du paysage concurrentiel est très forte. Comment s'y retrouver ?

De plus, ces démarches se situent souvent dans des contextes où l'actionnaire, représenté par les administrateurs, demande une génération de cash supèrieure, au regard des capitaux investis.

Il s'agit alors d'arbitrer sur les choix d'investissements, et parfois même de désinvestir.

Pour couronner le tout, le Plan Moyen terme pose aussi la question : "comment donner une vision et du sens" ?

Dans certains cas une autre difficulté se présente :Les idées foisonnent pour imaginer les nouveaux chemins,certaines en contradiction avec d'autres, mais il n'est pas facile de passer au "delivery" des solutions et actions.

Cette situation me fait penser aux réflexions d’Andrew Grove, alors président d’INTEL, en 1997, dans son ouvrage célèbre « Seuls les paranoïaques survivent ».

Il y décrit avec beaucoup de sincérité les étapes du développement et de la transformation de l’entreprise dont il a eu la responsabilité dans les années 90. Elle a en effet eu à décider des retournements spectaculaires, consistant par exemple à sortir d'un secteur qui avait constitué le coeur de métier de INTEL.

Andrew Grove met en garde ceux qui sont confrontés à ce qu’il appelle un « point d’inflexion stratégique », surtout quand ils sont leaders.

En reprenant cet ouvrage, je retrouve ce paragraphe :

« Que l’on dirige une entreprise ou que l’on gère sa propre carrière, les enseignements que l’on peut tirer de la confrontation avec des points d’inflexion stratégique sont les mêmes.

Les chefs d’entreprise doivent être conscients qu’aucune planification organisée ne peut les anticiper. Faut il en conclure que l’on peut jeter la planification aux orties ? Absolument pas. Il faut l’organiser à la manière d’une caserne de pompiers : dans l’impossibilité où l’on se trouve de prévoir où éclatera le prochain incendie, il importe de mettre en place une équipe dynamique et efficace, capable de faire face aussi bien à une catastrophe majeure qu’à n’importe quel incident banal. Si l’on parvient à comprendre la nature des points d’inflexion stratégique et la meilleure façon d’y réagir, on sera bien mieux placé pour protéger son entreprise.  Le dirigeant doit la piloter de façon à éviter les périls et à la mettre en situation de prospérer dans l’ordre nouveau ».

Je vais relire Andrew Grove.


Jeux de JE

Jeu

Hier matin, 16 novembre, j’étais dans une assemblée où chacun appelait l’autre « camarade ». Mais là s’arrête toute ressemblance avec le parti de marie-georges Buffet, puisque nous étions aux « Matins HEC », organisés par l’Association des anciens élèves d’HEC.

Nous recevions le 200ème invité, Gérard Mestrallet, PDG de Suez, interviewé par Vincent Beaufils (HEC 75), directeur de la Rédaction du magazine Challenges.

L’interviewé s’est prêté de bonne grâce aux questions sur la transformation en 10 ans du Groupe Suez, 40 milliards d’euros de chiffre d’affaires,passé d’une Holding avec des participations dans la Banque et l’Immobilier, à un acteur majeur du secteur de l’Energie et de l’Environnement.

Il nous a livré sa vision de l’évolution de ce secteur, sujet à un double mouvement de concentration et de dérégulation, sans oublier les perspectives à l’International (forcément on a parlé de la Chine),même si l’essentiel de l’activité de Suez est aujourd’hui en Europe (terminées les avancées hasardeuses en Argentine et en Amérique Latine).

Puis viennent les « questions de la salle », comme dit vincent Beaufils.

Et là, comme souvent dans ce genre de manifestations, quelque chose se passe . Une voix juvénile (HEC 200X) apostrophe le PDG, en prévenant qu’il va poser une question osée (c’est l’école, nous dit il, qui lui a appris à oser, alors « je vais vous poser une question osée »)… On retient son souffle. Il se demande si tous les patrons, Mestrallet dans le même sac que les autres, ne sont pas que des personnages qui ne dirigent que pour satisfaire leur ego, en faisant allusion à ce qu’il se rappelle de celui qui prêchait la convergence avec des chaussettes trouées. (tout le monde l'a reconnu et le jeune qui ose est content de son effet). Mestrallet commence à répondre « non, les patrons font de leur mieux, ils cherchent à bien faire leur boulot…. ». Interruption de vincent Beaufils, au secours du jeune qui a osé : « mais quand même, vous avez passé de durs moments ces dernières années, avec les administrateurs qui ont failli vous débarquer, qui vous obligeaient à réduire la dette … ça a été très médiatisé ». Et il en rajoute, en citant un article merveilleux, rédigé il y a un an, par une journaliste de … »Challenges ».

Et là, Mestrallet, royal : « Non, je n’étais pas inquiet, car je savais ce qu’il fallait faire, j’étais sûr que ça allait réussir, je l’ai fait, j’ai désendetté Suez, j’ai obtenu les résultats ».

En quelques minutes, le JE avait pris le pouvoir, un homme visionnaire avait emmené l’entreprise vers le succès, sans douter, « Challenges » en avait parlé dans un article merveilleux, et le « jeune qui ose » était tout rose d’avoir osé.

Ah, les jolis jeux de « JE » !


La revanche de LUCIFER

Diable2

La revue « Echanges » de novembre, éditée par la DFCG (Association Nationale des Directeurs Financiers et de contrôle de gestion), consacre un dossier au thème « Transparence et confidentialité ».

Ce thème est en effet bien dans l’actualité, l’information aux tiers délivrée par les entreprises cotées étant de plus en plus encadrée avec les lois NRE du 15 mai 2001 et de sécurité financière du 1er août 2003.

Toutefois, ces dispositions n’éteignent pas le devoir de confidentialité que l’on attend des salariés d’une entreprise, et particulièrement de son Directeur Financier. Françoise de Saint-Cernin, avocate, évoque ce paradoxe, et nous rappelle que la communication d’informations à caractère secret à des tiers est punie par le code pénal (art. 226-13) par deux ans de prison et 30.000 € d’amende.

D’où le difficile équilibre entre la confidentialité et la transparence, que la loi n’encadre pas totalement. C’est pourquoi se mettent en place, en plus, dans les entreprises des « chartes d’éthique financière », qui fixent les engagements des dirigeants et du directeur financier sur la communication financière. Le métier du Directeur Financier s’en trouve profondément changé, car il doit apprendre le métier de communicant, en pesant ce qu’il doit et ce qu’il peut dire, sans franchir la ligne jaune.

Autres outils et règles pour accroître la transparence, les normes IAS-IFRS, par exemple la norme IAS 14, qui oblige à fournir des renseignements sur les résultats, les risques, les potentiels, par secteur d’activité et par zone géographique. Cette segmentation peut amener à rendre publiques des informations sur les segments et produits à marge, ou en perte, que l’on aimerait mieux garder secret vis-à-vis de clients ou de partenaires (par exemple des distributeurs). Chacun cherche les meilleurs moyens de regrouper les segments ou les zones pour masquer ce type d’informations. La norme ne donne pas des règles très strictes, et Xavier Paper, encore un avocat, nous suggère de traiter ce sujet avec le « discernement des dirigeants ».

Une autre pièce du dispositif pour améliorer la transparence, la loi Sarbanes-Oxley, et le nouveau référentiel comptable international (IFRS), qui s’intéressent à la qualité du contrôle interne. En l’absence de définition du contrôle interne, et avec des directives qui ont été données tardivement, les entreprises pataugent un peu sur ce terrain, les rapports publiés n’étant pas encore complètement convaincants, comme nous l’indique Stéphane Baller (oui, vous avez deviné, il est avocat !).

Malgré l’accumulation de ces lois et dispositifs, le sujet ne semble pas épuisé, et l’on s’intéresse maintenant au maillon faible de la transparence, les individus : des dispositifs nouveaux de « whistleblowing » se mettent en place dans les entreprises . de quoi s’agit il ? de permettre à des salariés de signaler des comportements supposés fautifs imputables à leurs collègues de travail ; ces dispositions vous sont soumises pour signature au moment de l’embauche.

Tous ces dispositifs nous font entrevoir le meilleur des mondes de la transparence…

Mais quel rapport avec Lucifer ??

Ca vient…

Jean pascal Farges (tiens ! lui, il n’est pas avocat) termine ce dossier d’Echanges en nous alertant sur les dangers de cette histoire de transparence contrainte par le législateur et les régulateurs. Il nous rappelle combien le pouvoir dans les entreprises est souvent associé à la détention de secrets et d’information inaccessibles ou cachées au commun des mortels. Le management peut être vu comme un subtil jeu d’équilibre entre ce qui est secret et ce qui est transparent, et, quand il y a crise, le pouvoir lâche un peu de lest sur le secret et révèle des secrets cachés pour ramener l’ordre, mais sans trop lâcher quand même.

Les lois viennent en fait apporter des contraintes dans ces équilibres, souvent aussi après une crise (voir Enron, la catastrophe du tunnel du Mont Blanc), car la transparence n’est pas naturelle. On se méfie même de celui qui est porteur de lumière (lux feris, Lucifer, porteur de lumière). On aime la confidentialité des affaires, les secrets bien gardés.

Et pourtant, une des quêtes de l’homme est constamment de tenter de percer des secrets, jusqu’aux plus profonds tels ceux de la vie elle-même (d’où venons nous ? où allons-nous ? pourquoi ?), et la limite du savoir est toujours repoussée. Cette part d’ombre fait partie de la vie aussi, et nourrit le destin des hommes. Sans confidentialité, comment parler de ma douleur à mon médecin, de mes péchés à mon confesseur ? Sans ombre, comment puis-je connaître la lumière ?

C’est pourquoi toutes les tentatives de recherche de la transparence absolue, allant jusqu’à inciter à dénoncer ses collègues, à tout dire, à ne rien cacher, vont trouver leur limite naturelle dans l’homme lui-même.

Toutes les tentatives d’encadrement forcé ne remplaceront pas le management par la confiance.

A trop vouloir éclairer, ne va-t-on pas briser l’harmonie nécessaire entre l’ombre et la lumière.

Oui, il serait bien sombre, cet univers où règnerait partout la lumière.

La voilà, la revanche de Lucifer ! Méfions nous.


Vision et décision : la leçon d'un grand Homme

Monnet

Sur les conseils d’un ami, je me suis lancé dans la lecture des Mémoires de Jean Monnet (617 pages !). On y ressent à chaque ligne combien cet homme avait la force qui permet de changer le monde.

Jean Monnet, c’est le « père de l’Europe », celui qui a créé le Plan en 1946.

Cette carrière qui lui fera une place d’honneur dans l’Histoire, et le conduira grâce à François Mitterrand au Panthéon, il la commence vraiment à 57 ans, en 1945.

Ses réflexions et témoignages sont une véritable leçon sur la force de la Vision et de la Volonté, cette concentration sur le moyen terme, qui est nécessaire pour mettre en perspective le présent, et éclairer le futur.

Son obsession, le but de sa vie, il l’a identifiée très tôt, nous dit il :

« Il me semblait que j’avais toujours suivi la même ligne continue dans des circonstances, sous des latitudes différentes, mais avec une seule préoccupation : unir les hommes, régler les problèmes qui les divisent, les amener à voir leur intérêt commun ».

Il n’oubliera jamais une rencontre avec Antoine de Saint-Exupéry qui lui dira : « Le plus beau métier des hommes, c’est d’unir les hommes ».

Ce sens de l’intérêt commun, il a en eu bien besoin pour convaincre à s’unir des nations qui sortaient de la Guerre. Son récit de la construction de l’Europe, vécue de l’intérieur, de petites victoires en petites victoires, est passionnant.

J’ai aussi été sensible aux moments plus intimes, où il parle de lui-même et de ses méthodes pour réfléchir et décider, car pour lui, la pensée ne vaut que dans l’action.

Voici une belle leçon sur la vision, qui se déguste mot après mot :

« Je ne saurais dire à quoi tient cette conviction qui dans les circonstances importantes de ma vie arrête brusquement ma réflexion continue pour la transformer en décision.

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La fin d'un rêve ?

Rocard Ce matin, l'Association des anciens de Peat Marwick recevait Michel Rocard, qui a fait ce détour pour nous avant d'aller voter pour les motions socialistes.

Le sujet était "l'Europe".

J'ai retenu de son intervention franche et directe une message fort construit sur une conviction personnelle :

"L'EUROPE POLITIQUE EST MORTE !"

On entendait dans ce discours la fin d'un rêve qui a circulé en France et en Europe depuis Charlemagne, comme nous l'a rappelé michel Rocard.

Dans une Europe impuissante, sans moyens de défense ni moyens pour une politique étrangère, que les membres voient comme "une grande Suisse", sans territoire, avec une France perçue comme arrogante par tous ses partenaires, et des nouveaux entrants qui se sont débarassés du communisme grâce aux Etats-Unis (et non grâce à l'Europe), michel Rocard ne voit aucune issue pour les visions d'une Europe politique.

C'est la fin d'un rêve, un regard désabusé et "à quoi bon"iste sur l'Europe et la France. Un regard de spectateur.(Les pessimistes sont des spectateurs, a dit Goethe).

Pour en rajouter une louche, michel Rocard nous a prédit que le futur centre du Monde serait en Asie, et que tout ce que l'on fait en Europe pourra être délocalisé en Inde ou en Chine.

La bonne chose dans cette prise de conscience, c'est que le Nouveau Monde est à inventer, les nouvelles règles sont à écrire; tout commence aujourd'hui. De nouveaux leaders sont nécessaires pour prendre la place que laisse michel Rocard.

Les prétendants sont nombreux; mais où est la vision ?

Eternelle question, pour les Etats, la politique, et nos entreprises.


Emotion et cerveau droit

Joyaux_2 J'étais samedi soir à la représentation de "Joyaux" à l'Opéra Garnier.

C'est une chorégraphie de Georges Balanchine, de 1967.

J'ai passé une soirée excellente, hors du temps, toute entière consacrée au plaisir et à l'émotion.

Quel plaisir d'arriver dans cet édifice extraordinaire, de monter les marches et de s'installer dans cette salle légendaire. A chaque fois, cela me ressource. C'était plein .

L'orchestre démarre, musique de Fauré, le rideau se lève sur "Emeraudes", décor tout en vert, costumes brillants de christian Lacroix, l'harmonie des danseurs entre eux, la beauté de l'ensemble.Laeticia Pujol, Mathieu Ganio (que j'avais déjà admiré dans Caligula de Nicolas Le Riche ici-même la semaine dernière), et Kader Belarbi enchantent le public.

Puis c'est "Rubis", tout en rouge, musique de Stravinski, façon plus moderne, plus rythmée.Le rouge et le rythme font monter l'excitation. Aurélie Dupont, Marie-Agnès Gillot et Alessio Carbone (tout sourire et communiquant le plaisir d'être là) y contribuent.

Puis, après l'entracte, c'est "Diamants", tout en bleu et argent, le public applaudissant ce superbe décor (voir photo) dès le lever du rideau, musique de Tchaikovski, avec un extraordinaire danseur Jean-Guillaume Bart.

Être ainsi baigné d'émotion, émerveillé de la grâce et de la prestation des danseurs, applaudir pour remercier de ce moment, quel bonheur !

Je ne suis pas un expert en ballet, mais j'aime cette émotion intense que procure cette représentation.Se laisser aller ainsi à l'émotion est une hygiène bien utile.

On sort de la salle tout ébloui, comme d'un autre monde, et on porte sur la vie un regard optimiste sur la capacité des Hommes à faire des choses extraordinaires ensemble et en harmonie.

De nombreux auteurs (Goleman par exemple) ont disserté sur le bénéfice de travailler à la fois son cerveau gauche (la raison, la pensée), et le cerveau droit (l'imagination, l'émotion, la créativité)pour être plus efficace. Pas besoin de lire ces ouvrages, rendez vous directement à "Joyaux" et laissez-vous aller. Vous comprendrez tout.


Comment créer un consensus ?

Consensus_1

Je suis souvent mêlé à des situations où des individus constituant un groupe me demandent de les aider à adopter une position commune, alors que les oppositions peuvent être fortes au sein de ce groupe. Il ne s'agit pas de dégager une majorité par un vote, mais d'obtenir une position unique de l'ensemble du groupe, qui fonctionne comme un "groupe de travail".

Il n’existe probablement pas de méthode unique et infaillible, car les circonstances, le sujet, le type de groupe et les personnalités en présence sont des facteurs importants à prendre en compte.

La théorie de l'engagement, dont j'ai déjà parlé ici, fournit une approche originale de ce sujet.Les deux auteurs ,Joule et Beauvois, ont notamment mené des expériences pour tenter de répondre à la question suivante :

Pour aboutir à un consensus dans un groupe, faut il :

-         (1) rechercher et mettre en avant ce qui rapproche les parties prenantes ?

OU

-         (2) plutôt exacerber ce qui différencie les parties prenantes ?

Prenez le temps de choisir entre ces deux propositions avant de cliquer sur la suite…

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L'engagement encore

Pig Yoann a un blog sur l'INNOVATION. C'est un ami, qui a déjà fait un peu de pub pour Zone Franche.

Juste retour d'ascenseur, allez voir son post d'aujourd'hui : il est allé au cycle de conférences sur l'Innovation organisé par Marc Giget, qui recevait Jean Todt, patron de la Scuderia de Ferrari.

Ce qu'il a retenu, c'est que le secret de l'innovation, c'est l'ENGAGEMENT.

Innovation et engagement, ça va ensemble.

Alors restez connectés sur "Stay Hungry, stay foolish", c'est le nom du blog de Yoann.

Quelque chose vous intrigue : oui, vous vous demandez quel est le rapport avec la photo en illustration.

Non, ce n'est pas que Yoann est un cochon;

c'est une référence au proverbe anglais qui dit que :

Dans une petit déjeûner anglais "eggs and bacon",

"La poule qui a fourni l'oeuf est concernée,

mais le cochon qui a fourni le bacon est engagé.

Un bon moyen de se rappeler ce que veut dire engagement.